par Saqib Iqbal Ahmed

NEW YORK, 24 septembre (Reuters) - Le pari sur une faiblesse de la volatilité sur les actions américaines continue de séduire les investisseurs après une phase prolongée d'absence de mouvements brusques sur les indices de référence de Wall Street mais intervenants de marché et stratégistes préviennent que les risques de cette position longtemps lucrative ont augmenté.

La volatilité des actions américaines, mesurée par l'amplitude de leurs fluctuations quotidiennes, a évolué à des plus bas records pendant la majeure partie de cette année.

L'indice Vix du CBOE, une mesure des fluctuations attendues du S&P 500, un des indices boursiers de référence de Wall Street, ressort en moyenne à 11,4 cette année, son plus bas niveau pour toutes les périodes comparables depuis près de trente ans qu'il est calculé.

Des résultats d'entreprise solides, une croissance économique robuste et la conviction que les banques centrales seront toujours là en cas de turbulences ont contribué à limiter les forts décalages sur les marchés et à garantir le succès des paris à la baisse de la volatilité.

La valorisation du titre coté VelocityShares Daily Inverse Vix Short Term, dont le cours augmente lorsque la volatilité baisse ou reste stable a pratiquement doublé depuis le début de l'année.

Des intervenants de marché mettent toutefois en garde contre les risques accrus de positions pariant ainsi sur la baisse de la volatilité.

"Je pense que beaucoup ont été séduits par une sécurité illusoire parce que la vente à découvert (de volatilité) a si bien marché pendant si longtemps", a dit Matt Thompson, qui codirige Velocity Group chez le gérant d'actifs Typhon Capital.

"Nous continuons à vendre de la volatilité à découvert mais il faut être beaucoup plus réactif."

PRÈS DE $3 MDS D'ENCOURS

S'il y a de nombreuses manières de vendre la volatilité à découvert, la hausse des encours des produits cotés (ETPs) sur volatilité est une bonne mesure de l'engouement des investissements pour cette opération.

Les actifs cumulés des deux principaux ETPs permettent de prendre une position vendeuse à découvert sur le Vix atteignent 2,8 milliards de dollars et leur exposition à la baisse de la volatilité est à un plus haut record, selon Barclays Capital.

Mais l'engouement des investisseurs est en lui-même un facteur de risque.

Les ETPs pariant sur la baisse de la volatilité détiennent des contrats à terme à échéance un ou deux mois sur l'indice Vix, les achetant et les vendant quotidiennement pour ajuster leur exposition en fonction de l'évolution de la volatilité du marché.

Les gérants de ces ETPs à effet de levier et inverses sont ainsi contraints d'acheter des contrats à terme quand leur cours monte et de les vendre quand il baisse.

Des stratégistes soulignent que ce nécessaire rééquilibrage des positions - qui doit être d'autant plus important qu'un brusque mouvement de marché intervient après une période de calme inhabituelle - risque de jeter de l'huile sur le feu.

"Il pourrait y avoir un effet de rétroaction dans lequel les ventes appellent les ventes", avertit Salil Aggarwal, stratégiste sur les dérivés actions chez Deutsche Bank.

"Les impératifs en termes de rendement/risque impliqueraient de réduire les positions à des niveaux plus gérables", ajoute-t-il.

RISQUE ET RENDEMENT

Le rendement attendu sur ce type de position n'est plus aussi attractif que dans le passé récent, relève par ailleurs Anand Omprakash, directeur de la stratégie actions et dérivés de BNP Paribas.

La rémunération sur les positions de vente à découvert de la volatilité est actuellement légèrement inférieure à sa moyenne historique sur la période de janvier 2013 à aujourd'hui et environ 6% inférieure à ce qu'elle était à la mi-2016, selon les estimations d'Anand Omprakash.

"Vous étiez nettement mieux rémunéré sur la majeure partie de 2016 que vous ne l'avez été sur la majeure partie de 2017", a-t-il dit.

"Je ne dirais pas nécessairement que la position a perdu de son intérêt mais je ne pense pas qu'elle offre le même niveau de rendement ajusté du risque que l'année dernière."

Et les risques sont élevés, estiment des stratégistes qui préviennent qu'un ou deux chocs majeurs peuvent annihiler des mois de profits.

L'ETP à effet de levier et inverse XIV a ainsi chuté de 11,4% en août avec le brusque regain de volatilité provoqué par les inquiétudes géopolitiques liées à la Corée du Nord et par les incertitudes sur la capacité du président américain à faire adopter par le Congrès ses mesures de relance budgétaire et fiscale.

"Le couple rendement/risque associé à la détention durable d'une position vendeuse à découvert de volatilité n'est pas le même que ce qu'il était avant les élections américaines, en plein effondrement des cours du pétrole en 2015 ou encore au début de l'année 2016", prévient Stephen Aniston, président de Black Peak Capital.

S'il y a peu de candidats prêts à parier sur une brusque envolée de la volatilité, mieux vaut désormais éviter de trop la vendre à découvert, estiment ainsi nombre d'intervenants de marché.

(Avec avec Terence Gabriel; Marc Joanny pour le service français, édité par Catherine Mallebay-Vacqueur) )