"En décembre 2015, Muddy Waters Capital avait mis en garde le marché contre Casino, Rallye et leur management, en particulier Jean-Charles Naouri. Nous avions déclaré que Casino était en train d’être vidé de sa substance afin de supporter le fardeau de dette insoutenable des holdings situées au-dessus de lui. Nous avons également précisé que Casino était en train d'induire les investisseurs en erreur sur ses finances afin de perpétuer cette structure qui sert essentiellement les intérêts d'un seul individu : M. Naouri.
 
L'annonce, aujourd'hui, de l'entrée en procédure de sauvegarde de Rallye, Finatis, Euris et Foncière Euris, à cause de difficultés financières, marque probablement le début de la fin de cette structure de financement parasite de Casino depuis des années. C'est aussi une justification retentissante des avertissements que nous avons lancés en 2015. Cependant, nous ne nous réjouissons pas.
 
Depuis environ trois ans et demi que nous avons soulevé ces questions, M. Naouri a été autorisé à poursuivre le siphonage de Casino, de ses actifs et de ses liquidités. Si ce déshabillage avait été arrêté à un moment donné, Casino serait une entreprise plus forte qu’aujourd’hui. Cependant, au lieu de prêter attention au message, certaines personnes ont plutôt passé leur temps à se concentrer sur le messager. En raison de la poursuite du siphonage, Casino est plus vulnérable à la concurrence étrangère et sa capacité à assurer l’emploi de plus de 220 000 travailleurs est moins certaine. (N’oublions pas les banques françaises et les investisseurs qui ont perdu de l'argent dans Rallye et les autres sociétés holding.)
 
Indépendamment de la tentative de ces entreprises d'imputer leurs échecs à des "attaques spéculatives", ces procédures judiciaires sont la conséquence directe de la mauvaise gestion et de l'égoïsme de M. Naouri. C'est lui qui a ordonné à ces sociétés de se transformer de facto en folle structure de type hedge-fund. Les marchés financiers, dont il s'était autrefois fait le champion, n'ont fait que s'en rendre compte - malgré l’obscure comptabilité que ces sociétés employaient.
 
Fin de 2016, il nous a été clairement indiqué que M. Naouri avait obtenu le soutien de certaines personnes influentes. En conséquence, nous nous sommes sentis obligés de fermer nos positions de vendeur à découvert. Nous avons également annulé la publication d’un nouveau rapport sur Rallye et Casino. Une enquête de l’AMF (Autorité de Marchés Financiers) nous concernant est en cours. S'il est trop tôt pour savoir quel sera son résultat, il est clair que, jusqu'à aujourd'hui, la France est un lieu peu accueillant pour les investisseurs qui sont aussi des lanceurs d’alerte.
 
Il est essentiel pour les sociétés démocratiques que les gens puissent critiquer non seulement les politiciens, mais aussi ceux qui ont accès ou peuvent influencer les politiciens et les décideurs politiques.
 
Nous sommes sceptiques et notre scepticisme a malheureusement été étouffé. Le résultat est que les investisseurs, les prêteurs et les employés de Casino sont moins bien lotis parce que nous avons été bâillonnés, tandis que la prédation de M. Naouri a été autorisée à se poursuivre. Nous espérons que les procédures de sauvegarde qui en résultent renforceront Casino, préserveront, voire créeront des emplois. De plus, nous encourageons l'AMF à diriger davantage son focus sur les avertissements des sceptiques que sur les sceptiques eux-mêmes".

On rappellera que Casino n'est pas concerné par la procédure en cours : seuls ses actionnaires le sont. La procédure de sauvegarde se distingue du redressement judiciaire par l'absence de cessation des paiements. En d'autres termes, la société concernée dispose encore des ressources nécessaires pour poursuivre son activité, mais anticipe des difficultés à venir en s'inscrivant dans un cadre juridique plus protecteur. La sauvegarde est relativement récente. Son instauration en 2005 visait, notamment, à répondre aux résultats médiocres du redressement judiciaire en créant un régime de l'anticipation des difficultés.