Âgé de 78 ans, homme fort de VW depuis plus de 20 ans, Ferdinand Piëch est le petit fils de l'inventeur de l'emblématique Coccinelle, Ferdinand Porsche.

Depuis plusieurs semaines, la crise couvait, et elle s'est accentuée lorsque Ferdinand Piëch a publiquement retiré son soutien à Martin Winterkorn.

Les manoeuvres orchestrées en coulisse par Ferdinand Piëch ont fini par lasser au sein du conseil de surveillance dont les membres craignaient qu'elles n'affaiblissent le groupe.

"Le président a unilatéralement plongé l'entreprise dans les pires turbulences possibles", disait cette semaine un représentant des salariés au conseil de surveillance. "Il devrait vraiment réfléchir à ce que cela implique pour lui et pour sa situation."

Isolé et contesté, Ferdinand Piëch a fini par perdre le soutien des représentants des salariés, du Land de Basse-Saxe, et même de son propre cousin Wolfgang Porsche qui s'est rangé derrière Martin Winterkorn.

DÉMISSION IMMÉDIATE

"Un consensus s'est fait au sein du comité de direction, si bien qu'à la lumière de ce qui s'est déroulé cette semaine, la confiance nécessaire pour une coopération fructueuse n'était plus là", annonce un communiqué.

Ferdinand Piëch a démissionné avec effet immédiat de toutes ses fonctions au sein de Volkswagen, tout comme son épouse Ursula, présente au conseil de surveillance depuis 2012.

"Le départ de Piëch est un séisme au sein de la structure de pouvoir de Volkswagen et il pourrait avoir des conséquences spectaculaires sur le fonctionnement d'un des premiers constructeurs automobiles au monde", écrit Karl Brauer, analyste senior chez Kelley Blue Book.

"VW a su rester dans les pas de General Motors et Toyota ces dernières années, dans une course à trois pour le titre de premier constructeur de la planète, mais VW est à la peine sur certains marchés, aux Etats-Unis et au Brésil par exemple, et sa marge bénéficiaire est inférieure à celles de GM et Toyota, ce qui montre qu'il reste du travail à faire."

Sorti vainqueur de son bras de fer avec Ferdinand Piëch, Martin Winterkorn, dont le mandat s'achève en 2016 voit augmenter ses chances de lui succéder, et, selon des sources haut placées dans l'organigramme de VW, c'était justement ce que le démissionnaire voulait éviter à tout prix.

CHAISES MUSICALES

Dans ce jeu de chaises musicales, il n'est pas exclu que le président du directoire de Porsche, Matthias Müller, prenne à son tour la place de Martin Winterkorn.

"Comment va-t-on remplir le vide laissé par le départ de Piëch ? Winterkorn va-t-il prendre la présidence (du conseil de surveillance) et Matthias Müller prendre le poste de président (du directoire) ? C'est possible", estime Stuart Pearson, analyste d'Exane BNP Paribas.

Reste que l'influence de Piëch pourrait continuer de s'exercer grâce aux 51% de droits de vote que détient le clan Piëch-Porsche au sein de Volkswagen, si tant est que les relations familiales déjà tendues ne tournent à la bataille rangée.

D'autant que ce que les questions soulevées par Ferdinand Piëch n'ont pas eu de réponse, à commencer par celle de l'incapacité du groupe à s'installer enfin sur le segment du low-cost.

Lorsqu'il est devenu président du directoire en 1993, VW perdait de l'argent et il n'a pas hésité à prendre des mesures draconiennes pour redresser la barre, en réduisant à la fois les salaires et le temps de travail sur les sites allemands tout en rationalisant la production.

Au cours des neuf ans qu'il a passés à ce poste, il a transformé une perte représentant l'équivalent d'un milliard d'euros en un bénéfice de 2,6 milliards tout en alimentant la croissance externe autour d'une douzaine de marques permettant au groupe d'être présent sur une multitude de segments, allant des poids-lourds de 40 tonnes aux véhicules dits "verts".

(Nicolas Delame pour le service français)