San Francisco (awp/afp) - L'arrivée de Softbank au capital d'Uber, le leader mondial des VTC, pourrait enfin permettre à l'entreprise américaine d'entrer dans l'âge adulte après des débuts mouvementés marqués par des scandales et des polémiques.

Après de longues tergiversations, Uber a conclu un accord de principe pour vendre une partie de son capital au groupe japonais. Celui-ci devrait investir des milliards de dollars dans l'entreprise via une prise de participation pouvant atteindre 14% du capital.

"Nous sommes parvenus à un accord avec un consortium emmené par Softbank et Dragoneer (une société de capital-investissement basée à San Francisco) concernant un éventuel investissement", a indiqué Uber dimanche soir.

"Nous pensons que cet accord apporte un vote de confiance important sur le potentiel d'Uber à long terme", a affirmé le groupe, qui cumule les pertes financières.

Même si SoftBank a pris soin lundi de préciser qu'"en aucun cas, (son) investissement n'est décidé" définitivement, l'accord de principe donné par Uber montre que son conseil d'administration a enfin trouvé un terrain d'entente en interne, après des semaines de déchirements, principalement entre l'ancien patron controversé Travis Kalanick et un gros actionnaire, le fonds Benchmark.

"L'investissement de Softbank laisse penser qu'Uber est devenu bien plus mature", pense l'analyste indépendant Robert Enderle.

- Fin de la récréation -

"C'est un signe qui montre que SoftBank est maintenant bien plus à l'aise, car le conseil d'administration (d'Uber) prouve qu'il reprend le contrôle, et qui montre qu'une large part de la mauvaise image d'Uber est derrière lui", abonde l'analyste Jack Gold (J.Gold Associates).

Des signes positifs d'autant plus attendus que le nouveau patron Dara Khosrowshahi, nommé fin août pour remettre Uber sur les rails, prévoit une entrée en Bourse pour 2019.

Il a officiellement sifflé la fin de la récréation : Uber doit passer "d'une ère de croissance à tout prix à celle d'une croissance responsable", disait le nouveau PDG il y a quelques jours.

Cofondé en 2009 par Travis Kalanick, Uber a connu en effet une ascension fulgurante: présent aujourd'hui dans plus de 630 villes à travers le monde, il a bouleversé le secteur des transports en lançant sa plateforme de réservation.

Valorisée à environ 68 milliards de dollars, Uber est la startup la plus chère du monde.

Mais ce succès, largement attribué à la personnalité bouillonnante et frondeuse de Travis Kalanick, ne s'est pas fait sans heurts: Uber s'est mis à dos les taxis traditionnels dans de nombreux pays et se retrouve en conflit avec des régulateurs des transports, comme à Londres, où le groupe vient de perdre sa licence.

Autant que de son succès, M. Kalanick est aussi jugé responsable des déboires du groupe: il avait donc été poussé vers la sortie en juin par des investisseurs inquiets, dont Benchmark, mais il est toujours membre du conseil d'administration.

Le groupe fait aussi face à une série d'enquêtes, notamment sur des soupçons de corruption à l'étranger ou l'utilisation de logiciels illégaux. Début décembre, Uber va aussi affronter un procès intenté par Waymo, filiale d'Alphabet/Google, qui l'accuse de vols de technologies.

"Les problèmes d'Uber sont endémiques et profondément ancrés dans la culture et l'image du groupe", estime Rob Enderle.

"C'est un bon début mais (...) le plus dur est à venir", dit-il.

"Il faut attendre de voir si l'ancienne direction, qui possède encore beaucoup de parts, peut revenir dans la course", prévient aussi Jack Gold.

Autre difficulté pour Uber, pointe Trip Chowdhry du cabinet GlobalEquities: la concurrence. Son rival américain, Lyft, qui jouit d'une réputation autrement moins controversée qu'Uber, a justement annoncé lundi qu'elle se lançait pour la première fois hors des frontières américaines, au Canada.

"Il est trop tôt pour dire (si c'est un nouveau départ), il va falloir attendre de voir ce qu'Uber a à proposer", estime M. Chowdhry, qui pense que la compagnie est actuellement largement surévaluée.

afp/rp