Le nouveau régime oblige les banques, gérants et traders des marchés boursier, obligataire, des matières premières et des dérivés à fournir des informations détaillées sur leurs transactions afin de surveiller les échanges et de repérer la formation de bulles spéculatives pour éviter la répétition d'une crise comme celle de 2007-2009.

Les grandes banques et principaux gestionnaires d'actifs ont dépensé collectivement quelque deux milliards de dollars (1,7 milliard d'euros) l'an dernier pour se préparer au changement, estime-t-on.

"Ce qu'on peut constater de notre côté, c'est qu'à ce stade il n'y a pas de pépin", a déclaré à la presse Steven Maijoor, président de l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF ou ESMA). "Pour la première fois nous pourrons disposer d'une vue d'ensemble complète de tous les instruments financiers dans l'UE."

La faiblesse des volumes en ce début d'année, tant sur les actions que les obligations, a contribué à une transition en douceur.

"A ce stade il n'y a pas de différence avec une journée normale", a dit Markus Huber, trader à City of London Markets. "Et les volumes ne vont pas s'étoffer de sitôt car tout le monde n'est pas encore rentré et il n'y a pas beaucoup d'actualité ni de statistiques économiques."

L'entrée en vigueur de MiFID II (Markets in Financial Instruments Directive II) avait été retardée d'un an pour laisser le temps aux acteurs des marchés financiers de se préparer.

Les régulateurs se sont engagés à ne pas sanctionner d'emblée d'éventuelles insuffisances, du moment que les participants concernés font preuve de leur bonne foi.

Selon Steven Maijoor, des difficultés ne peuvent être exclues dans les prochaines semaines compte tenu de la complexité et de l'ampleur de la réforme.

Quelques heures avant l'application de la directive, les régulateurs britannique et allemand ont accordé un sursis à trois chambres de compensation d'Allemagne et de Grande-Bretagne qui, avec MiFID II, verront leurs clients disposer d'une liberté accrue de choix du lieu de règlement des transactions portant sur des contrats de dérivés.

La directive comporte une clause d'"accès libre" (open access) qui supprime toute obligation d'effectuer la compensation d'une transaction au sein de la plate-forme sur laquelle elle s'est effectuée.

ICE Futures Europe, le London Metal Exchange et Eurex Clearing, la chambre de compensation de Deutsche Börse, ont obtenu d'être dispensés de cette clause jusqu'en juillet 2020, ce qui leur évite d'avoir à modifier leurs mécanismes pour que les transactions de leurs clients puissent être compensées ailleurs.

Steven Maijoor a assuré que ces dispenses étaient "ponctuelles" et que les nouvelles obligations pour les chambres de compensations prendraient effet en 2020.

Alexandra Hachmeister, en charge des questions réglementaires à Deutsche Börse, a expliqué que le report était nécessaire pour Eurex du fait des incertitudes liées au devenir des marchés financiers britanniques après la sortie du Royaume-Uni de l'UE prévue en 2019.

L'un des principaux objectifs de MiFID II est de transférer les transactions qui ont lieu actuellement sur des systèmes opaques ("dark pools") vers des marchés réglementés où chacun peut voir les prix offerts.

Parallèlement les banques devront transmettre davantage de données aux autorités de tutelle et proposer des systèmes de tarification plus clairs pour leurs différents produits, plutôt que d'afficher des prix incluant dans un même ensemble leurs frais et leurs commissions.

Le prix de la recherche financière devra être ainsi séparé des frais d'exécution alors que jusqu'ici elle était le plus souvent fournie à titre gracieux par les brokers, qui se rémunéraient sur le passage des ordres.

Un gérant d'une grande société de gestion a dit mercredi avoir reçu un tiers de moins de notes de recherche que la veille.

(Wilfrid Exbrayat et Véronique Tison pour le service français)

par Huw Jones et Alasdair Pal