Genève (awp) - Le vote favorable au Brexit pourrait avoir à court terme un impact négatif de 0,2% sur la croissance suisse en cas de ralentissement conjoncturel fort au Royaume-Uni, selon Valérie Lemaigre, économiste en chef de la Banque cantonale de Genève (BCGE). L'établissement maintient ses prévisions de PIB, attendu à +1,2% en 2016 et +1,4% en 2017. Trois scénarios se dégagent suite au Brexit. La BCGE retient celui du choc de confiance temporaire sur la conjoncture helvétique.

L'économiste en chef différencie bien les impacts immédiats et ceux qui pourraient intervenir à moyen terme. "Ces effets directs, je les évalue à pas grand-chose, c'est-à-dire -0,2% sur la croissance en Suisse", a-t-elle expliqué lors d'une conférence de presse à Genève. La probabilité d'un choc de confiance demeure réel, puisque les principaux acteurs économiques britanniques - les moins de 50 ans et les entrepreneurs - ont refusé en majorité de sortir de l'UE, selon Mme Lemaigre.

Les effets indirects concernent les relations financières entre les deux pays. "Les investissements suisses vers le Royaume-Uni, les participations entres entreprises (.) sont relativement élevés", affirme-t-elle. Ils représenteraient 7-8% d'un total d'investissement des sociétés helvétiques de 1200 mrd CHF. L'emploi constitue une autre variable importante: UBS et Credit Suisse comptent près de 13'000 collaborateurs à Londres, a rappelé Valérie Lemaigre, à titre d'exemple.

Parmi les trois développements envisagés suite au Brexit, la BCGE retient le médian en gravité, avec une volatilité des devises et un intervention régulière des banques centrales sur le marché des changes. L'économiste est moins convaincue par le scénario impliquant une stabilité des marchés financiers et du système bancaire ou, au contraire, par celui d'une crise d'identité européenne et d'un important choc de devises.

La paire EUR/CHF va atteindre 1,08 à dans une année et 1,10 à 18 mois, estime la banque. Le franc devrait s'échanger contre 0,98 USD dans un horizon de douze mois et 1,00 USD dans une année et demie.

En termes d'emploi, le taux de chômage est attendu à 3,4% cette année et à 3,6% pour la suivante. L'ensemble des prévisions n'ont pas été modifiées suite au vote favorable du Royaume-Uni à la sortie de l'Union européenne.

GENÈVE TIRE LA LANGUE

Mme Lemaigre reste prudente quant aux répercussions de ce scrutin sur l'économie suisse. "C'est un choc politique qui ne doit pas être assimilé à une crise financière ou de la dette souveraine." Selon l'économiste, il faudra attendre un à deux mois avant d'ajuster éventuellement les prévisions. La stabilisation du dollar constitue à ce titre le facteur prioritaire pour éviter un choc des changes, qui ne manquerait pas d'affecter la Suisse, affirme-t-elle.

Le canton de Genève devrait ressentir davantage les effets du Brexit que l'ensemble de l'économie suisse. Les exportations de Genève vers le Royaume-Uni sont supérieures en proportion à celles de la Suisse, à 8% contre 5%. Les importations sont en revanche plus élevées depuis ce pays vers la Suisse dans son ensemble, à 13% contre 9% vers Genève. Toutefois, 77% d'entre elles sont liées à l'or, peu impacté.

L'économie genevoise traverse une période de récession, les deux derniers trimestres de l'année dernière et le premier partiel de l'exercice en cours ayant bouclé sur une croissance négative. À l'effet de base induit par cette situation conjoncturelle vient s'ajouter l'impact indirect du Brexit.

Le vote britannique risque de freiner la normalisation de l'environnement des taux et donc peser sur l'économie du canton, selon la spécialiste de la banque. "Cela nous amène à être moins favorable quant au surplus de croissance que Genève aurait dégagé (sans le Brexit)".

La progression du PIB genevois est attendue par la BCGE à 0,9% (contre 1,4% en début d'année) pour 2016 et 1,1% pour 2017. Pour le taux de chômage, les prévisions respectives s'élèvent à 5,4% et 5,6%.

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