Bichkek (awp/afp) - Plusieurs groupes pétroliers menés par l'américain Chevron ont annoncé mardi des travaux de 36,8 milliards de dollars pour doper la production de l'un des principaux gisements du Kazakhstan, Tengiz, lançant le plus gros investissement du secteur depuis l'effondrement des prix sur les marchés mondiaux.

Alors que la débâcle du marché pétrolier a poussé les compagnies du secteur à renoncer à des centaines de milliards de dollars de nouveaux projets, le consortium Tengizchevroil (TCO), dont Chevron est le premier actionnaire, compte augmenter la production de brut sur le site d'environ 260.000 barils par jour.

Cela la portera à 850.000 barils par jour avec des pics à plus de 900.000 barils par jour, a précisé TCO dans un communiqué. Cette expansion doit donner ses premiers litres de brut en 2022.

Ce niveau représente plus de la moitié de la production moyenne ces dernières années de cette ex-république soviétique d'Asie centrale. Les autorités kazakhes ont salué "un événement historique" alors que la chute des prix de l'or noir a lourdement pénalisé son économie.

Le gisement de Tengiz, le plus important du Kazakhstan avec celui de Karatchaganak, est exploité par TCO, co-entreprise détenue à 50% par Chevron, à 25% par l'américain ExxonMobil, à 20% par la compagnie nationale kazakhe KazMunayGas et à 5% par LukArco, filiale du russe Loukoïl.

Le coût gigantesque de son expansion se découpe en 27,1 milliards pour les infrastructures, 3,5 milliards pour les puits et 6,2 milliards pour les imprévus et la montée en puissance.

"C'est de loin le plus gros projet confirmé par le secteur depuis que les prix sont partis à la baisse en 2014", ont souligné les analystes de la banque Jefferies, évaluant le coût pour Chevron seul à 3 milliards de dollars par an au pic du chantier.

Les cours de l'or noir ont perdu environ 70% de leur valeur entre l'été 2014 et janvier 2016, quand la chute a tourné au cauchemar pour les industriels avec un baril sous les 30 dollars. Plusieurs centaines de milliards de dollars de nouveaux investissements ont été depuis annulés, faisant craindre à certains analystes un déficit d'offre dans les années à venir.

Si de nombreux experts pensent que le temps du pétrole cher ne reviendra pas avant longtemps, le marché a repris des couleurs ces derniers mois, le baril revenant autour de 50 dollars.

'MOMENT OPPORTUN'

Le projet d'expansion, après plusieurs phases de préparation, "arrive au moment opportun puisqu'il va bénéficier de coûts réduits dans les biens et services de l'industrie pétrolière", a souligné Jay Johnson, responsable de la production amont chez Chevron, cité dans un communiqué.

TCO a précisé que le développement du gisement serait permis par le recours à des technologies d'injection de gaz corrosifs et que les travaux n'affecteraient pas la production actuelle.

Le ministre kazakh de l'Energie, Kanat Bozoumbaïev, a salué "un événement historique non seulement pour le secteur du pétrole et du gaz mais pour le pays tout entier".

"Il s'agit de l'un des plus importants projets d'investissement au Kazakhstan sur les dix dernières années", a-t-il ajouté dans un communiqué diffusé par le ministère. Il a précisé que les travaux permettraient la création de "plus de 20.000 emplois" et assureraient "des milliards de dollars de profits en plus pour notre pays".

Riche en hydrocarbures, le Kazakhstan traverse une crise monétaire, provoquée par la difficile situation économique de son grand voisin la Russie et la chute des cours du pétrole.

La forte inflation qui en découle provoque le mécontentement de la population du pays souvent considéré par les experts comme le seul stable de la région d'Asie centrale, malgré une corruption endémique.

Pour développer sa production, le pays compte sur le gisement de Kachagan, considéré comme l'une des plus importantes découvertes d'hydrocarbures de ces cinquante dernières années. Mais ce projet détenu par Total, Eni, ExxonMobil, Shell et KazMunaigas (chacun à hauteur de 16,81%), ainsi que par le japonais Inpex (7,56%) et le chinois CNPC (8,33%), a dû être mis à l'arrêt quelques semaines après sa mise en service à cause des fuites à répétitions.

afp/jh