Guillaume Bayre,

Agefi-Dow Jones

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Ayant accédé à l'antichambre du CAC 40 à l'automne dernier, le titre Teleperformance (RCF.FR) a connu au cours des mois suivants une performance en demi-teinte. La publication des résultats 2017 du spécialiste de la relation client externalisée pourrait sonner le glas de cette période. En dépit d'une dégradation supplémentaire des parités monétaires, la société est bien placée pour dégager une nouvelle croissance cette année tout en améliorant encore sa rentabilité. Sa faculté à se désendetter rapidement lui permet d'envisager de nouvelles acquisitions significatives tout en rétribuant ses actionnaires.

Toujours champion de la croissance

En 2017, Teleperformance a de nouveau enregistré un exercice record en réalisant 4,18 milliards d'euros de chiffre d'affaires, soit 14,9% de plus qu'en 2016. Le groupe a notamment bénéficié de l'intégration en année pleine de la société américaine d'inteprétariat par téléphone et visiophone LanguageLine Solutions, finalisée en septembre 2016 pour 1,52 milliards de dollars - un prix justifié par la solide rentabilité de la cible, proche de 38%.

Chargé de la traduction des appels en langue étrangère passés aux services d'urgence via le 911, LanguageLine a notamment été très sollicitée lors des ouragans survenus aux Etats-Unis. Inversement, l'effet de la hausse de l'euro face au dollar et à la livre a en partie diminué le chiffre d'affaires publié. Au total, la progression de l'activité à périmètre et change constants est ressortie à 9% sur l'ensemble de l'exercice ainsi que sur le quatrième trimestre, lequel représente le 23e trimestre consécutif de croissance organique supérieure à 5%. De quoi conforter s'il était besoin "le statut bien établi de valeur de croissance" de Teleperformance, souligne Société Générale.

L'effet devises n'empêche pas la rentabilité de progresser

Grandir est une chose, le faire avec un levier positif sur la rentabilité une autre. Dans le cas de Teleperformance, la dynamique peu commune observée sur les revenus ne vient pas au détriment des résultats. Au contraire, la marge d'Ebitda du groupe a atteint 17,2% l'an dernier, contre 15,3% en 2016, alors même que l'effet de change a rogné de 10% le montant de l'Ebitda (une mesure de résultat opérationnel avant amortissements et dépréciations, paiements en action et autres éléments non courants), ressorti à 720 millions d'euros, à comparer à 558 millions d'euros l'année précédente. Selon Portzamparc, qui confirme son conseil d'achat en vue d'un objectif de 140 euros, les comptes annuels rassurent ainsi quant à la capacité du groupe à "performer dans un environnement de devises plus challenging".

Mécaniquement, l'extension géographique de l'entreprise, présente aujourd'hui dans 75 pays (et répondant aux demandes d'usagers et clients de grands groupes et administrations publiques dans... 265 langues et dialectes) lui offre en outre une protection croissante en diversifiant les devises de facturation - à l'image du redressement par exemple du réal brésilien.

Le désendettement rapide reconstitue la force de frappe

Au chapitre du bilan, l'exercice écoulé a permis une progression de plus de 37% du flux de trésorerie net disponible, à 324 millions d'euros - soit un taux de transformation en cash de 45% de l'Ebitda, contre 42% en 2016 - "permettant la poursuite d'un désendettement rapide" après l'acquisition de LanguageLine Solutions, remarque Portzamparc. la dette nette est revenue de 1,67 milliard à 1,33 milliard d'euros, soit moins de 1,9 fois l'Ebitda, au lieu de 2,6 fois fin 2016. Autrement dit, le groupe reconstitue au pas de course ses munitions pour poursuivre la croissance externe dans le domaine des services spécialisés, la division à plus forte rentabilité qui s'est en grande partie construite sur les acquisitions comme celle de LanguageLine ou, en 2013, celle de TLS Contact.

Bien que leader mondial de sa spécialité, le groupe opère sur un marché encore très atomisé. Même si le groupe n'est pas intéressé par l'acquisition de simples capacités sans valeur ajoutée, cela laisse encore un champ considérable pour la croissance externe, qui représente historiquement un tiers de la croissance de l'entreprise.

Des objectifs éloquents

Les interrogations qu'avaient suscité la réunion en octobre des pouvoirs entre les mains du co-fondateur Daniel Julien, aux dépens de Paulo César Salles Vasques qui avait un temps été présenté comme son dauphin, pourraient désormais céder le pas aux objectifs concrets particulièrement optimistes.

Alors que le cours de Bourse a perdu près de 12% depuis octobre jusqu'à la mi-février, le réveil du titre jeudi semble de bon augure. Teleperformance a les moyens de faire encore mieux cette année. L'opérateur de centres d'appel vise pour 2018 une croissance organique encore supérieure à 6% ainsi qu'une nouvelle progression de la marge opérationnelle courante en dépit de l'effet devises.

L'ambition d'atteindre 6 milliards d'euros de revenus en 2022 apparaît ainsi confortée. Le groupe vise à cet horizon un résultat opérationnel courant d'au moins 850 millions d'euros. Une projection valorisée moins de dix fois la valeur d'entreprise actuelle. Après un exercice record, il n'y a pas de raison pour que le titre ne retrouve pas ses sommets, aux environs de 130 euros. Le consensus des objectifs d'analystes, à 142,7 euros, suppose même qu'ils seront dépassés.

-Guillaume Bayre, Agefi-Dow Jones ; 01 41 27 47 93 ; gbayre@agefi.fr ; ed : ECH