La monnaie unique s’éloigne de ses récents points bas, évoluant au rythme des rebondissements politiques en Europe sur fond de nouvelle menace protectionniste américaine.

D’abord contestée par le président italien, garant de l’appartenance de l’Italie à l’Union monétaire, la coalition populiste a finalement revu sa copie pour proposer un gouvernement euro-compatible et éviter l’organisation de nouvelles élections. Ainsi Paolo Savona, trublion eurosceptique et objet du veto de Sergio Mattarella, glisse de l’Economie aux Affaires européennes, une fonction sous tutelle du Ministre des Affaires Etrangères Enzo Moavero Milanesi, pro-européen ayant travaillé à Bruxelles pendant vingt ans. Si Giuseppe Conte, juriste de 53 ans sans la moindre expérience politique, devient officiellement président du Conseil des ministres, les marchés saluent le retour à une certaine stabilité sans rupture avec la construction européenne. Un soulagement partagé par Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne.

Le spread entre le Bund et le taux italien à 10 ans se resserre à 215 points de base contre plus de 300 la semaine passée mais seulement 135 il y a moins d’un mois. Le niveau de l’endettement de la troisième économie européenne et le risque de dérapage budgétaire lié au programme du nouveau gouvernement (abaissement de l’âge de la retraite, baisses d’impôts drastiques, revenu de citoyenneté, …) passent à ce stade au second plan.

Au même moment en Espagne, le chef du gouvernement, dont le parti a été récemment condamné pour corruption, a été renversé par le Parlement. Mariano Rajoy fut victime d’une motion de censure initiée par Pedro Sanchez, chef de l’opposition socialiste, et adoptée par les députés à la faveur d’alliances de circonstance avec indépendantistes basques ou catalans et extrême gauche (Podemos). Un scénario inédit dans l’ère post-franquiste. Avec seulement 84 sièges socialistes sur 350 à la Chambre basse, le nouveau dirigeant espagnol pourrait toutefois décider d’organiser des élections anticipées pour renforcer sa marge de manœuvre.

Aux Etats-Unis, la mise en application de nouvelles taxes douanières sur l’aluminium et l’acier importés depuis l’Union européenne, le Mexique et le Canada réveille les craintes de guerre commerciale tandis que les promesses de représailles n’ont pas tardé à émerger. Le G7 du 8 et 9 juin prochains, qui réunira les dirigeants des principales puissances mondiales, s’annonce tendu alors que les grands partenaires de l’Oncle Sam ont déjà stigmatisé d’une seule voix le protectionnisme américain.

Côté macro, la première économie mondiale enregistre un rapport mensuel sur l’emploi robuste au mois de mai. Avec 223 000 embauches, des salaires qui progressent de +0.3% d’un mois sur l’autre (+2.7% sur un an) et un taux de chômage au plus bas depuis 18 ans (3.8%), aucun obstacle ne semble pouvoir contrarier les plans de la Réserve Fédérale en matière de hausse de taux.

Saluons par ailleurs un début d’éclaircie parmi les statistiques du Vieux-Continent avec le bond spectaculaire de la hausse des prix à la consommation en zone Euro (qui passe de +1.2 à +1.9% sur un an entre avril et mai), en particulier en Allemagne (+2.2%) et en Espagne (+2.1%). Mais pas de quoi précipiter une action de la BCE qui surveille attentivement les développements politiques et géopolitiques et leurs potentielles conséquences sur la santé des Dix-Neuf.

Techniquement, l’Euro rebondit juste au-dessus de 1.15 pour se réinstaller au-delà de 1.1659 USD, un niveau intermédiaire. Dans un contexte fondamental peu attrayant pour les investisseurs, la dynamique graphique actuelle conserve un biais baissier tant que 1.1790 est préservé en clôture. Nous privilégions les ventes sur rebond au-dessus de 1.17 USD.