Francfort (awp/afp) - Le géant bancaire allemand Deutsche Bank a dévoilé jeudi des résultats trimestriels nettement meilleurs que prévu, une bonne surprise pour le groupe en pleine restructuration, qui espère voir le bout du tunnel de ses multiples affaires et litiges.

Le groupe de Francfort (ouest) a vu son bénéfice net du premier trimestre divisé par plus de deux en un an, à 214 millions d'euros (contre 544 millions). Le chiffre d'affaires s'affiche en baisse de 22%, à 8,1 milliards d'euros, tiré vers le bas par toutes les divisions.

"Le premier trimestre a été l'un des plus difficiles" pour la banque, a reconnu Marcus Schenck, son directeur financier, lors d'une conférence téléphonique.

Mais Deutsche Bank a fait nettement mieux que ne l'attendaient les analystes. La plupart misaient sur une nouvelle perte sur cette période, après celle de plus de 7 milliards d'euros enregistrée en 2015.

Signal positif, les provisions pour risques juridiques semblent se stabiliser: 187 millions d'euros s'y sont ajoutés entre janvier et mars, contre plus d'un milliard à chaque trimestre en 2015.

La "Deutsche", comme l'appellent les investisseurs, est engluée dans quelque 6.000 litiges judiciaires qui "restent un défi majeur", a reconnu M. Schenck. Ces affaires, qui vont de soupçons de manipulations de marchés à de possibles opérations de blanchiment d'argent en Russie, ont contraint la banque à passer quelque 13 milliards d'euros de provisions depuis 2012.

Mais la banque a promis de solder "d'importantes procédures" dès cette année.

A la Bourse de Francfort, les investisseurs propulsaient l'action Deutsche Bank en première place du Dax, avec une hausse de 2,49% à 17,11 euros vers 8H45 GMT, seule valeur dans le vert. Mais le cours a dégringolé de plus de 23% depuis le début de l'année.

Les attentes pour ce trimestre "étaient très basses", explique Philipp Hässler, analyste d'Equinet, en raison du coup de mou de la banque d'investissement les mois précédents. Elle a mieux tenu le choc au premier trimestre.

Le patron John Cryan n'a pourtant guère tenté d'enjoliver le tableau : "2016 constituera le pic de nos efforts de restructuration", a-t-il répété jeudi. La remise sur pied coûtera encore un milliard d'euros cette année.

ANNÉE "TRÈS DIFFICILE"

"Pendant trop longtemps, une restructuration critique et nécessaire a été reportée et nous ne voulons pas répéter cela", a martelé M. Schenck.

Le plan de restructuration engagé l'an dernier, qui passe par la fermeture de 200 agences en Allemagne, la cession du réseau de détail Postbank et le retrait d'un certain nombre de pays, a d'ailleurs laissé sa marque sur le premier trimestre.

Et le climat d'incertitude ambiant "a conduit à un déclin de l'activité de nos clients sur les marchés financiers et nos revenus ont reculé par rapport à l'année précédente, tout particulièrement dans les activités de courtage et de financement des entreprises", a expliqué le patron. Des facteurs qui devraient être encore à l'oeuvre dans les mois qui viennent.

Dans un contexte d'inquiétudes sur la conjoncture mondiale, et de taux d'intérêt bas qui mettent des batons dans les roues des banques, la situation "restera difficile sur l'ensemble de 2016", a prévenu M. Schenck.

Pour Ingo Frommen, de LBBW, les résultats trimestriels sont "un rappel à la réalité" et "le début d'année confirme l'opinion de la direction, selon laquelle l'exercice en cours sera très difficile".

Deutsche Bank entend boucler au deuxième trimestre la cession déjà annoncée d'une part de 20% qu'elle détenait dans la banque chinoise Hua Xia Bank. Cette opération, d'un montant de 3 milliards d'euros, devrait lui permettre de raffermir son assise financière.

Le changement de culture, l'un des grands chantiers promis de longue date, semble en revanche encore alimenter la discorde en interne. La presse allemande a notamment fait état ces derniers jours de dissenssions au sein du conseil de surveillance concernant le zèle de l'un de ses membres, le conseiller juridique Georg Thoma, pour faire la lumière et solder les diverses casseroles du passé.

afp/buc