PARIS (Agefi-Dow Jones)--A la peine sur les contrats publics de gestion de l'eau en France, Veolia (>> Veolia Environnement) compte sur les besoins des industriels en services environnementaux, notamment dans les pays émergents, pour relancer sa croissance.

Alors qu'il a annoncé mardi un plan social pour son activité Eau en France, confrontée à des baisses de prix de plus de 20% en moins de 10 ans, le numéro un mondial du traitement de l'eau et des déchets mise sur l'essor des réglementations environnementales à l'international pour soutenir son activité dans les années qui viennent.

"Nous irons chercher la croissance organique partout où nous pourrons, mais d'abord dans les pays hors d'Europe, et d'avantage aussi avec les industriels parce que c'est là qu'il y a le plus de besoins", a expliqué son PDG Antoine Frérot mardi dans un entretien à l'agence Agefi-Dow Jones, en citant le traitement des déchets toxiques et le recyclage parmi les pistes de développement.

Le dirigeant a confirmé l'objectif d'un retour à la croissance du chiffre d'affaires de Veolia cette année, après une baisse de 2,3% l'année dernière. Amorcé fin 2016, le redressement de l'activité s'est confirmée au premier trimestre, avec des ventes en hausse de 4,5% à changes constants.

Veolia reste toutefois confronté à des "vents contraires" en Europe, et notamment en France, où la faiblesse de l'inflation conduit à une indexation négative des prix des contrats cette année.

Confrontés à une vague de renouvellement des contrats auprès des collectivités locales depuis 2010, les groupes du secteur ont surtout dû accepter de réduire leurs prix - et leurs marges - pour éviter une "remunicipalisation", soit un retour en régie publique de la gestion de l'eau. Les 572 suppressions d'emploi annoncées mardi s'ajouteront aux 943 départs volontaires homologués depuis 2014 au sein de la branche "eau" en France. Le groupe table également sur 987 "mobilités fonctionnelles et/ou géographiques" au sein de cette activité.

Début 2017, Veolia a relevé de 600 à 800 millions d'euros son plan d'économies sur la période 2016-2018 et reporté d'un an les objectifs financiers initialement fixés pour 2018. Fin mai, le groupe a également annoncé qu'il prendrait des mesures pour doubler la rentabilité opérationnelle de son activité "eau" en France d'ici à 2020, tout en maintenant son chiffre d'affaires à "au moins" 3 milliards d'euros, contre 2,9 milliards d'euros en 2016.

Répondre aux nouveaux besoins des industriels

Activité historique du groupe, Veolia Eau France représente aujourd'hui 10% seulement de son chiffre d'affaires. L'ancienne "Compagnie générale des eaux" compte désormais sur les efforts de lutte contre la pollution pour se relancer.

"L'un des principaux moteurs de nos métiers, c'est la réglementation de protection de l'environnement. Hors d'Europe le contexte est très favorable, notamment dans les pays émergents", souligne Antoine Frérot. "En Chine, les autorités savent que si elles ne prennent pas à bras le corps le problème de la pollution, c'est leur développement économique qui sera obéré. Mais cela concerne aussi bien l'Amérique Latine et le Moyen-Orient".

Même les Etats-Unis ne font pas exception, malgré la récente décision du président américain de quitter les accords de Paris: "Je ne pense pas que Donald Trump remettra en cause la législation américaine en matière d'environnement, même s'il ne la renforce pas", estime Antoine Frérot.

Pour se développer, Veolia vise en particulier les clients industriels, qui actuellement sous-traitent seulement 3% de leurs activités eau, énergie et propreté. Au Mexique, Nestlé s'est par exemple tourné vers le groupe français lorsque les autorités locales lui ont interdit d'approvisionner une de ses usines en eau naturelle. Veolia lui a alors permis d'utiliser l'eau extraite du lait de vache transformé en lait en poudre.

Renforcer le rôle pionnier de la France dans les services à l'environnement

En France, Antoine Frérot appelle le gouvernement à "pousser les feux du développement durable", dans le but de renforcer le leadership mondial de groupes comme Veolia et son rival Suez (>> Suez Environnement) dans les services environnementaux.

"La mine de matières premières que constituent nos déchets est extrêmement inexploitée. Et en matière d'efficacité énergétique, l'équation économique se boucle assez rapidement une fois qu'on prend en compte les externalités", pointe le dirigeant. Dans ce cadre, le gouvernement peut imposer des réglementations, mais également jouer sur la commande publique en favorisant les produits recyclés, suggère le PDG de Veolia. "Les premiers qui disposeront des technologies de l'économie circulaire en France seront les premiers à pouvoir les exporter à l'extérieur".

Pour se renforcer dans certaines technologies ou certaines régions du monde, le groupe pourrait réaliser des acquisitions moyennes, sans toutefois dépasser les 400 à 500 millions d'euros. Après avoir fortement réduit sa dette ces dernières années à travers des cessions d'actifs, Veolia serait en mesure de financer une acquisition transformante. "Mais je ne l'ai pas aujourd'hui sur ma table", affirme Antoine Frérot.

-Thomas Varela, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 99; tvarela@agefi.fr ed: ECH

Valeurs citées dans l'article : Veolia Environnement, Suez Environnement