Francfort (awp/afp) - Bayer veut vendre pour près de 6 milliards d'euros d'activités agrochimiques à BASF afin de convoler avec l'américain Monsanto, permettant au passage à son rival allemand d'entrer au prix fort sur le marché des semences.

Le groupe de Leverkusen (ouest) a annoncé vendredi avoir signé un accord avec son compatriote BASF pour lui céder des semences de coton, de colza et de soja ainsi que ses désherbants dits non sélectifs à base de glufosinate d'ammonium -connus sous les marques Liberty ou Basta-, pour un montant total de 5,9 milliards d'euros.

Ces activités ont dégagé en 2016 un chiffre d'affaires de 1,3 milliard d'euros, généré pour les deux tiers en Amérique du Nord.

La transaction est toutefois soumise à condition, à savoir la finalisation du rapprochement entre Bayer et Monsanto, a souligné l'entreprise.

"Nous adoptons une approche proactive pour aborder les éventuelles questions réglementaires, dans l'optique de faciliter la conclusion de la transaction avec Monsanto", a expliqué le patron de Bayer, Werner Baumann, cité dans un communiqué.

La Commission européenne doit en effet encore rendre une décision sur le projet de fusion entre Bayer et Monsanto, spécialiste américain des pesticides et des OGM. En août, Bruxelles avait annoncé l'ouverture d'une enquête approfondie, craignant que l'opération ne réduise la concurrence sur un marché déjà très concentré.

C'est pour répondre à ces craintes et dans l'espoir de pouvoir boucler la fusion "d'ici début 2018" que Bayer a décidé de vendre quelques bijoux de famille à son grand concurrent BASF.

Les fruits de cette vente permettront à Bayer de refinancer une petite partie du rachat de Monsanto pour 56 milliards d'euros.

- 'Gagnant-gagnant' -

Si l'opération est menée jusqu'à son terme, le géant allemand de la chimie BASF mettra la main sur la propriété intellectuelle des produits rachetés et sur des sites appartenant à Bayer, parmi lesquels 5 usines de production ou de préparation et 10 centres de recherche et développement.

Plus de 1.800 salariés basés principalement aux Etats-Unis, en Allemagne, au Brésil, au Canada et en Belgique, seront transférés chez lui. BASF promet aux salariés permanents des contrats de travail similaires à ceux de Bayer pour une durée d'au moins 3 ans, une fois le rachat des activités de Bayer bouclé.

Jusqu'ici spectateur de la recomposition du marché de l'agrochimie, avec la fusion récente des américains Dow Chemical et DuPont et les noces prévues de Bayer et Monsanto, et après s'être infligé une cure d'amaigrissement radicale en cédant des pans entiers de son activité pour gagner des marges de manoeuvre financières, BASF passe ainsi à l'action.

L'acquisition prévue sera "la plus grande de son histoire", souligne Peter Spengler, analyste de DZ Bank interrogé par l'AFP.

Elle permettra surtout à BASF de faire son entrée dans le domaine des semences dont il était jusqu'à présent resté éloigné, et de proposer une offre de produits agrochimiques "intégrée" à l'instar de Dupont, de Monsanto ou du suisse Syngenta (racheté par le chinois ChemChina), relève M. Spengler.

"Ce sera un ajout stratégique aux compétences reconnues de BASF dans la protection des cultures et à nos propres opérations dans la biotechnologie", a vanté dans un communiqué Kurt Bock, le patron de BASF. Son groupe espère boucler l'opération au premier trimestre 2018.

C'est "gagnant-gagnant" pour les deux groupes allemands, même si BASF paie "un prix très élevé" estime Peter Spengler.

A la Bourse de Francfort, vers 09H30 GMT, Bayer gagnait 1,11% à 118,10 euros tandis que BASF cédait 0,49% à 88,87 euros, dans un marché à l'équilibre.

afp/rp