* L'Etat islamique a revendiqué l'attaque

* La plupart des victimes sont étrangères, dit l'armée

* Neuf Italiens tués, un n'a pu être contacté

* Treize otages sauvés dont un Japonais et deux Sri-Lankais

* La police a donné l'assaut au bout de 12 heures (Actualisé avec précisions sur le bilan)

par Serajul Quadir et Ruma Paul

DACCA, 2 juillet (Reuters) - Vingt personnes, dont neuf Italiens, sept Japonais et un Américain, ont été tuées vendredi soir à Dacca par un commando islamiste qui a fait irruption dans un restaurant de la capitale bangladaise, avant que les forces de l'ordre ne donnent l'assaut, 12 heures après.

L'Etat islamique a revendiqué le massacre, mais sa responsabilité reste à confirmer.

"Que le peuple des pays croisés sache qu'il ne pourra être en sécurité tant que ses avions tueront des musulmans", dit le mouvement dans un communiqué illustré d'une photo censée montrer cinq de ses membres impliqués dans la tuerie.

La Première ministre bangladaise, Sheikh Hasina, a décrété deux jours de deuil national.

Jusqu'à présent, les djihadistes bangladais s'en prenaient plutôt à des individus isolés, adeptes d'un mode de vie laïque dans un pays majoritairement musulman.

Quand ils ont fait irruption, vendredi soir vers 21h00, dans le restaurant chic très fréquenté du quartier diplomatique de Dacca, les assaillants ont ordonné à tous les Bangladais de se lever puis ont commencé à tuer les étrangers, dit-on de source proche de l'enquête.

Parmi les morts figure la femme d'un homme d'affaires italien tuée à la machette. Elle a été trouvée par son mari s'est ensuite caché derrière un arbre, près du restaurant, a déclaré à Reuters une de ses amies qui vit à Dacca et s'est entretenue avec lui.

Neuf Italiens figurent donc parmi les tués et on est sans nouvelles d'un dixième, a annoncé leur ministre des Affaires étrangères. Tokyo et New Delhi ont par ailleurs confirmé la mort de sept Japonais et d'une étudiante indienne de 19 ans. A Washington, le département d'Etat a annoncé celle d'un Américain.

Les autorités bangladaise n'ont pas communiqué la nationalité des victimes. Selon un porte-parole de l'armée bangladaise, la plupart ont été tuées à l'arme blanche.

Les forces de l'ordre, qui ont mis fin à la prise d'otages samedi matin, ont pu libérer treize personnes dont deux Sri-Lankais et un Japonais.

UN DES ASSAILLANTS CAPTURÉS

Le Japonais qui a été sauvé dînait avec sept compatriotes qui tous étaient consultants pour un organisme nippon d'aide au développement, a indiqué un porte-parole du gouvernement japonais. Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a fait part de son "indignation pour cet acte de terrorisme inhumain et méprisable".

Six assaillants ont été tués et un septième a été capturé, a déclaré Sheikh Hasina à la télévision à l'issue l'assaut des forces de l'ordre mené par un centaine d'hommes. Deux policiers ont été tués en début de soirée.

L'Etat islamique a diffusé des photos de corps étendus au sol. Leur authenticité n'a pas été confirmée.

Selon un conseiller du Premier ministre, Gowher Rizvi, les forces de l'ordre ont tenté de négocier avec le commando.

L'attaque a débuté quand des agents de sécurité du quartier de Gulshan, fréquenté par les expatriés, ont remarqué plusieurs hommes armés devant un centre médical, a déclaré le conseiller du Premier ministre.

Quand les gardes se sont approchés, les suspects se sont précipités dans le bâtiment où se trouve le restaurant. Le local était bondé, plusieurs personnes attendaient pour avoir une table, a-t-il expliqué.

Selon Ali Arsalan, copropriétaire du restaurant qui s'appuie sur le récit de ses employés, les assaillants ont crié "Allahou Akbar" (Dieu est le plus grand) au moment où ils ont fait irruption dans le bâtiment où se trouve le Holey Artisan Backery, qui était apparemment fermé à ce moment-là, et le O'Kitchen Restaurant à l'étage.

RAFALE DE BALLES

Ils ont échangé des tirs avec les forces de l'ordre pendant plusieurs heures. Quand les policiers ont tenté d'entrer dans le bâtiment au début du siège, ils ont essuyé des tirs en rafales et des jets de grenades qui ont coûté la vie à deux policiers.

Un employé du restaurant ayant réussi à s'échapper a raconté à la télévision bangladaise qu'une vingtaine de clients pour la plupart étrangers étaient attablés à ce moment-là. Du côté du personnel, il y avait 15 à 20 personnes, a-t-il ajouté.

Les violences islamistes qui secouent le Bangladesh depuis dix-huit mois ont coûté la vie à des défenseurs des libertés, des homosexuels ou des membres de minorités religieuses.

Vendredi, un prêtre hindou a été tué à coups de machette dans un temple du district de Jhinaidah, à 300 km environ au sud-ouest de Dacca.

L'Etat islamique ou Al Qaïda ont beau avoir revendiqué la plupart de ces assassinats, les autorités bangladaises estiment qu'il n'existe aucun lien opérationnel entre les islamistes du Bangladesh et les réseaux djihadistes internationaux.

Pour les responsables de la sécurité du pays, deux groupes locaux, Ansar al Islam et Jamaat-ul-Mujahideen, sont responsables des violences récentes. Ansar a prêté allégeance à Al Qaïda tandis que Jamaat-ul-Mujahideen affirme représenter l'Etat islamique.

"En résumé, le Bangladesh compte de nombreux extrémistes, souvent sans affiliation, qui sont ravis de commettre des attaques au nom de l'Etat islamique", déclare Michael Kugelman, spécialiste de l'Asie du Sud au Wilson Centre à Washington.

L'Etat islamique a revendiqué davantage d'attaques au Bangladesh qu'au Pakistan ou en Afghanistan, relève-t-il.

De nombreux étrangers travaillent au Bangladesh pour des multinationales de l'industrie textile. Le secteur de l'habillement représente 15% environ de l'activité économique au Bangladesh qui est le deuxième exportateur textile au monde derrière la Chine. (Avec Krishna Das, Tom Lasseter, Rupam Jain, Tommy Wilkes et Aditya Kalra à New Delhi, Isla Binnie à Rome, Melissa Fares à New York et Stanley White à Tokyo; Julie Carriat, Jean-Stéphane Brosse, Danielle Rouquié et Jean-Philippe Lefief pour le service français)