New York (awp/afp) - La réforme fiscale récemment adoptée aux Etats-Unis continue d'avaler les profits des grandes banques: Goldman Sachs a enregistré sa première perte trimestrielle depuis six ans, tandis que Bank of America a été à nouveau contrainte de grever ses comptes.

Goldman Sachs a annoncé mercredi des bénéfices divisés par près de deux en 2017 à 3,7 milliards de dollars, marqués par une perte nette de 2,14 milliards au quatrième trimestre, une première depuis 2011. La puissante banque d'affaires avait dégagé un bénéfice net de 2,15 milliards lors des trois derniers mois de 2016.

Si Bank of America n'est pas tombée dans le rouge, la deuxième banque américaine en termes d'actifs espérait toutefois tourner définitivement la douloureuse page des multiples charges inscrites depuis la crise financière.

Elle va devoir patienter car le quatrième trimestre a été affecté par une lourde charge de 2,9 milliards de dollars, ce qui ne l'a pas empêchée d'enregistrer un bénéfice trimestriel de 2,37 milliards. Sur l'année, le bénéfice net est de 18,23 milliards mais il aurait pu être de 21,1 milliards de dollars, égalant ainsi le record atteint en 2006.

Les charges des deux banques résultent de l'adoption en décembre d'une réforme fiscale promise par l'administration Trump imposant des modifications à la comptabilité des entreprises.

Chez Bank of America, la charge est liée à la comptabilisation immédiate d'impôts qui avaient déjà été payés et dont une partie devait être remboursée ultérieurement (deferred tax assets - DTA) et qui en conséquence disparaît des comptes.

Pour Goldman Sachs, c'est le coût du rapatriement aux Etats-Unis de bénéfices jusqu'ici détenus à l'étranger par des filiales.

La facture a été plus salée pour Citigroup, puisque la charge annoncée mardi s'est élevée à 22 milliards de dollars, causant une perte de 18,3 milliards de dollars au 4e trimestre.

- Année noire du courtage -

Les marchés financiers ont jusqu'ici ignoré ces charges, estimant qu'à terme cette réforme, qui abaisse le taux d'imposition des entreprises et octroie des baisses massives d'impôts aux ménages, devrait être du pain bénit pour les banques.

D'un côté, les grandes banques pourraient tirer profit des grandes manoeuves anticipées entre les multinationales qui vont rapatrier de gros trésors de guerre de l'étranger et devraient s'en servir pour réaliser des acquisitions notamment. Les commissions des banquiers les conseillant dans ce type de transactions devraient en conséquence augmenter.

De l'autre côté, les marges bénéficiaires des activités traditionnelles de prêts et de dépôts devraient profiter de la confiance renforcée des consommateurs en la santé de l'économie et des prochaines hausses des taux d'intérêt de la banque centrale (Fed) que les banques ne manqueront pas de répercuter sur leurs clients.

Nouvelle venue dans la banque de détail, Goldman Sachs a indiqué mercredi que sa plateforme de prêts et de dépôts en ligne Marcus a octroyé pour 2 milliards de dollars de prêts l'an dernier et enregistré des dépôts de plus de 5 milliards.

"Avec une économie mondiale sur le point d'accélérer, une nouvelle législation fiscale américaine censée donner un coup de fouet (aux entreprises et consommateurs) nous sommes en bonne position pour servir nos clients", a déclaré le PDG Lloyd Blankfein.

La réforme fiscale devrait doper de 16% les profits de Bank of America dans l'avenir, ont calculé les analystes de Bernstein, ce que semble confirmer l'établissement qui a décidé, par anticipation des effets des baisses d'impôts, de verser une prime exceptionnelle de 1.000 dollars à ses 145.000 employés.

Seul hic: les activités de courtage ont connu une année 2017 noire, pâtissant d'une faible volatilité sur les marchés financiers et de la prudence des grands investisseurs.

Les revenus des activités spéculatives ont chuté de 18% l'an dernier chez Goldman Sachs, à cause d'un plongeon de 30% des recettes générées par le courtage des matières premières, devises et autres produits financiers (FICC), vache à lait des grandes banques. Le FICC générait jusqu'à il y a encore peu plus de la moitié des bénéfices de la banque, symbole de la domination de Wall Street dans le monde de la finance mondiale.

afp/rp