Par Federico RAPINI

Genève (awp) - Les sociétés immobilières suisses ont peut-être trouvé la parade à la faible demande pour les surfaces de bureaux. Le coworking, qui connait un développement galopant, apparaît comme une alternative pour louer des espaces "classiques" ne trouvant pas preneur. De grands acteurs comme Swiss Prime Site et PSP Swiss Property s'y mettent doucement, tandis que Mobimo appuie sur l'accélérateur.

La Suisse, et particulièrement la Romandie, voit pousser les espaces de coworking comme des champignons. Dernier projet d'ampleur en date, Gotham a inauguré à fin septembre une surface de 2300 mètres carrés à Lausanne. Tous les bureaux fermés sont déjà loués, tandis que les réservations vont bon train pour les espaces individuels. En tout, 3 mio CHF ont été investis pour aménager ce lieu.

"Le seuil de rentabilité est prévu pour novembre. D'ici décembre, le taux d'occupation devrait être proche de 100%", a indiqué à AWP Philippe Heim, directeur de cet espace de coworking lausannois, actuellement le plus grand de Suisse. Cette forte demande a poussé les responsables à relever leur prévision de chiffre d'affaires, sans toutefois la préciser.

Pour ce projet, la jeune pousse a noué un partenariat avec Mobimo. La société immobilière lucernoise ne croule pas sous les bureaux vides, loin s'en faut, avec un taux de vacance de 0,1% en Suisse romande et de 4,9% dans l'ensemble du pays pour cette catégorie de surfaces.

Pour Mobimo, le coworking est avant tout une affaire de conviction, explique Hélène Demont, responsable de la communication Suisse romande. "Il s'agit d'une tendance générale. Si une société propriétaire d'immeubles n'arrive pas à anticiper l'évolution de la société, elle est perdue." Le groupe revendique une surface de 3300 mètres carrés dévolue à ces espaces et une volonté de l'augmenter.

LOYER MOINS CHER

Les grands bureaux trouvent difficilement preneur car il s'avèrent souvent trop spacieux pour bon nombre de sociétés. Dans ce contexte, Mobimo a fait des concessions sur le projet lausannois. "Nous aurions pu louer cet espace plus cher à d'autres", reconnaît la porte-parole.

"Le marché actuel est favorable aux locataires", surenchérit Vasco Cecchini, en charge de la communication auprès de PSP Swiss Property. Le groupe zougois compte déjà une surface totale de 5100 mètres carrés occupée par du coworking, surtout à Zurich, mais également à Bâle.

Cela représente à peine 1% du portefeuille immobilier de PSP, composé à 60% de bureaux. A fin juin, le taux de vacance du groupe atteignait 8,7%.

L'approche de PSP se veut moins proactive que celle adoptée par Mobimo. "Si une proposition nous parvient pour un espace de coworking, nous allons la considérer. Nous restons ouverts mais ne cherchons pas explicitement des solutions dans ce sens", note M. Cecchini. Ce dernier n'a pas souhaité indiquer si les loyers pratiqués pour ces surfaces sont différents par rapport aux clients "traditionnels".

Autre géant immobilier suisse, SPS souhaite accueillir des espaces de coworking dans ses bâtiments, bien que ce ne soit pas encore le cas actuellement, selon Markus Waeber, porte-parole. La société soleuroise affiche un taux de vacance de 5,5% sur l'ensemble de son portefeuille.

Les projets de PSP sont plus précis. "Un espace de coworking devrait être aménagé dans notre immeuble de la Hardturmstrasse 161 (à Zurich), qui va être entièrement rénové", annonce Vasco Cecchini, qui évoque une surface de 1600 mètres carrés réservée à cet effet.

FORTE DEMANDE

Et la demande ne devrait pas faiblir ces prochaines années. Gotham va investir un autre site à Lausanne et prévoit de s'implanter à Martigny en début d'année prochaine. La société lorgne également du côté de Berne, Genève, Zurich et Zoug. "J'espère que les sociétés immobilières vont soutenir ce marché. Mobimo a décidé de prendre le risque", estime Philippe Heim.

Le britannique Regus - l'un des leaders en Suisse - dispose de 27 sites de coworking et projette d'établir un réseau national de 100 sites maximum au cours des cinq prochaines années, pour une surface totale de 100'000 mètres carrés.

Garry Gürtler, directeur de Regus Suisse, ne doute pas de l'implication des grands groupes pour garantir cette expansion. "Les sociétés immobilières ont saisi le potentiel des espaces de coworking. (...) Les deux parties y voient les avantages." Pour Hélène Demont, la croissance de ces locaux devrait être "exponentielle".

Selon le moniteur immobilier de Credit Suisse publié en mars dernier, 90 locaux de coworking sont recensés sur territoire helvétique. Cela représente un espace équivalent à 2000-3000 postes de travail, soit moins de 0,2% des bureaux de Suisse, un niveau assez faible.

Zurich, Winterthour, Berne et Bâle se taillent la part du lion, la Suisse romande devant encore rattraper son retard. Regus et Wework se partagent 80% du marché suisse.

La grande banque anticipe une croissance de l'offre de 1600 postes par an.

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