Euronext a fait son entrée dans notre portefeuille Europe PEA en novembre 2017 (77 titres achetés à 50,631 euros pièce) pour la qualité de ses fondamentaux et des indicateurs d'investissement particulièrement bien orientés. Le dossier est également présent dans notre fonds EUROPA ONE. Ces atouts restent d'actualité pour la société, qui clignote toujours au vert dans notre Market Screener, hormis au niveau de la valorisation, qui se retrouve en territoire moins favorable après un parcours haussier prononcé pour l'action depuis plusieurs trimestres. Pour autant, le potentiel n'est pas épuisé.

La stratégie du management est désormais bien ancrée. Elle se décline en deux grands axes. Le renforcement de l'offre technologique d'une part et la croissance externe d'autre part. Le premier volet est relativement classique pour un opérateur boursier. Dans un contexte d'évolution rapide de l'offre de services financiers, l'opérateur doit continuellement s'adapter à la demande pour satisfaire les intermédiaires. Euronext s'y emploie en étoffant ses outils et en améliorant sa flexibilité, des éléments qui sont au cœur de son plan stratégique "Agility for Growth".

Le serpent de mer de la consolidation

Dans le domaine de la croissance externe, Euronext dispose d'un atout non négligeable : sa taille relativement modeste. La mode des méga-opérations dans le secteur crée des écueils antitrust parfois insurmontables. Le London Stock Exchange et Deutsche Boerse, dont le mariage a une fois de plus été retoqué l'année dernière, en savent quelque chose. Cela a, dans une certaine mesure, laissé le champ libre au groupe dirigé par Stéphane Boujnah, qui ne s'est pas fait prier pour mettre la main sur la bourse de Dublin récemment.

Mais le marché songe déjà au coup d'après, qui a déjà un nom : Bolsas y Mercados Espanoles. BME, l'opérateur de la Bourse de Madrid, est le quatrième acteur européen du secteur, avec une capitalisation de 2,4 milliards d'euros. Euronext est au troisième rang avec ses 3,9 milliards d'euros. Une opération entre les deux sociétés est un serpent de mer des marchés.

Le mariage paraît très intéressant sur le papier, notent Rosine van Velzen et Albert Ploegh, qui suivent le secteur chez ING Groep. La proximité géographique des deux groupes est un atout pour étendre le modèle fédéraliste d'Euronext, estiment-ils dans une étude parue en cette fin de semaine. BME affiche une position de leader sur les marchés cash espagnols, affiche une forte génération de trésorerie. Des synergies sont à envisager, mais sans doute plus modestes que celles programmées dans le cadre du rachat de l'Irish Stock Exchange, car l'opérateur madrilène affiche déjà une structure de coûts optimisée.

Compte tenu de la qualité du bilan d'Euronext, le financement ne devrait pas poser de problème. ING estime que le levier d'endettement pourrait monter à 3,5 fois l'Ebitda. Dans ce contexte, une acquisition à 3 milliards d'euros pourrait être financée pour partie avec 1,4 milliard d'euros de dette et 1 milliard d'euros d'augmentation de capital. Trois ans après la réalisation, la transaction pourrait renforcer de 25 à 30% le bénéfice par action et afficher un retour sur investissement au moins égal à 8% : suffisant pour justifier la dépense, estime le bureau d'études néerlandais, dont c'est le scénario préféré. A défaut, Euronext risque d'avoir à se montrer plus "actionnaire-friendly", soit en versant plus de résultat en dividende, soit en programmant un coupon exceptionnel en 2019.

ING place clairement Euronext en position de prédateur. A défaut de BME, vers qui l'opérateur pourrait-il se tourner pour nourrir son appétence à la croissance externe ? Quatre noms apparaissent sur le radar du bureau d'études. La Bourse de Luxembourg d'abord, quoi qu'elle ne constitue pas une opération "transformante", compte tenu de sa taille modeste. La Bourse de Zurich ensuite (SIX), celle de Varsovie et celle d'Oslo. L'autre cible de choix en Europe est la Bourse de Milan, pour l'heure aux mains du London Stock Exchange. Le propriétaire n'a a priori pas de velléités de vente, mais Euronext serait probablement intéressé si la donne venait à changer.