ArcelorMittal (-5,53% à 3,484 euros) a signé vendredi la plus forte baisse du CAC 40 après avoir annoncé une augmentation de capital de 3 milliards de dollars avec droit préférentiel de souscription destinée à accélérer son désendettement. Cette opération doit être réalisée au premier semestre 2016 et la famille Mittal a annoncé qu'elle y souscrirait à hauteur de sa participation, soit 1,1 milliard. Société Générale estime qu'elle aboutirait à une dilution d'au moins 30% du bénéfice par action du groupe cette année.

Ajoutée à la cession de la participation de 35% que le groupe détient au capital de l'équipementier automobile espagnol Gestamp, dont ArcelorMittal espère retirer environ 1 milliard, le sidérurgiste vise une réduction de sa dette de 4 milliards de dollars à moins de 12 milliards.

Mis en difficulté par la baisse du prix des métaux de base, ArcelorMittal est donc en quête de liquidités pour renforcer son bilan. Le groupe cherche aussi à rassurer des investisseurs prompts à sanctionner des entreprises lourdement endettées alors que les conditions de financement pourraient se durcir avec le resserrement monétaire attendu aux Etats-Unis.

Dans la même optique, ArcelorMittal a annoncé pour 2016 une nouvelle réduction de ses besoins en trésorerie supérieure à 1 milliard de dollars par rapport à 2015. Le groupe va notamment diminuer de 11% ses dépenses d'investissement cette année (-27% en 2015) à 2,4 milliards de dollars et ne versera pas de dividende au titre de l'exercice 2015.

Ces mesures permettront au groupe de dégager un free cash flow positif à condition d'atteindre un Ebitda de 4,5 milliards de dollars. Pour l'heure, ArcelorMittal prévoit qu'il dépassera ce niveau cette année en débit d'une baisse attendue de l'Ebitda au premier trimestre 2016. Berenberg anticipe quant à lui plus de 5 milliards de dollars sur l'année et le consensus 5,4 milliards.

L'amélioration de l'Ebitda et le renforcement de la trésorerie sont également les deux objectifs du plan "Action 2020" dévoilé ce matin. Il doit en effet aboutir à une amélioration de l'Ebitda d'environ 3 milliards de dollars. Le flux de trésorerie disponible est, lui, attendu à plus de 2 milliards de dollars par an.

Ces annonces ont été faites après la publication de résultats annuels en ligne avec les attentes. En 2015, ArcelorMittal a vu ses comptes passer dans le rouge avec une perte nette, hors éléments exceptionnels, de 0,3 milliard de dollars. En 2014, il avait enregistré un bénéfice net de 0,4 milliard.

En données publiées, la dégradation est encore plus impressionnante : la perte nette s'élève à -7,9 milliards de dollars, à comparer avec -1,08 milliard en 2014, en raison de charges liées à la baisse des cours des matières premières. Ainsi, le groupe a enregistré 4,8 milliards de dollars de dépréciations (principalement dues à des dépréciations d'actifs miniers) et 1,4 milliard de charges exceptionnelles (principalement liées à la dépréciation des stocks faisant suite à la baisse rapide des prix internationaux de l'acier).

L'Ebitda du groupe est passé de son côté de 7,23 à 5,23 milliards de dollars entre 2014 et 2015 et son chiffre d'affaires a reculé à 63,57 milliards de dollars en 2015. Il était de 79,28 milliards en 2014.


AOF - EN SAVOIR PLUS
Les points forts de la valeur
- Numéro un mondial de la sidérurgie avec 6 à 7 % de la production mondiale d’acier, intervenant en Europe (45 % des ventes), Amériques (39 %) et Afrique-Asie (16 %);
- Intégration verticale des activités, de l’extraction à la distribution, ce qui limite la dépendance aux cours des matières premières : aciers plats (32 % des ventes), aciers longs (26 %), produits tubulaires (12 %), négoce (19 %) et mines (6 %) ;
- Fortes positions dans les pays émergents, notamment le Brésil et l’Afrique du Sud ;
- Statut boursier de pure player depuis la scission de l’activité Acier Inoxydable, cotée en Bourse depuis 2011 sous le nom d’Aperam ;
- Poursuite de la réduction de la dette en 2014 ramenée à ses niveaux de la fusion et liquidités importantes.

Les points faibles de la valeur
- Stratégie industrielle fondée sur l’intégration verticale –des mines aux aciéries- peu créatrice de valeur ;
- Manque de rentabilité en Europe, 60 % du bénéfice d’exploitation provenant des Etats-Unis et du Brésil, et fort ralentissement de la croissance chinoise ;
- Rentabilité des mines affectée par la baisse du prix du minerai de fer ;
- Forte sensibilité à l‘évolution des prix de l’acier, revenus à leur niveau de 2009, 80 % des ventes s’effectuant au prix « spot » (prix de marché) ;
- Avertissement sur résultat au premier semestre 2015 du fait des difficultés des mines et de l’affaiblissement du marché aux Etats-Unis ;
- Risque de nouvelles délocalisations d’Europe, en raison du durcissement des réglementations sur le CO2 .
- Stratégie peu convaincante pour le marché, où la valeur cote près de ses plus bas de 2003.

Comment suivre la valeur
- Forte sensibilité aux prix du minerai de fer et à la dynamique de croissance des pays émergents, notamment la Chine et, aussi, aux politiques de protection de l’acier en Europe ;
- Comptes publiés en dollars ;
- Résultat de l’enquête antidumping de la Commission européenne sur les aciers laminés à froid russes et chinois ;
- Evolution de la division mines, où est lancé un plan de réduction des coûts ;
- Réalisation de l'objectif 2015 d'un excédent brut d'exploitation entre 6 et 7 Md$ et d’un free cash-flow positif ;
- Aucun attrait spéculatif - entreprise détenue à 39,35 % par la famille Mittal- et faible protection des actionnaires minoritaires pour la seule société du CAC 40 de droit luxembourgeois.

Produits de base - Métaux
Les acteurs sont touchés par la baisse générale des cours des matières premières. En 2014 la baisse des investissements dans le secteur minier a significativement touché l'exploration. Le budget mondial consacré à l'exploration des métaux non ferreux a chuté de 25%, à 11,4 milliards de dollars. Après avoir dégringolé en 2014 (-49% en valeur,-23% en nombre), les transactions dans les secteurs mines et métaux ont poursuivi leur chute au premier trimestre (-18% en valeur). Contraints par la baisse des cours, les grands groupes prennent plutôt des mesures de réorganisation. Ainsi Rio Tinto va concentrer ses actifs en quatre spécialités : fer, aluminium, cuivre et charbon, diamants et minéraux. De même, le brésilien Vale pourrait séparer sa branche métaux industriels du reste du groupe. BHP Billiton a annoncé une scission de ses activités les moins stratégiques. La nouvelle société réunira 22 actifs du leader mondial de la production de matières premières. La nouvelle entité sera valorisée autour de 10 milliards de dollars. Le géant minier se focalisera désormais sur l'extraction de minerai de fer, de charbon, de cuivre, pétrole et de la potasse.