Dans une lettre aux dirigeants de la Deutsche Bank, un responsable de la Fed de New York décrit les informations financières produites par certaines filiales américaines de la banque allemande comme "de faible qualité, inexactes, et non fiables", a dit cette source qui a eu connaissance de la missive.

"L'ampleur et la portée des erreurs laissent penser que le mode de collecte des informations réglementaires aux Etats-Unis de l'entreprise nécessite une vaste action corrective" est-il écrit dans la lettre révélée mardi par le Wall Street Journal.

L'action Deutsche Bank a cédé 1,8% dans les premiers échanges à la Bourse de Francfort en réaction à ces informations, accusant la plus forte baisse du Dax 30 et de l'indice des valeurs bancaires européennes, avant d'effacer une partie de ses pertes.

"Cela pourrait préluder à de nouvelles difficultés aux Etats-Unis, ce qui rend les investisseurs nerveux", a déclaré Dirk Becker, analyste chez Kepler Cheuvreux. "Il y a beaucoup de dénigrement des banques étrangères dans tout cela, les Etats-Unis cherchant à leur extorquer des amendes."

La Deutsche Bank a dit qu'elle investissait un milliard d'euros pour améliorer ses systèmes internes, y compris la qualité de ses données, près de 1.300 personnes travaillant sur ces améliorations.

"Nous avons travaillé diligemment pour renforcer encore nos systèmes et nos contrôles et nous sommes déterminés à être les premiers de la classe", a déclaré une porte-parole de la banque.

PROBLÈMES PLUS LARGES

La plus grande banque allemande est dans la ligne de mire des régulateurs américains depuis un certain temps sur des thèmes variés allant d'enquêtes résultant de la crise financière à des critiques sur le niveau de ses fonds propres jugés insuffisants pour faire face à d'éventuelles pertes.

Une commission du Sénat américain a accusé cette semaine Deutsche Bank ainsi que sa concurrente britannique Barclays d'avoir aidé des fonds spéculatifs à échapper à l'impôt. Deutsche Bank fait aussi l'objet d'une enquête des autorités américaines sur des violations présumées d'embargos imposés par les Etats-Unis sur les transactions avec certains pays.

Pour faire face à la montée des coûts juridiques et aux conséquences possibles des tests de résistance auxquelles sont soumises les banques européennes cette année, la Deutsche Bank a levé 8,5 milliards de fonds propres additionnels le mois dernier.

La solidité du bilan de la banque s'est retrouvée sur la sellette après les déclarations du vice président de la FDIC, l'organisme d'assurance des dépôts aux Etats-Unis, il y a un an dans un entretien à Reuters.

Thomas Hoenig avait alors jugé que l'établissement était "horriblement sous-capitalisé".

La Deutsche Bank, comme d'autres banques étrangères présentes aux Etats-Unis, fera l'objet d'une surveillance renforcée de la part de la Réserve fédérale américaine à partir de 2016 et devra se conformer à des règles plus strictes en matière de fonds propres et liquidités pour faire face à une éventuelle nouvelle crise financière.

Les banques étrangères seront aussi soumises aux tests de résistance aux chocs économiques conduits par la Fed.

Dans la lettre datée du 11 décembre 2013, la Fed de New York accuse Deutsche Bank de n'avoir fait "aucun progrès" pour remédier aux problèmes identifiés et enjoint à ses dirigeants de prendre les mesures nécessaires pour les régler.

Elle précise par ailleurs que certaines données financières transmises aux autorités de régulation devront être corrigées.

Ni la Fed de New York, ni la Banque centrale européenne ni la BaFin, l'organe de supersvision des banques allemandes, n'ont souhaité faire de commentaires.

(Kathrin Jones, Arno Schütze et Avik Das,; Danielle Rouquié et Marc Joanny pour le service français, édité par Véronique Tison)

Valeurs citées dans l'article : Deutsche Bank AG, Barclays PLC