Sydney (awp/afp) - Le régulateur australien a saisi la justice contre le géant minier Rio Tinto et deux de ses anciens dirigeants qu'il accuse de tromperie dans l'évaluation d'investissements au Mozambique qui s'étaient soldés par un fiasco.

Le groupe anglo-australien est déjà l'objet de poursuites des autorités américaines pour avoir dissimulé l'étendue de l'échec de sa filiale Rio Tinto Coal Mozambique (RTCM).

Celle-ci avait été acquise en 2011 pour 3,7 milliards de dollars, et revendue trois ans après pour 50 millions à un groupe indien.

Rio Tinto avait fait le pari que ces mines de charbon allaient lui rapporter énormément. Mais le groupe aurait vite déchanté après s'être vu refuser un permis par le gouvernement mozambicain.

La Commission australienne des valeurs et investissements (Asic), le régulateur des entreprises, a saisi vendredi la Cour fédérale de Sydney en accusant Thomas Albanese et Guy Elliott, respectivement PDG et directeur financier du groupe au moment des faits, d'avoir présenté une image fausse des "réserves et des ressources" de ces actifs mozambicains dans leur rapport annuel 2011.

L'Asic estime que les deux anciens dirigeants ont manqué à leurs devoirs et les accuse, eux et Rio Tinto, d'avoir enfreint la loi sur les entreprises.

La Commission demande des amendes contre les deux ex-dirigeants et souhaite que la Cour prononce des interdictions de diriger des entreprises.

Rio Tinto, MM. Albanese et Elliott ont été inculpés aux Etats-Unis l'année dernière pour toute une série de violations des lois fédérales américaines en matière de valeurs mobilières, en lien avec cette affaire.

Le gendarme américain de la Bourse, la SEC, avait porté plainte auprès d'un tribunal de Manhattan en reprochant à Rio et à ses deux anciens dirigeants de n'avoir pas tenu compte des avertissements de responsables opérationnels de RTCM.

Sur ce même dossier, le deuxième groupe minier mondial avait annoncé un accord en octobre avec le gendarme financier britannique, la Financial Conduct Authority (FCA).

Pour expliquer la dépréciation de 3 milliards de dollars annoncée en janvier 2013, Rio Tinto avait avancé alors une révision à la baisse des estimations sur la quantité de charbon à coke contenu dans ses mines mozambicaines de Tete (nord-ouest).

Il avait aussi mis en avant des raisons logistiques: le charbon devait au départ être transporté par barge sur le fleuve Zambèze jusqu'aux ports de l'océan Indien pour être exporté, mais le gouvernement à Maputo n'avait pas donné son accord pour des raisons environnementales.

Les autorités mozambicaines avaient toutefois immédiatement fait part de leurs doutes sur les raisons invoquées par Rio Tinto, Maputo évoquant à l'époque une possible raison interne au géant minier.

Outre RTCM, le groupe avait dû au même moment inscrire une charge distincte comprise entre 10 et 11 milliards de dollars liée à ses actifs dans l'aluminium, principalement Rio Tinto Alcan et Pacific Aluminium.

Rendre publique une seconde dépréciation aurait immanquablement contribué à alimenter les doutes sur les capacités de l'équipe dirigeante de Rio, accusait la SEC.

afp/buc