* Les actionnaires valident la vente du pôle énergie à GE

* GE ne prendrait pas en charge l'amende en discussions aux US

* L'amende, pour corruption présumée, pourrait atteindre $700 mlns

* Le PDG d'Alstom obtiendra un bonus pour l'opération GE (Actualisé avec propos du PDG sur France Info)

par Benjamin Mallet

PARIS, 19 décembre (Reuters) - Alstom a annoncé vendredi son intention de prendre en charge une amende issue d'un accord avec la justice américaine dans une affaire de corruption présumée bien que General Electric se soit engagé à supporter tous les passifs et risques associés au pôle énergie du groupe français.

Les actionnaires d'Alstom ont cependant validé à 99,2% lors d'une assemblée générale extraordinaire la vente du pôle énergie au géant américain pour 12,35 milliards d'euros. L'opération doit être finalisée au deuxième trimestre 2015.

Le dossier judiciaire en cours de négociations aux Etats-Unis, pour lequel Alstom attend un accord dans les prochains jours, porte entre autres sur des soupçons de corruption active de fonctionnaires dans le cadre de plusieurs projets, en Indonésie, en Inde et en Chine.

Une source a déclaré mardi à Reuters que l'accord que pourrait conclure Alstom atteindrait 700 millions de dollars (559 millions d'euros), soit le montant le plus élevé infligé aux Etats-Unis pour une affaire de corruption étrangère.

"Dans la mesure où un accord serait trouvé (...), le Departement of Justice américain devrait requérir que toute amende reste à la charge d'Alstom", a déclaré le PDG du français Patrick Kron, lors de l'assemblée générale des actionnaires, sans se prononcer sur les montants en jeu.

Patrick Kron a toutefois ajouté que GE avait demandé à pouvoir utiliser la marque Alstom sur une plus longue durée que prévu et que cette demande, combinée à d'autres nouveaux éléments positifs dans les discussions avec le groupe américain, compenserait en partie l'impact d'une amende aux Etats-Unis.

"Alstom estime que l'ensemble de ces ajustements positifs et négatifs, qui sont bien entendu sans corrélation entre eux, devrait se solder par un impact globalement négatif (...). J'ai en tête un ordre de grandeur de 1 à 2% du montant de la transaction (avec GE)", a-t-il précisé.

Alors qu'Alstom fait également l'objet d'une procédure britannique pour d'autres affaires de corruption présumée, son PDG a estimé que l'accord en cours de négociations aux Etats-Unis n'aurait "aucun effet mécanique sur d'éventuelles autres transactions avec qui que ce soit".

LES MINORITAIRES MONTENT AU FRONT

L'action Alstom a cédé 3,88% à 26,645 euros vendredi.

Le groupe a confirmé envisager de distribuer à ses actionnaires 3,5 à 4 milliards d'euros à l'issue de la transaction avec GE à travers une offre publique de rachat d'actions.

Le spécialiste des équipements électriques et ferroviaires compte en outre utiliser le montant à recevoir du groupe américain pour renforcer son bilan et réduire sa dette nette, qui s'établissait à 3,896 milliards d'euros au 30 septembre.

Les accords conclus entre GE et Alstom prévoient également que le français réinvestira 2,6 milliards d'euros dans des coentreprises formées avec l'américain dans le domaine du nucléaire, des réseaux et des énergies renouvelable.

Alstom doit aussi acquérir l'activité de signalisation ferroviaire de GE pour un montant de 600 millions d'euros environ.

Patrick Kron s'est par ailleurs vu accorder début novembre "une rémunération conditionnelle exceptionnelle" consistant en la contre-valeur de 150.000 actions de la société appréciée sur la base du cours de bourse de l'action au jour de la réalisation de la transaction avec GE "sans pouvoir excéder deux ans de rémunération (fixe et variable)".

Le versement de cette rémunération, conditionné à la réalisation effective de l'opération avec GE, doit selon Alstom s'apprécier "au vu de la qualité de la transaction élaborée" par le PDG, durement critiqué par certains petits actionnaires vendredi.

Invité de la radio France Info vendredi soir, le PDG a indiqué ne pas souhaiter renoncer à cette prime exceptionnelle, estimée à près de quatre millions d'euros au niveau de cours actuel.

"Le conseil d'administration a dit 'oui'. Il s'est d'ailleurs appuyé sur le haut conseil de gouvernance qui a également estimé que ceci était conforme aux bonnes pratiques (...) Je sais bien qu'il est assez difficile de traiter sereinement des questions de la rémuneration des patrons."

Patrick Kron a confirmé qu'il entendait rester à la tête d'Alstom jusqu'à la cession du pôle énergie et qu'il proposerait au conseil du groupe de le remplacer par Henri Poupart-Lafarge, l'actuel patron de la branche ferroviaire.

L'Association de défense des actionnaires minoritaires (Adam) a par ailleurs fait savoir mardi qu'elle contestait devant le tribunal de Commerce de Paris le prêt à l'Etat français de titres Alstom détenus par Bouygues, prévu dans le cadre de l'opération.

Selon l'association, ce prêt de titres confère à l'Etat un pouvoir de contrôle important qui va à l'encontre de l'intérêt des actionnaires d'Alstom.

Une audience est prévue au tribunal de Commerce de Paris le 22 janvier. (Avec Natalie Huet, édité par Matthias Blamont)

Valeurs citées dans l'article : BOUYGUES, Alstom, General Electric Company