(Répétition sans changement d'une dépêche diffusée dimanche)

par Rodrigo Campos

NEW YORK, 19 novembre (Reuters) - De nouveaux fonds indiciels permettent de parier sur le déclin de la distribution physique aux Etats-Unis face aux assauts d'Amazon.com mais les récents résultats de Wal-Mart et de Home Depot ont montré que les chaînes de magasins en dur avaient encore de beaux jours devant elles, pourvu qu'elles s'adaptent aux nouvelles tendances de consommation.

Alors que le "Black Friday", le vendredi qui suit la fête de Thanksgiving, va donner cette semaine le coup d'envoi de la période des achats de Noël, les investisseurs se voient proposer depuis jeudi dernier un ETF baptisé Decline of Retail Stores , qui permet de parier sur le déclin du commerce de détail classique, et un autre appelé Long Online Short Stores pour miser sur la suprématie du commerce en ligne.

Tous deux dupliquent en sens inverse l'indice Solactive-ProShares Bricks and Mortar Retail Store Index , lequel comporte 64 enseignes ayant à la fois des magasins physiques et une offre en ligne. Parmi elles figurent Barnes & Noble, Sears, Office Depot, Macy's et Wal-Mart.

Ce ne sont pas les premiers ETF pariant sur une disparition des distributeurs "brick and mortar" (en brique et mortier). Dès 2012, la firme de recherche Bespoke avait lancé son indice "Death by Amazon", qui compte actuellement 54 composantes.

La tendance en faveur des achats en ligne n'est pas nouvelle mais les ETF peuvent capitaliser sur du long terme, le commerce en ligne ne représentant qu'une fraction des ventes au détail.

"La pénétration du e-commerce n'est actuellement que de 10% alors il reste du chemin à parcourir", note Michael Sapir, directeur général de ProShare Advisors à Bethesda (Maryland). "Une minorité seulement de distributeurs classiques parviendront à faire la transition, qui sera coûteuse et douloureuse."

Depuis le début de l'année, l'indice S&P-500 du commerce de détail a progressé de 20% mais seulement la moitié de ses 29 composantes affichent des retours positifs. Amazon, dont le titre a gagné plus de 50% cette année pour clôturer vendredi à 1.129,88 dollars, a gagné à lui seul 192 milliards de dollars (163 milliards d'euros) de capitalisation boursière, sur un gain total de 230 milliards pour l'indice.

Le gérant Glen Kacher, dont le fonds spéculatif Light Street Capital Management affiche une performance positive de 53% sur la période janvier-octobre, a dit être vendeur à découvert sur "pratiquement chaque distributeur", pariant donc sur une baisse de leur cours de Bourse.

"Le secteur du commerce de détail va connaître l'apocalypse", prédit-il sans donner de nom. "Quiconque travaille dans ce secteur devrait songer à changer de métier."

Graphique sur la capitalisation boursière du secteur : (http://reut.rs/2zLFXiN)

CLIC ET MORTIER

Ce pessimisme est à relativiser cependant.

Les ventes au détail ont totalisé 4.780 milliards de dollars sur les neuf premiers mois de 2017 aux Etats-Unis, dont 484,4 milliards sur le seul mois de septembre, nouveau record mensuel, selon les données du département du Commerce.

Sur ce total de septembre, les ventes en ligne ont représenté 52 milliards, à peine plus de 10%.

La Fédération nationale du Commerce de détail (NRF, National Retail Federation) prévoit que 164 millions d'Américains feront des achats pendant le week-end de Thanksgiving, en comprenant le "Cyber Monday" qui le prolonge depuis quelques années.

Les résultats publiés par les distributeurs montrent que les magasins physiques ont encore de l'avenir. Le géant des hypermarchés Wal-Mart a ainsi fait état jeudi de la plus forte croissance de son chiffre d'affaires trimestriel depuis 2009, grâce entre autres à ses ventes en ligne.

La combinaison d'une offre en ligne et d'un accès facile en magasin - le "click and mortar" (clic et mortier) - permet de fait à des acteurs traditionnels du secteur de survivre en laissant leurs clients faire leurs courses sur internet puis passer prendre leurs achats en magasin.

Les résultats ont propulsé l'action Wal-Mart à de nouveaux records, tout comme ceux de Home Depot, le numéro un du bricolage qui a relevé ses prévisions de bénéfice et de chiffre d'affaires pour 2017 au vu d'un troisième trimestre meilleur que prévu.

Avec des réseaux de 5.000 magasins aux Etats-Unis pour Wal-Mart et de plus de 2.200 pour Home Depot, ces deux enseignes semblent bien armées pour résister à la vague du e-commerce, estiment les analystes.

"Wal-Mart est en train de se transformer en concurrent majeur d'Amazon", va jusqu'à dire Chad Morganlander, gérant chez Washington Crossing Advisors à Florham Park (New Jersey).

"Notre conviction est qu'il y aura des vainqueurs en brique et que beaucoup de distributeurs en ligne vont commencer à chercher à être plus traditionnels."

Les autres distributeurs qui pourraient tirer leur épingle du jeu sont ceux qui occupent des niches où ils peuvent espérer maintenir des marges confortables, à l'opposé de la tendance à la guerre des prix sur internet.

"Amazon, c'est pour le marché de masse et on y va quand on sait exactement ce qu'on va commander", observe Kim Forrest, analyste chez Fort Pitt Capital Group à Pittsburgh.

"Les courses de Noël, c'est pour acheter des cadeaux qui comptent. Un bon distributeur doit savoir répondre à cette envie." (avec la contribution de Jennifer Ablan, Véronique Tison pour le service français)