NEW YORK (awp/afp) - La hausse des cours du pétrole redonne des couleurs aux hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis qui ont particulièrement souffert de la chute des prix ces dernières années, le secteur discernant également dans l'élection de Donald Trump des raisons d'espérer.

Certains des gisements les plus faciles à exploiter reprennent la production mais l'avenir reste encore incertain pour d'autres. "Je pense qu'ils attendent encore des preuves plus tangibles avant de sortir du bois", estime David Pursell, directeur chez Tudor, Pickering, Holt & Co, une banque d'investissement spécialisée dans l'énergie.

La chute du marché du pétrole, l'une des plus accentuée depuis l'embargo décrété par les pays arabes en 1973, s'est traduite par le licenciement de milliers d'employés du secteur et a donné un coup d'arrêt à l'industrie du schiste américaine, auparavant en plein essor.

"Les opérateurs restent encore prudents avec leur argent mais nous voyons très certainement une reprise des investissements avec la remontée des prix", ajoute Jason McFarland, président de l'Association des professionnels du forage à Houston (Texas).

L'élection de Donald Trump, qui a choisi pour son gouvernement plusieurs responsables du secteur tel le secrétaire d'Etat désigné Rex Tillerson, ex-PDG d'ExxonMobil, et veut placer à la tête de l'Agence de la protection de l'environnement (EPA) Scott Pruitt, un "climato-sceptique", a aussi changé la donne.

Mais c'est la décision en décembre du cartel pétrolier de l'Opep et d'autres pays producteurs comme la Russie de réduire leur production qui a donné un coup de fouet au marché. Les cours du pétrole à New York ont terminé vendredi à près de 54 dollars le baril, plus de deux fois plus qu'il y a un an.

Cette décision doit toutefois encore se concrétiser et elle n'est valable que pour six mois. "Les producteurs dont les coûts sont élevés ne doivent pas penser qu'ils ont reçu carte blanche pour augmenter leur production", a souligné l'Agence internationale de l'énergie (AIE) dans un rapport en décembre.

"Ils doivent y réfléchir à deux fois avant de se lancer dans de nouveaux investissements", ajoute l'agence basée à Paris.

- Incertitudes -

D'autres incertitudes affectent le marché, comme la croissance de la consommation aux Etats-Unis alors que Donald Trump s'apprête à entrer à la Maison Blanche avec un ambitieux programme de relance économique. Le maintien de la progression de la consommation d'énergie en Inde et la santé de l'économie chinoise sont d'autres inconnues qui pèsent sur la demande mondiale en hydrocarbures.

La production venant du schiste aux Etats-Unis offre toutefois une plus grande souplesse que celle d'autres origines géographiques. Les progrès technologiques dans ce domaine avaient permis de porter en 2015 la production américaine a 9,6 millions de barils/jour(b/j), 80% de plus qu'en 2010. Elle est ensuite retombée à environ 8,6 millions de b/j et a quelque peu repris ces dernières semaines pour atteindre 8,8 millions b/j.

"Nous n'avons pas beaucoup d'expérience en matière de reprise rapide de certains sites de production car cela ne s'est jamais produit avant", souligne Neil Atkinson, responsable pour les marchés pétroliers à l'AIE. "La question en suspens et de savoir à quelle vitesse les gens peuvent réagir s'ils pensent que la hausse des prix va continuer", ajoute-t-il.

Selon des premières indications, le nombre de puits a fortement augmenté dans le bassin dit Permian dans l'ouest du Texas pour s'établir actuellement à 267 contre 209 il y a un an, selon des chiffres de l'entreprise de services pétroliers Baker Hughes. Chaque puit emploie directement quelque 20 personnes et une douzaine d'emplois indirects, selon Jason McFarland.

Mais l'activité reste encore inférieure à ce qu'elle était il y a un an sur le bassin schisteux Eagle Ford, également dans le Texas, et sur celui de Bakken, dans le Dakota du nord.

Le bassin Permian offre des coûts de production plus bas et se trouve à proximité d'oléoducs, souligne Jesse Thompson, économiste à l'antenne de Dallas (Texas) de la Réserve fédérale (Fed). "On entend parler d'embauches. On sait que les tendances dans le secteur sont en train de changer mais il y a aussi encore des personnes qui se font licencier et des entreprises en difficulté. C'est une période de transition", souligne-t-il.

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