A 15h38, l'action Casino gagnait 4,55% à 39,27 euros, enregistrant ainsi l'une des plus fortes progressions de l'indice SBF 120 (+1,22%) et de l'indice pan-européen Stoxx 600 (+1,43%).

Cette annonce a permis de réduire les pertes du titre, qui cède toutefois encore près de 21% depuis le début de l'année, contre un repli d'environ 7% de l'indice regroupant les valeurs de la distribution européennes sur la période.

Monoprix et Amazon ont annoncé lundi soir un partenariat commercial visant à proposer les produits alimentaires de Monoprix aux clients du service Amazon Prime Now à Paris et dans sa proche banlieue cette année, relançant ainsi les hostilités dans un marché de la distribution alimentaire extrêmement concurrentiel en France.

Cette annonce est intervenue le jour même du lancement par Leclerc de son service de distribution alimentaire à domicile à Paris tandis que Carrefour fourbit ses armes pour repartir à l'offensive dans le digital sous la houlette de son PDG Alexandre Bompard.

Une source proche du dossier a également indiqué à Reuters qu'Amazon.com et Casino discutaient soit d'un partenariat au Brésil, comme ils l'ont fait en France, soit d'une cession au géant américain de Via Varejo, la filiale locale d'électronique et d'électroménager du distributeur français.

"Dans un environnement très concurrentiel, les distributeurs français investissent fortement dans leurs activités internet pour augmenter leur chiffre d'affaires et se renforcer dans un canal de distribution en croissance. Casino est selon nous l'un des distributeurs les mieux positionnés grâce à Cdiscount, son partenariat avec Ocado et maintenant l'alliance avec Amazon", estime Vincent Gusdorf, vice-président chez Moody's.

Lors d'une conférence téléphonique, Régis Schultz, président de Monoprix et membre du comité exécutif de Casino, a qualifié de "rentable" l'accord noué avec Amazon, ajoutant qu'il n'était pas exclu qu'il puisse être étendu à d'autres régions en France.

Il a également dit qu'il ne parlait pas "du futur" lorsqu'il lui a été demandé si ce partenariat ouvrait la voie à une alliance de plus grande ampleur.

DÉJÀ PLEIN DE LOUPS DANS LA BERGERIE

Régis Schultz a noté que l'accord avec Amazon, qui prévoit la livraison des produits quelques heures après la commande, était complémentaire de celui, annoncé en novembre 2017, avec le spécialiste du commerce électronique britannique Ocado, où la livraison intervient le lendemain de la commande.

"Comme l'accord avec Ocado ne sera pas opérationnel avant 2019, Casino a besoin de protéger Monoprix de Leclerc, qui a lancé la livraison à domicile à Paris", soulignent les analystes de Kepler Cheuvreux.

Ceux de Bernstein notent que le partenariat entre Amazon et Monoprix présente des similitudes avec celui, noué en 2016, entre le groupe américain et le quatrième distributeur britannique Morrisons.

Ils ajoutent au passage que les produits Morrisons vendus sur Amazon Prime représentent moins de 0,1% du marché de la distribution britannique, ce qui les conduit à anticiper, dans un premier temps, un impact similaire en France.

Néanmoins, au vu des visées affichées par Amazon.com dans la distribution alimentaire - le groupe a acheté l'an dernier la chaîne de magasins bio Whole Food Markets pour 13,9 milliards de dollars (11,2 milliards d'euros) - les analystes de Bernstein estiment que Monoprix joue peut-être avec le feu.

"C'est un jeu de poker avec des mises élevées: Monoprix ne fournit-il pas à Amazon tous les éléments dont le groupe a besoin pour devenir une menace bien plus importante qu'il ne l'est déjà aujourd'hui ?"

Prié de dire si le groupe ne faisait pas effectivement rentrer le loup dans la bergerie, Régis Schultz a dit à Reuters : "Elle était déjà pleine de loups".

Les produits alimentaires Monoprix seront disponibles sur l'application et sur le site Amazon Prime Now via une boutique virtuelle spécifique, précisent les deux groupes dans un communiqué commun.

Régis Schultz a souligné que les tarifs des produits proposés dans la nouvelle boutique virtuelle seraient identiques à ceux pratiqués sur le site monoprix.fr, tout en ajoutant que l'offre serait plus restreinte.

"Ce partenariat commercial, qui vient encore enrichir la sélection du service Prime Now, permettra à nos clients Prime d’Amazon de bénéficier de délais de livraison extrêmement rapides sur les commandes de produits Monoprix", dit de son côté Frédéric Duval, le patron d'Amazon France.

L'accord avec Amazon marque aussi une nouvelle étape dans la stratégie de conquête de l'e-commerce menée par Monoprix, qui a annoncé en février être entré en négociations exclusives en vue d'acquérir Sarenza, site français de vente de chaussures.

(Avec la contribution de Pascale Denis et Cyril Altmeyer, édité par Jean-Michel Bélot)

par Dominique Vidalon et Benoit Van Overstraeten