"On est dans un environnement qui reste, c'est vrai, incertain; attendons, digérons, et on représentera la feuille de route 2017-2020 (...) probablement au premier semestre 2017", a dit lors d'une conférence de presse le directeur général Frédéric Oudéa, notant aussi la situation difficile du groupe en Russie.

"L’augmentation des exigences en capital et l’environnement économique et financier ne permettent pas de confirmer l’objectif de ROE de 10% dès fin 2016", avait expliqué plus tôt la banque dans le communiqué de ses résultats annuels 2015, où cet indicateur s'établit à 7,9%.

"La révision du ROE 2016 est considérée comme un profit warning", a estimé un analyste interrogé sur la chute du cours de Bourse du groupe, qui s'est dit néanmoins "confiant" dans sa capacité à générer, mais seulement à terme, 10% de rentabilité.

Frédéric Oudéa a récusé devant des analystes l'idée d'avoir donner un avertissement sur les résultats du premier trimestre, indiquant qu'il avait simplement respecté les consignes d'avertir le marché au plus tôt du manque de visibilité constaté sur cet indicateur.

Les craintes des actionnaires de SocGen se sont aussi exprimées sur un coût du risque plus élevé que prévu en raison d'une provision prise pour couvrir les litiges du groupe, alors que l'amende de près de neuf milliards de dollars payée en 2014 par BNP Paribas est encore dans les esprits.

"Il n'y a rien de nouveau sur les litiges existants", a dit Frédéric Oudéa, évoquant simplement la "prudence" de son établissement, qui a décidé de mettre 400 millions d'euros en réserve pour gonfler à 1,7 milliard d'euros l'enveloppe dédiée à d'éventuelles amendes.

"LE MARCHÉ PEUT SE TROMPER"

Après avoir perdu jusqu'à plus de 15% durant la séance, l'action SocGen a terminé à 27,465 euros, en retrait de 12,57%, ce qui constitue pour la valeur un repli d'une ampleur inégalée en une seule séance depuis la crise de 2011.

Société générale a publié ses résultats dans un contexte particulièrement difficile pour les banques, dont l'indice sectoriel européen a plongé de 6,26% sur la journée.

Les valeurs financières pâtissent des inquiétudes liées à la chute des prix du pétrole, au ralentissement économique des pays émergents et aux politiques monétaires des Etats-Unis, du Japon ou encore de la Banque centrale européenne.

Interrogé sur l'extrême volatilité des marchés financiers, Frédéric Oudéa a noté "une déconnexion avec la situation économique réelle".

La saison des résultats annuels a néanmoins apporté son lot de déceptions, comme la perte record essuyée par Deutsche Bank, le premier résultat négatif de Credit Suisse depuis 2008 ou les résultats décevants de la division gestion de fortune chez UBS.

Pour un deuxième analyste interrogé par Reuters, les fondamentaux de SocGen ne justifient pas sa déroute boursière, plutôt à mettre au compte d'un marché quelque peu irrationnel.

"Le marché peut se tromper", a-t-il fait valoir, arguant que le rebond de près de 9% du titre mercredi échappait également à l'analyse fondamentale.

SOCGEN MET L'ACCENT SUR LA BANQUE DE DÉTAIL

Le résultat net de Société générale au quatrième trimestre 2015 s'établit à 656 millions d'euros et a notamment bénéficié de la plus-value de 147 millions d'euros réalisée lors de la cession de sa participation dans le gestionnaire d'actifs Amundi.

Sur l'année, le résultat net part du groupe s'établit à 4,001 milliards, en hausse de près de 50% par rapport à 2014.

Notant que les "conditions de marché instables observées au cours du deuxième semestre 2015 ont freiné la croissance des revenus de la Banque de grande clientèle et solutions investisseurs (GBIS)", SocGen dit miser en 2016 sur la banque de détail en France, dont les résultats ont tiré ceux du groupe.

"L’accent sera en particulier mis sur l’accélération de la transformation digitale des réseaux de banque de détail en France et le développement de Boursorama", fait valoir la banque, qui se félicite d'un nombre "record" d'ouvertures de comptes et d'une reprise des encours de crédit, notamment grâce à la renégociation de prêts immobiliers.

Société générale, qui souffre comme ses concurrentes d'un environnement de taux d'intérêt bas en Europe, a annoncé cet automne un plan de digitalisation qui doit lui permettre de recruter en France 100.000 particuliers nets par an d'ici 2020, période qui sera marquée par la fermeture de 20% de ses agences et l'introduction de frais de tenue de compte.

Avec un ratio Core equity tier 1 de 10,9% à la fin de l'année 2015, soit 20 points de base de plus qu'attendu par les analystes interrogés par Reuters, la banque au logo rouge et noir dépasse l'exigence minimum de 9,75% fixée par la Banque centrale européenne pour ce début d'année.

Le dividende proposé passe de 1,20 euro à 2 euros, un paiement en ligne avec les attentes, selon les données de Thomson Reuters.

(Avec Alexandre Bosksenbaum-Granier et Joseph Sotinel, édité par Dominique Rodriguez)

par Julien Ponthus et Maya Nikolaeva

Valeurs citées dans l'article : BNP PARIBAS, SOCIETE GENERALE, AMUNDI