Milan (awp/afp) - La Banque centrale européenne a rejeté vendredi la demande de délai déposée par la banque italienne BMPS pour mener son augmentation de capital dans le cadre de son plan de sauvetage, selon les agences italiennes, rendant plus probable une intervention de l'Etat.

La BMPS, plus vieil établissement financier de la planète, est le maillon faible du système bancaire italien, dont la fragilité inquiète les marchés.

A la suite de cette information, le titre de la Monte dei Paschi di Siena (BMPS) a été suspendu à plusieurs reprises dans l'après-midi, en raison de sa forte volatilité. Après avoir perdu jusqu'à 11,42%, il a fini en recul de 10,55% à 19,5 euros, dans un marché en baisse de 0,73%. Toutes les valeurs bancaires étaient en berne, dont BPM (-4,32%), Banco Popolare (-3,93%) et UniCredit (-2,34%).

Interrogées par l'AFP, BMPS et la BCE se sont refusées à tout commentaire sur cette information, qui pourrait encore aggraver la crise bancaire dans la péninsule.

Une source financière a indiqué pour sa part à l'AFP que la banque n'avait pas encore reçu de communication officielle de la BCE en milieu d'après-midi.

Le numéro un de BMPS, Marco Morelli, a été reçu vendredi au ministère des Finances, pour faire le point sur la situation, a déclaré à l'AFP une source proche du ministère.

Si le non de la BCE était confirmé, cela compromettrait le plan de sauvetage avec recours au marché. On se dirigerait vers un soutien de l'Etat, via "une recapitalisation préventive" qui inclurait une mise à contribution des détenteurs de titres.

La troisième banque italienne avait demandé mercredi à la BCE un délai jusqu'au 20 janvier --au lieu du 31 décembre-- pour mener son augmentation de capital, dans un contexte rendu compliqué par l'instabilité politique créée par la démission du chef du gouvernement, Matteo Renzi.

La Monte a affiché les pires résultats aux tests de résistance publiés fin juillet par l'Autorité bancaire européenne.

Pour redresser la situation, BMPS, dont le titre a chuté de plus de 80% depuis début 2016, a lancé un vaste plan de sauvetage prévoyant la cession de 27,6 milliards de créances douteuses et une augmentation de capital pouvant aller jusqu'à 5 milliards d'euros.

Le premier acte de ce plan, une opération de conversion volontaire d'obligations en actions, a déjà permis de récolter plus d'un milliard d'euros. Mais il reste 4 milliards d'euros à trouver.

- Protéger les petits épargnants -

L'augmentation de capital proprement dite devait être lancée mercredi ou jeudi derniers, selon le plan annoncé par M. Morelli en novembre.

Mais l'instabilité politique générée par la démission de M. Renzi, après la victoire dimanche du non au référendum constitutionnel, a changé la donne: celle-ci a refroidi les potentiels investisseurs, dont le fonds du Qatar Qia, avec qui la banque est en négociations avancées pour devenir son investisseur de référence, en mettant sur la table un milliard d'euros.

La banque souhaitait utiliser le délai, avec la mise en place d'un nouveau gouvernement, pour rassurer les investisseurs. Le marché espère la nomination de M. Padoan à la place de M. Renzi afin d'assurer une continuité.

D'après les agences italiennes, le conseil d'administration de la banque a débuté peu avant 17H00 (16H00 GMT).

En cas de soutien de l'Etat, l'opération menée serait "une recapitalisation préventive", mais le gouvernement cherche au maximum à préserver les petits épargnants, alors que de nombreux Italiens ont acquis des obligations subordonnées sans en connaître les risques.

Selon les nouvelles règles européennes, tout sauvetage d'une banque impose désormais en priorité une mise à contribution des actionnaires et détenteurs d'obligations subordonnées.

Pour protéger les petits épargnants, le gouvernement réfléchirait à racheter leurs obligations pour les convertir en actions. Une autre option serait la conversion de toutes les obligations en actions et un remboursement ensuite d'une partie des titres des particuliers, d'après la presse.

Questionnée à Bruxelles, la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, a déclaré jeudi qu'il existait, selon les règles européennes, la possibilité "pour les gouvernements de compenser des ventes abusives de différentes sortes" qui ont eu lieu.

Le système bancaire italien dans son ensemble est dans l'oeil du cyclone, en raison de son éclatement avec la présence de quelque 700 établissements différents, de l'importance des créances douteuses dans son portefeuille (360 milliards d'euros, soit près d'un tiers de la zone euro) et de problèmes de capitalisation.

Depuis début 2016, l'indice des banques italiennes a perdu près de 50% à la Bourse de Milan.

afp/rp