Francfort (awp/afp) - Le géant européen de l'automobile Volkswagen vient de franchir un cap important avec un accord sur le dédommagement de milliers de clients américains, mais est loin d'avoir fini de payer les pots cassés du scandale du diesel.

Le groupe allemand, propriétaire de douze marques parmi lesquelles Volkswagen, Audi, Porsche, Seat ou Skoda, a accepté de verser environ 15 milliards de dollars outre-Atlantique pour régler une partie du litige lié au "dieselgate".

Grâce à cet accord, très attendu, "le degré d'incertitude [des conséquences financières du scandale] est appelé à diminuer", a salué mercredi Holger Schmidt, analyste de la banque Equinet.

Jürgen Pieper, expert automobile de la banque Metzler, y voit également "une étape clé".

Mais d'après l'analyste, le compromis trouvé outre-Atlantique ne représente que près de la moitié des charges à prévoir pour en finir avec l'affaire du diesel, scandale au retentissement planétaire. L'analyste allemand table sur un coût total d'environ 20 milliards d'euros pour Volkswagen.

Ses confrères Frank Biller, de la banque LBBW, et Frank Schwope, de Nord/LB, pronostiquent 20 à 30 milliards.

Ces estimations sont bien en deçà des chiffres qui avaient circulé après l'éclatement du scandale, en septembre dernier, avec certaines estimations à 60 milliards. Mais elles dépassent les 16,2 milliards d'euros mis de côté en 2015 sous forme de provision, une charge qui a valu à Volkswagen sa première perte annuelle depuis plus de 20 ans.

Volkswagen devra remettre au pot avec de nouvelles provisions, selon les spécialistes. M. Biller parie sur 1,8 milliard d'euros au troisième trimestre 2016 (juillet-septembre).

Aux termes du plan dévoilé mardi et encore suspendu au feu vert de la justice américaine, les propriétaires de quelque 480.000 voitures truquées aux Etats-Unis pourront se faire racheter leur véhicule ou le faire réparer aux frais du constructeur et se verront verser une indemnité allant jusqu'à 10.000 dollars.

- Reins solides -

C'est outre-Atlantique qu'a éclaté le "dieselgate", qui a vu Volkswagen avouer le trucage de 11 millions de moteurs diesel dans le monde pour les faire passer pour moins polluants qu'ils ne le sont. C'est aussi aux Etats-Unis que les négociations ont été les plus ardues.

"L'accord semble très coûteux, mais 4 à 5 milliards de dollars ne seront pas déboursés", assure toutefois M. Pieper. La plupart des clients sont satisfaits de leur véhicule et ne chercheront pas à s'en débarrasser, ce qui portera la facture "plutôt à 10 milliards de dollars", explique-t-il.

Sur ce marché, le groupe est toujours sous le coup d'une enquête pénale et doit encore répondre du trucage de moteurs sur environ 100.000 véhicules de 3 litres de cylindrées qui ne sont pas inclus dans le compromis actuel.

Ailleurs dans le monde, Volkswagen est confronté à une kyrielle d'enquêtes judiciaires et de poursuites intentées par des clients floués et des investisseurs qui ont laissé des plumes dans la chute du titre en Bourse et réclament des milliards d'euros de dédommagement.

Sur le Vieux Continent, où Volkswagen n'entend pas dédommager financièrement ses clients, la grogne ne faiblit pas devant l'inégalité de traitement des consommateurs américains et européens.

Ces derniers sont traités comme "des clients de second rang" alors que plus de 8 millions de véhicules truqués se trouvent en Europe, s'est insurgé dans les colonnes du Handelsblatt mercredi Christopher Rother, un avocat qui représente des clients des deux côtés de l'Atlantique.

Volkswagen procède à des rappels pour une remise aux normes des véhicules, qui devraient lui coûter au moins un milliard d'euros, selon M. Pieper.

Financièrement, le géant allemand aux quelque 600.000 salariés et 200 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel a néanmoins les reins solides.

Il dispose d'une solide trésorerie et de lignes de crédit lui permettant, si nécessaire, de débourser jusqu'à 50 milliards d'euros sans avoir à vendre d'activités, souligne M. Pieper.

afp/al