Paris (awp/afp) - Samsung a pris de plein fouet le retour de flamme de sa gestion de la crise provoquée par les explosions de certains de ses smartphones. Au delà des dégâts d'image, le groupe va devoir s'atteler à restaurer la confiance.

"Quand les premiers incidents sont apparus début septembre, Samsung semblait avoir bien réagi. Ils ont mené une enquête, identifié le problème, lancé un large rappel", rappelle Andy Holdsworth, spécialiste de gestion de crise au cabinet britannique Bell Pottinger.

Mais tout a déraillé quand certains Note 7 de remplacement ont pris feu.

Or "la base de la gestion de risque est de s'assurer que quand vous apportez une solution, c'est la bonne, afin de pouvoir avancer et de laisser le problème derrière vous", estime-t-il. "Maintenant, on se demande vraiment si la première enquête était vraiment sérieuse, on perd confiance puisque le remède proposé souffre du même mal et que ce problème n'est pas anodin".

Certes, il n'y a pas eu mort d'homme. Mais des vidéos de téléphones prenant feu sont devenues virales. Dans les avions avant de décoller, les hôtesses demandent désormais aux passagers d'éteindre leur Note 7 pour éviter tout risque d'explosion.

"Que le téléphone prenne feu n'est pas un problème nouveau en soi. C'est arrivé à Boeing avec des batteries au lithium, c'est arrivé à Dell il y a longtemps", relève pour sa part ManMohan Sodhi, spécialiste de la gestion des opérations et des chaînes d'approvisionnement à la Cass Business School de Londres.

Avec des circuits électroniques toujours plus petits et toujours plus puissants, cet aléa est inévitable. "Les entreprises tentent d'éviter ce problème en effectuant plus de tests mais dans l'industrie de l'électronique, ce qui compte, c'est la rapidité avec laquelle vous sortez le produit. Peu importe l'entreprise, (un tel problème) relève juste de la malchance", estime le spécialiste.

Mais Samsung a commis une erreur en voulant "régler le problème trop vite". "Là il s'agit de négligence et la réputation est touchée", estime-t-il.

- Spirale vicieuse à la Fukushima -

Au-delà du problème industriel, la société sud-coréenne "a commis une erreur d'appréciation" en ne prenant pas suffisamment en compte l'inquiétude suscitée par les premiers incidents, estime Yves-Paul Robert, en charge de la communication de crise chez Havas.

Or Samsung, depuis début septembre, "propose une réponse pragmatique, dénuée de toute forme d'émotion. Ils gèrent ça comme une catastrophe industrielle mais ils ont oublié de penser à leurs clients".

Que ce soit les autorités américaines de protection des consommateurs qui aient mis la pression sur le groupe sud-coréen pour étendre les rappels mi-septembre montre bien, selon lui, que le groupe a totalement perdu la main sur la gestion de la crise.

Samsung est entraîné dans une "spirale vicieuse à la Fukushima" où, après l'explosion initiale, une "succession de mauvaises décisions conduit à une plus grosse catastrophe", avance le spécialiste en relations publiques. Au final, en pensant à Samsung, "on se souviendra du portable qui prend feu".

Cette impression restera d'autant plus forte que la direction a semble-t-il décidé à la hâte mardi d'arrêter définitivement la production du Note 7, après avoir parlé la veille d'une simple suspension temporaire.

Cette précipitation "ne fait que signaler aux consommateurs que la direction de Samsung est en train de paniquer", estime ManMohan Sodhi.

En renonçant à réparer le Galaxy Note 7, "ils ne font que se créer plus de problèmes", affirme le spécialiste. Au-delà de l'argent que le rappel va leur coûter, comment disposer des millions de téléphones renvoyés? Et quid de tous les sous-traitants travaillant sur le produit?

Tant que l'entreprise n'aura pas fait toute la lumière sur le problème initial et sur les mesures mises en place pour s'assurer qu'il ne se reproduit pas, le prochain Galaxy Note 8 n'inspirera pas confiance. Pour ManMohan Sodhi, "vous vous direz que c'est la même chose que le Note 7 avec un peu de peinture dessus et vous ne l'achèterez pas".

afp/rap