Johannesburg (awp/afp) - Le fort recul du PIB sud-africain au premier trimestre (-1,2%) fait de nouveau planer le spectre d'une récession sur l'économie la plus industrialisée d'Afrique qui tourne au ralenti depuis près de deux ans, minée par la chute des cours des matières premières et une sécheresse exceptionnelle.

Après cette baisse surprise du PIB publiée mercredi, les chiffres du deuxième trimestre publiés en août seront scrutés avec attention, alors que l'Afrique du Sud pourrait connaître sa première récession (deux trimestres consécutifs de baisse) depuis 2009, à l'époque du pic de la crise financière mondiale.

En 2014, à cause de grèves à répétition et en 2015 en raison de coupures récurrentes d'électricité, l'Afrique du Sud avait déjà été au bord de la récession, mais l'avait à chaque fois évitée de justesse.

Cette fois, le ralentissement de la demande chinoise, le principal pays partenaire économique de l'Afrique du Sud, la chute des cours des matières premières et la grave sécheresse qui frappe la région depuis deux ans sont à l'origine des déboires de l'économie sud-africaine.

"C'est la plus faible croissance enregistrée depuis le deuxième trimestre 2015 et cela accentue le risque de voir une récession pour l'économie cette année", affirme Laura Campbell, économiste pour le cabinet de conseil Econometrix.

Le secteur minier a enregistré un très fort recul de son activité au premier trimestre (-18,1%) particulièrement dans le platine et le fer tandis que le secteur agricole est également en forte baisse (-6,5%).

"Les perspectives restent relativement sombres", note la banque sud-africaine Nedbank dans une analyse publiée mercredi.

"Le secteur agricole ne devrait pas rebondir compte tenu de l'impact durable de la sécheresse. La demande mondiale morose, les bas prix des matières premières et les coûts de production élevés devraient persister et peser sur les secteurs miniers et manufacturiers", poursuit Nedbank, évoquant de probables restructurations à venir.

- Chômage endémique -

En février, le géant minier du platine Anglo American avait annoncé la suppression prochaine de 2.000 emplois dans deux de ses mines en Afrique du Sud. L'an dernier, 6.000 employés avaient perdu leur travail chez Lonmin, le rival d'Anglo American.

Avec le recul du PIB sud-africain de 0,2% par rapport au premier trimestre 2015, aucun indicateur de l'économie du pays n'incite à l'optimisme.

L'Afrique du Sud fait face à un chômage endémique qui approche 27% et près de la moitié des jeunes, l'inflation dépasse 6% et le rand sud-africain a perdu plus d'un quart de sa valeur contre le dollar en deux ans.

Pour contrer l'inflation et la chute du rand, la banque centrale a augmenté en mars ses taux directeurs à 7%, au plus haut depuis six ans.

"Nous anticipons une nouvelle hausse d'un quart de point dans la deuxième moitié de l'année", prévoit Nedbank.

Outre les facteurs extérieurs sur lesquels l'Afrique du Sud a peu de marge de manoeuvre, l'opposition accuse le président Jacob Zuma d'être responsable de la morosité de l'économie nationale.

Dans leur ligne de mire, l'imbroglio de décembre 2015 provoqué par la succession de trois ministres des Finances en moins d'une semaine entraînant l'affolement des marchés.

Et les relations réputées tendues entre M. Zuma et son actuel ministre des Finances Pravin Gordhan n'aident pas à rassurer les investisseurs.

Pour 2016, le Fonds monétaire international et la Banque centrale estiment que la croissance ne dépassera pas 0,6% tandis que la banque Nedbank prévoit une hausse annuelle du PIB de seulement 0,2%.

Malgré ces mauvaises nouvelles, l'Afrique du Sud a évité mercredi une dégradation de sa note souveraine par l'agence Fitch qui l'a maintenue à BBB- et annoncé des perspectives "stables".

La semaine dernière, l'agence de notation Standard and Poor's Global Ratings avait également maintenu à BBB- la note de l'Afrique du Sud, mais avec des perspectives "négatives".

Pour ces deux agences, le pays reste un cran au-dessus des catégories spéculatives, un statut qui dissuade de nombreux investisseurs internationaux d'acheter des obligations souveraines.

afp/rp