PARIS (awp/afp) - Bernard Cazeneuve entame mardi une visite de trois jours en Chine, à l'heure où Pékin amorce un rapprochement avec l'Europe après l'élection du président américain Donald Trump.

Le chef du gouvernement, après avoir choisi les troupes françaises en Afrique pour son premier déplacement international, puis Bruxelles, Berlin et Londres sur le volet européen, se rend chez le géant asiatique pour sa première grande visite diplomatique hors du Vieux Continent.

S'il honore là une invitation faite à son prédécesseur Manuel Valls avant son départ de Matignon, Bernard Cazeneuve arrive à Pékin dans une atmosphère diplomatique bousculée par l'arrivée à la Maison-Blanche d'un M. Trump aux positions de campagne hostiles aux Chinois.

Le virage diplomatique vers l'Asie défendu par Barack Obama avait placé Pékin au centre du jeu, mais l'attitude du nouveau président a déstabilisé le géant asiatique.

Les passes d'armes sur Taïwan et le fait que Donald Trump ait attendu trois semaines pour joindre son homologue chinois Xi Jinping, après une bonne douzaine de dirigeants mondiaux, ont froissé la seconde puissance économique mondiale.

Par ailleurs, "si la Chine pourrait être en mesure de faire face à une guerre commerciale avec les Etats-Unis, elle sait qu'un tel conflit commercial associé de surcroît à de sévères frictions avec l'Europe serait catastrophique pour son économie", souligne un diplomate européen de haut rang.

L'UE et les Etats-Unis constituent les deux principaux partenaires commerciaux de la Chine, première puissance marchande du globe.

Dans ces conditions, "Pékin a compris qu'il était dans son intérêt d'améliorer ses relations avec les Européens", ajoute le diplomate. Et ce même si l'Europe est elle aussi bousculée par le Brexit et la poussée des populismes, en premier lieu de Marine Le Pen en France.

"On voit que la Chine s'efforce de répondre davantage aux inquiétudes de l'UE", notamment sur ses barrières protectionnistes et sur les restrictions imposées par le régime aux firmes étrangères, indique encore cette source diplomatique.

- Dossier nucléaire -

A Pékin, Bernard Cazeneuve rencontrera mardi le numéro deux chinois, le Premier ministre Li Keqiang, puis mercredi le président Xi Jinping et le président de l'Assemblée Zhang Dejiang.

Outre un passage obligé à la Cité interdite, son premier voyage en Chine prévoit un discours mardi sur l'attractivité de la France qui fournira l'occasion de lancer à nouveau un appel aux investissements chinois dans l'Hexagone.

Comme à chaque visite française de haut niveau, le dossier nucléaire aura sa place dans les échanges.

Et ce même si les négociations sur l'entrée du chinois CGN au capital d'Areva NewCo ont échoué: la France s'est opposée à la demande chinoise de disposer d'un siège au conseil d'administration dans la nouvelle entité.

Les deux réacteurs EPR d'Areva construits par EDF et son allié CGN à Taishan devraient être mis en service à la fin de l'année, avant ceux construits en Finlande et en France, frappés par de nombreux déboires.

Mais les concurrents d'Areva, notamment l'américano-japonais Westinghouse, sont aussi à la peine, et le groupe français espère vendre deux réacteurs supplémentaires pour la centrale de Taishan.

Le déplacement de M. Cazeneuve se terminera jeudi à Wuhan, où s'était déjà rendu Jean-Marc Ayrault en 2013. Ce carrefour de plus de 10 millions d'habitants au centre de la Chine, surnommé le "Detroit" chinois, abrite déjà une usine Renault, inaugurée l'an dernier, et trois usines PSA.

Il doit notamment y visiter le premier laboratoire P4 de haute sécurité biologique en Chine, réalisé avec l'appui français de l'Institut Pasteur. Et assister à l'arrivée du premier train de marchandises reliant Lyon à Wuhan, après un premier voyage sur la "route de la Soie" dans l'autre sens.

Le Premier ministre essaiera aussi de relancer le projet d'un quartier durable conçu avec l'appui de la France, alors que les Allemands et les Singapouriens ont déjà concrétisé un quartier "vert" chacun dans le pays.

Trois ministres doivent l'accompagner: Marisol Touraine (Santé), Jean-Marie Le Guen (Francophonie) et Mathias Fekl (Commerce extérieur).

Le patron d'EDF Jean-Bernard Lévy et l'ex-Premier ministre Jean-Pierre Raffarin sont aussi annoncés.

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