Les sénateurs républicains ont enfin adopté dans la nuit de vendredi à samedi leur propre projet de réforme fiscale et il leur faut désormais s'entendre avec leurs homologues de la Chambre des représentants sur cet ensemble de baisses d'impôts massives exigé par le président Donald Trump, qui entend promulguer une loi avant la fin de l'année.

Parallèlement, les élus au Congrès américain doivent parvenir à un compromis budgétaire d'ici le 8 décembre, soit vendredi, pour permettre un relèvement du plafond de la dette américaine sans lequel les agences fédérales risquent de devoir fermer.

A cela s'ajoutent les rebondissements possibles dans l'enquête sur une éventuelle ingérence de la Russie dans l'élection présidentielle américaine de novembre 2016, qui pollue la présidence de Donald Trump.

Le 12 décembre, enfin, a lieu une élection pour un poste de sénateur dans l'Alabama, un Etat traditionnellement républicain mais où le candidat du Grand Old Party, Roy Moore, est fragilisé par des accusations d'agressions sexuelles qu'il rejette.

Face à ces risques politiques, les investisseurs restent globalement de marbre.

"Pour le moment, le marché présume que l'ensemble du puzzle va se mettre en place, mais il manque encore beaucoup de pièces", dit Phil Orlando, responsable de la stratégie sur les marchés d'actions chez Federated Investors à New York.

LE S&P-500 A DÉJÀ PRIS 18% EN 2017

Si Donald Trump s'est réjoui samedi des avancées sur les baisses d'impôts, il prévenait quatre jours plus tôt sur Twitter qu'il ne s'attendait pas à un accord sur le relèvement du plafond de la dette d'ici le 8 décembre. La Maison blanche a tenté de rectifier le tir le lendemain en disant ne pas croire à une telle issue.

La menace d'une paralysie partielle de l'Etat fédéral ("shutdown") devrait normalement amener les gérants de fonds à transformer davantage d'actifs en liquidités. L'indice de référence des investisseurs, le S&P-500, a ainsi reculé de 2,6% sur les huit séances ayant précédé le dernier "shutdown" en 2013 et il a perdu en moyenne 0,6% durant ces différentes périodes passées de fermeture des agences fédérales, selon LPL Financial.

Les inquiétudes sur le plafond de la dette devraient cependant être mises de côté jusqu'en 2018, le Trésor américain étant susceptible de prendre des mesures techniques pour continuer à financer le fonctionnement de l'Etat fédéral dans l'attente d'une initiative du Congrès.

Le S&P-500 a toutefois déjà grimpé de 18% depuis le début de l'année et certains gérants de portefeuilles pensent que cela constitue une bonne raison de se mettre provisoirement à l'écart du marché d'actions.

Depuis l'élection de Donald Trump et ses promesses de baisses d'impôts, rien n'a arrêté la hausse de Wall Street, ni les tensions croissantes autour du programme nucléaire nord-coréen, ni le feuilleton autour des soupçons de collusion entre l'équipe de campagne du président américain et la Russie.

CORRECTION DE 10% POSSIBLE, MAIS PASSAGÈRE

La Bourse de New York s'est certes nettement repliée vendredi à la suite d'informations d'ABC, que la chaîne de télévision a ensuite retirées, selon lesquelles l'ancien conseiller à la sécurité nationale de la Maison blanche Michael Flynn était prêt à mettre en cause Donald Trump dans cette enquête russe. Wall Street a vite effacé une partie de ses pertes avec la perspective d'un vote favorable du Sénat à des baisses d'impôts.

Phil Orlando, de Federated Investors, dit avoir bien conscience de tous ces risques et pourtant, il ne se retire pas complètement du marché, en grand partie parce que les bénéfices des entreprises ne cessent de gonfler et que, à ses yeux, ils continueront à le faire même sans baisses d'impôts.

En cas d'échec de la réforme fiscale, Phil Orlando voit le S&P-500 perdre jusqu'à 10%. Dans ce cas, il sera acheteur car il s'attend à voir l'indice de référence atteindre les 3.000 points d'ici 18 mois.

Brian Peery, gérant de portefeuilles chez Hennessy Funds, partage cette vision. Un "shutdown" ou un échec de la réforme fiscale provoqueront un brusque mouvement de ventes mais l'amélioration de la confiance du consommateur américain va au bout du compte porter le marché encore plus haut dans l'année à venir, pense-t-il.

"Si j'envisage une correction de 10%, je suis acheteur", dit-il.

(Bertrand Boucey pour le service français)

par David Randall