Ségolène Royal a semé le trouble dans le secteur des concessionnaires autoroutier ce vendredi après l'annonce hier de la suspension sine die du projet d'écotaxe. La ministre de l'Ecologie a en effet ajouté à cette déclaration qu'elle estimait qu'un "prélèvement du profit des autoroutes" était sa priorité pour compenser le manque à gagner lié à ce qui ressemble fortement, selon les analystes, à l'abandon pur et simple de la nouvelle mouture de la taxe tant décriée. Ce vendredi, Eiffage abandonne ainsi 3,11% à 38,28 euros et Vinci cède 1,65% à 42,55 euros.


L'opposition des chauffeurs routiers et les difficultés à mettre en place le calcul et le prélèvement de l'écotaxe ont donc une nouvelle fois eu raison de celle-ci, au grand dam des partis écologistes. Mais l'alternative envisagée, c'est-à-dire la ponction d'une part des revenus des sociétés de concession autoroutières comme Vinci ou Eiffage-APRR dont Ségolène Royal a qualifié les revenus de "choquants", risque de se répercuter en fin de parcours sur l'usager.

Comme s'accordent à le dire les analystes ce vendredi, c'est en effet sur les tarifs des péages qu'un tel prélèvement se fera vraisemblablement sentir. Aurel indique d'ailleurs que le ministre des Finances Michel Sapin a signalé ce fait jeudi, et ajoute que les groupes de concessions s'acquittent déjà de la redevance domaniale (en hausse de 50% en 2013) et de la taxe d'aménagement du territoire qui pèsent par exemple à hauteur de 270 millions d'euros environ en 2014 pour APRR, soit 13% du chiffre d'affaires. Il voit en revanche dans la baisse des cours des titres des concessionnaires de bonnes opportunités d'investissement. Il reste à l'achat sur Eiffage et Vinci avec des objectifs de cours respectifs de 60 et 57 euros.

De son côté, Bryan Garnier a maintenu sa recommandation Neutre sur Vinci et Eiffage, avec des objectifs de cours respectifs de 53 et 50 euros dans une note sur le secteur. Même s'il estime qu'il y aura des compensations, il anticipe un effet négatif de 4 euros sur le titre Vinci et de 6 euros sur celui d'Eiffage si ce n'est pas le cas.

CM-CIC argue pour sa part que les deux groupes sont protégés par des textes de lois précis "qui s'imposent à la puissance publique quelle qu'elle soit", faisant de la relation entre les concessionnaires et l'Etat un système "gagnant-gagnant" dans lequel un mécanisme de compensation est prévu en cas de taxes imposées aux exploitants.

Et Kepler Cheuvreux d'enfoncer le clou : les contrats passés entre les pouvoir publics et les concessionnaires depuis la privatisation du secteur il y a huit ans sont solides et leur remise en cause sans compensations risque d'être difficile. Les groupes sont soumis à certaines obligations comme des investissements en infrastructures, et reçoivent en échange des compensations sous la forme de hausses des tarifs de péage adossées à l'inflation.

(E.B)

Valeurs citées dans l'article : VINCI, EIFFAGE