A la Bourse de Londres, l'action du géant minier australo-britannique BHP Billiton reste sous pression après le grave accident survenu à la mine brésilienne de Samarco : à 840 pence (- 1,6%), elle a perdu près de 20% de sa valeur depuis la survenance de l'accident, le 5 novembre dernier, et retombe ainsi sur des niveaux perdus de vue voilà dix ans environ. Hier, le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'homme a affirmé que l'énorme coulée de boue provenant de la mine de Samarco contenait des métaux lourds et des produits chimiques toxiques. Ce que BHP Billiton dément, évoquant “des argiles et des limons” sans conséquence sur la composition de l'eau. La balle est maintenant dans le camp des autorités brésiliennes.

Rappel des faits : la scène du drame, qui remonte au 5 novembre dernier, se situe dans l'Etat brésilien du Minas Gerais, au sein de la mine de fer exploitéen par la coentreprise Samarco Mineracao, détenue à parité (50/50) par BHP Billiton et le géant brésilien du minerai de fer, Vale.

A cette date, un barrage retenant des résidus liquides résultant du traitement du minerai de fer (une sorte de gangue boueuse) s'est rompu, entraînant le déversement de 50 millions de tonnes de boues qui a dévasté notamment le village de Bento Rodrigues avant de s'engouffrer dans la rivière Doce. Selon l'agence Blooomberg, qui évoque le chiffre de 20 morts et disparus, il s'agit de la pire catastrophe minière jamais survenue au Brésil.

La mine de Samarco produit 30,5 millions de tonnes de minerai de fer par an et peut traiter 32 millions de tonnes de concentrés. A titre de l'exercice 2015, la part revenant à BHP Billiton était de 14,5 millions de tonnes, soit environ 3% du résultat d'exploitation récurrent du groupe. Toutes les opérations sont maintenant stoppées. Les prévisions 2016 de production de fer du groupe ont donc été placées sous revue.

La joint-venture Samarco Mineracao a par ailleurs annoncé, le 17 novembre, la constitution d'une provision de 260 millions de dollars.

Hier, le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'homme a frontalement mis en cause la gestion de la crise par BHP Billiton, Vale et le gouvernement brésilien, en estimant que ces derniers n'avaient pas pris les mesures nécessaires pour protéger l'environnement et les communautés 'du risque d'exposition à des produits chimiques toxiques contenus dans les boues qui se sont déversées le 5 novembre dernier'.

Pour mémoire, une fois extraits du sol, les minerais métalliques font l'objet de traitements comprenant plusieurs phases de concentration dont le concassage, le lavage à l'eau, mais aussi - selon le type de minerai considéré - l'éventuel recours à des produits chimiques pour isoler le métal au sein du minerai . Sans oublier les composés chimiques lourds que le minerai peut contenir en lui-même. Après ces opérations, la partie du minerai dépourvue d'intérêt économique, appelée la gangue, est stockée à part. Par exemple dans un bassin de retenue lorsqu'elle est liquide.

'Il n'est pas acceptable qu'il ait fallu trois semaines pour que les informations sur les risques liés aux produits chimiques fassent surface', tempêtaient hier les rapporteurs des Nations unies John Knox et Baskut Tuncak. Selon le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, de nouveaux éléments indiquent que les boues 'contenaient d'importantes concentrations de métaux lourds toxiques et d'autres composés chimiques également nocifs qui se sont déversés dans la rivière Doce.'

L'écoulement correspond au contenu de 20.000 piscines olympiques et a maintenant contaminé le sol, la Doce et le système hydraulique sur plus de 850 km, indique M. Knox. La rivière Doce 'est considérée par les scientifiques comme morte', indique le Haut commissariat de l'ONU. La coulée est désormais entrée dans le parc naturel marin d'Abrolhos avant de frapper la plage de Regencia.

BHP Billiton réagit ce matin en contredisant, presque pied à pied, les assertions de l'organisme de l'ONU. Selon le groupe, les boues qui se sont répandues résultaient du lavage du minerai et du traitement de la terre qu'il contenait, et étaient donc formées d'argiles et de limons. 'Selon les données disponibles, cette gangue est chimiquement stable, n'affectera pas la composition de l'eau', et ne se comportera pas autrement qu'un sol “normal”.

BHP Billiton indique l'Agence nationale de l'eau et le Service géologique du Brésil continuent de prélever des échantillons d'eau dans la rivière Doce. Des résultats d'analyses préliminaires datant du 14 novembre indiquent que 'les concentrations de métaux constatées (...) ne diffèrent pas sensiblement de ceux d'analystes effectuées en 2010 par le Service géologique du Brésil'.

La coentreprise Samarco a aussi publié les résultats d'analyses effectuées par le laboratoire indépendant SGS Geosol qui, selon BHP Billiton, 'confirment que les boues provenant du barrage de Fundão ne sont pas dangereuses pour l'homme'.

La balle est maintenant dans le camp des autorités brésiliennes, fédérées et fédérales, qui ont promis de sévir si des fautes étaient constatées. Rappelons par ailleurs que l'Etat brésilien est présent, directement et indirectement, au capital de Vale, et qu'il possède aussi des “golden shares” lui donnant un droit de veto sur certaines grandes décisions.

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