Confirmant une information rapportée par Reuters mercredi, le distributeur a annoncé jeudi avoir cédé 10% du capital de sa filiale à Peninsula, société d'investissement du milliardaire brésilien, afin de renforcer son ancrage local et doper sa croissance.

Pressé de questions sur une introduction en Bourse annoncée pour l'année 2015, Georges Plassat, PDG de Carrefour, a déclaré que les conditions de marché n'étaient pas aujourd'hui réunies pour une telle opération.

"Nous avons le temps pour décider tranquillement et nous le ferons seulement lorsque ce sera pertinent", a-t-il dit lors d'une conférence téléphonique.

La cession s'est faite pour un montant de 1,8 milliard de reais (525 millions d'euros), valorisant la filiale à 20,4 milliards de reais (environ 6,0 milliards d'euros), un niveau nettement inférieur aux estimations des analystes qui tablaient sur un montant pouvant aller jusqu'à 9,0 milliards d'euros.

"La valorisation est clairement décevante", soulignent ceux de Bryan Garnier, indiquant cependant qu'une alliance avec Abilio Diniz est "ce que Carrefour pouvait souhaiter de mieux compte tenu de sa connaissance du marché et de ses anciennes fonctions à la tête du principal concurrent de Carrefour au Brésil" (GPA, filiale de Casino).

Ce partenariat est jugé pertinent par les investisseurs, même si ses implications sur l'activité semblent limitées, aux dires des analystes de la Société générale.

"Carrefour Brésil est déjà bien géré, détient de solides actifs et affiche une stratégie claire", notent-ils, ajoutant qu'une mise en Bourse constituerait une étape plus importante pour accélérer le développement et révéler la valeur réelle de cet actif.

LE GRAND RETOUR D'ABILIO DINIZ

Le Brésil est le deuxième marché de Carrefour après la France. Le groupe, qui fêtera ses quarante ans dans le pays en 2015, y a réalisé un chiffre d'affaires de 34 milliards de reais en 2013 (10 milliards d'euros), représentant environ 12% de ses ventes totales.

Carrefour y est présent à travers tous les formats, allant du semi-gros (Atacadao) à la proximité (Express, Supeco) en passant par les hypermarchés (Carrefour) et les supermarchés (Carrefour Bairro).

Georges Plassat est resté avare de précisions sur l'utilisation des recettes de cette cession, évoquant des investissements substantiels au Brésil dans la rénovation des supermarchés, le développement des formats de proximité et dans les prix.

Cet accord signe le grand retour d'Abilio Diniz, ancien allié de Casino, dans la distribution. Le milliardaire aujourd'hui âgé de 77 ans a été débarqué l'an dernier de la présidence de GPA, numéro un brésilien de la distribution, filiale de Casino.

Il avait été contraint de céder la quasi-totalité de ses parts dans GPA après avoir tenté un rapprochement avec Carrefour en 2011, alors même qu'il était associé à Casino.

Abilio Diniz et le directeur général de Peninsula disposeront de deux sièges au conseil de la filiale, tandis que des options permettront à Peninsula de monter à 16%, s'il le souhaite, dans un délai de cinq ans.

Gorges Plassat a également indiqué qu'Abilio Diniz avait acquis, ces dernières années, des titres Carrefour et qu'il détenait à ce jour 2,4% du capital du groupe.

"S'il veut monter, il est le bienvenu. Il est très riche", a-t-il lancé.

A la Bourse de Paris, le titre Carrefour a pris 4%, dans un marché en progression de 3,35%.

Georges Plassat, avait largement fait savoir que le groupe envisageait d'ouvrir son capital ou de mettre en Bourse une partie de ses actifs brésiliens en 2015. Il assurait en mars dernier qu'il ne s'agissait pas tant de trouver des moyens de financement que d'un besoin d'ancrage dans le pays aux côtés d'un partenaire local.

(Avec Gilles Guillaume et Guillermo Parra-Bernal, édité par Jean-Michel Belot)