Francfort (awp/afp) - Le patron de l'opérateur Deutsche Börse s'est efforcé mercredi de rassurer les actionnaires sur l'avenir du groupe allemand, qui repose désormais sur une stratégie des "petits pas" après la fusion avortée avec l'homologue britannique London Stock Exchange.

"Après la fin des discussions (de fusion) avec Londres, il est difficile actuellement d'imaginer des grandes fusions entre opérateurs boursiers", a déclaré Carsten Kengeter devant quelque 500 actionnaires réunis en assemblée générale à Francfort (ouest).

Le projet de mariage avec LSE, rejeté fin mars par la Commission européenne, aura coûté à Deutsche Börse 76,5 millions d'euros en frais de conseils, dont moins d'un million au titre du démontage de l'ensemble, a expliqué le dirigeant.

Faute de viser à nouveau de grands mariages entre Bourses à l'international, Deutsche Börse va opter pour une stratégie des "petits pas", favorisant les acquisitions ciblées, les partenariats stratégiques ou les prises de participations minoritaires, a-t-il précisé.

Le Brexit, qui inquiète les acteurs de marché, offre selon lui un "moment de choix" pour étendre le négoce et la compensation de dérivés sur des plate-formes boursières sécurisées.

Il est question que l'activité lucrative de compensation des dérivés libellés en euros soit relocalisée de Londres vers l'Europe continentale, Deutsche Börse cherchant à en profiter. Mais Paris est aussi à l'offensive pour récupérer sa part.

L'opérateur boursier compte aussi accompagner le développement des marchés de capitaux en Europe et ailleurs, en proposant sur ses diverses plate-formes le négoce de nouvelles catégories d'actifs. M. Kengeter voit des opportunités dans les domaines de l'énergie, des devises, des obligations d'entreprises et des matières premières.

Deutsche Börse veut encore mettre l'accent sur la fourniture de données de marché, a dit le patron du groupe qui produit l'indice Dax des valeurs vedettes de la cote à Francfort et une grande famille d'autres indices.

Cette stratégie doit permettre au groupe de voir ses recettes progresser de 5% à 10% et son résultat de 10% à 15% par an en moyenne, conformément à son plan "Accelerate" présenté en 2015.

Le loupé dans la fusion envisagée avec le concurrent LSE et une enquête sur un soupçon de délit d'initié pesant sur lui ont mis le patron de la Bourse allemande sous intense pression ces derniers mois.

Mercredi, il a de nouveau nié toute faute liée à son acquisition en décembre 2015 pour 4,5 millions d'euros d'actions de l'entreprise, deux mois avant l'annonce officielle du projet de fusion avec LSE.

"Reconnaissez que le timing choisi pour cette transaction aura été tout sauf idéal", a lancé Markus Kienle, avocat représentant l'association d' actionnaires minoritaires SdK.

"M. Kengeter est-il toujours l'homme qu'il faut pour relever les défis à venir?", s'est demandé l'avocat Andreas Lang, de l'association de petits actionnaires DSW. Cette affaire entraîne déjà "une énorme perte d'image pour l'entreprise", a-t-il souligné, recueillant les applaudissements nourris de l'assistance.

Le mandat du président de Deutsche Börse se termine fin mars 2018, la question de son renouvellement restant ouverte.

Interpellé sur le sujet, le président du conseil de surveillance, Joachim Faber, s'est cantonné à dire que "le conseil a exprimé toute la confiance à M. Kengeter" et que la décision sur un nouveau mandat sera prise "dans l'année en cours."

Appelés à voter le quitus pour chaque membre du directoire au titre de l'exercice 2016, les actionnaires ont approuvé à 83,92% la gestion de Carsten Kengeter. Un vote sans conséquence mais qui indique une certaine défiance à l'égard de l'homme à la tête de l'entreprise.

afp/buc