Pour Florent Delorme, analyste macro chez M&G, la tendance devrait rester positive sur les marchés actions dans les prochains mois. Certes, certains risques existent mais aucun ne semble de taille à provoquer une correction importante des indices. Entretien.

AOF - Depuis plusieurs jours maintenant, l'euro est au-dessus d'1,15 dollar. Dans quelle mesure cet affermissement pourrait-il représenter un risque pour la zone euro ?

F.D -
Il est évident que la faiblesse de l'euro est l'un des facteurs expliquant le redémarrage de la croissance auquel nous assistons en Europe. Mais il n'est pas le seul : le cours du pétrole, qui reste bas, est positif également car il soutient la consommation. D'ailleurs, les indicateurs de confiance des ménages sont très bons. D'autre part, la BCE veille et ne laissera évidemment pas l'euro s'apprécier trop fortement. Au pire, la hausse de la devise pourrait représenter un risque de quelques dixièmes de points de croissance, pas plus, et ne fait pas du tout peser un risque systémique sur les marchés.

AOF - La baisse du dollar est liée notamment aux incertitudes entourant les projets de Donald Trump...

F.D -
Sur ce plan là non plus, la situation ne semble pas très menaçante. Le marché n'a jamais vraiment cru au risque protectionniste lié à l'élection de Donald Trump et, désormais, il semble écarté. Les actes sont finalement restés limités en dépit des paroles fortes de la campagne. S'agissant d'un éventuel remplacement de Trump par le vice-président Mike Pence suite à une procédure d' "impeachment", cela ne serait pas de nature à provoquer une baisse durable des marchés.

AOF - Lorsque l'on regarde les marchés sous l'angle des risques, nombre d'observateurs évoquent l'endettement important des entreprises chinoises et américaines. Qu'en pensez-vous ?

F.D -
Il ne me semble pas que le volume de dette corporate représente un risque  susceptible de faire s'effondrer les marchés. Ces derniers mois, la hausse des résultats des entreprises a stabilisé les ratios d'endettement dette / EBITDA aux Etats-Unis. De plus le mouvement de hausse de taux de la FED sera lent et de faible ampleur. Le maintien de taux d'intérêt bas contribue ainsi à maintenir la situation sous contrôle.
Par ailleurs, concernant la Chine, la dette corporate a beaucoup augmenté mais elle est essentiellement émise par des entreprises publiques ou détenue par des banques publiques. Elle s'apparente donc presque à de la dette souveraine. En cas de problème, on peut donc envisager une intervention de la banque centrale. L'autre question est de savoir quel est le niveau d'engagement du système bancaire sur la dette corporate. Aux Etats-Unis, par exemple, il n'est pas si important que cela car la désintermédiation a été privilégiée après la crise.

AOF - Au final, vous êtes optimiste pour les marchés actions ?

F.D -
On ne voit pas ce qui pourrait provoquer une correction importante. Les marchés actions devraient donc continuer à progresser même si leur potentiel de hausse est sans doute limité pour les six prochains mois. Il faudrait une forte reprise de la croissance des bénéfices des sociétés pour repartir fortement.

Propos recueillis par Edouard Lacoste Lagrange