Certes, cette situation n’est pas nouvelle car la société Sohu (un équivalent de YouTube) avait tenté l’expérience de la bourse américaine en 2000, puis, plus tard, en 2005, c’est Baidu qui venait sur le « pit » new yorkais.

Ces premières introductions furent souvent une belle réussite, en témoignent les parcours boursiers qualifiés parfois d’exceptionnels. Sohu a vu son titre progresser de 300 % en 14 ans et Baidu (l’équivalent de Google) a explosé toutes les statistiques avec une progression de 1800 % en 9 ans.

Ces belles chinoises veulent non seulement concurrencer les stars américaines mais également réussir boursièrement sur leur terrain. Les investisseurs restent à ce jour très attirés par ces compagnies du nouveau monde qui, passé un temps, repoussaient plutôt la clientèle institutionnelle, suite à des fraudes qui s’étaient produites dans plusieurs affaires. Longtop Financial et Sino Forest (en 2011) avaient truqué ou gonflé les chiffres comptables, ce qui avait poussé les autorités américaines à radier les titres de la cote. Depuis le début d’année, c’est une douzaine d’introductions chinoises à Wall Street ; citons Jd.com, un distributeur internet, qui gagne encore 20 % malgré la récente baisse des cours et Weibo (un réseau social).

Les raisons principales de cet engouement pour les introductions à la bourse de New York se trouvent dans la souplesse des règles du marché des actions américaines aux antipodes des contraintes des autorités chinoises et hongkongaises. De plus, l’accès reste plus facile aux investisseurs institutionnels que sur les places asiatiques et la cotation sur le Nasdaq leur procure une réelle exposition mondiale.


Alibaba et les superlatifs

Alibaba s’est donc introduit en réalisant la plus importante « IPO » de l’histoire avec 26 milliards de dollars mis sur le marché. Quel contraste avec son concurrent américain Amazon. La compagnie outre-Atlantique vient d’annoncer une perte de 126 millions de dollars pour le dernier trimestre et l’action a cédé plus de 20% depuis le début d’année alors que pendant ce temps, Alibaba gênerait 2 milliards de profits. Le jour de l’introduction sa capitalisation dépassait de 1.5x celle de la compagnie de Jeff Bezos .
Les particuliers ont pratiquement été exclus de cette introduction puisque la majorité du flottant mise sur le marché a été allouée à une vingtaine d’institutionnels qui ont vu en une seule journée leur investissement prendre 38%. Alibaba n’exerce pas aux Etats Unis et les particuliers chinois qui sont les clients du site marchand ne peuvent donc devenir actionnaires.

En revanche, Softbank et Yahoo sortent grands gagnants de l’introduction. Le premier, groupe japonais en télécommunications possède 34% du capital. Sa mise de départ initial de 80 millions de dollars s'est soudainement valorisée à plus 30 milliards de dollars, après la cotation. La société nippone n’a, d’ailleurs, rien vendu sur le marché. Ce ne fut pas le cas de Yahoo qui détenait 22% dans Alibaba et qui a cédé un tiers de sa participation, pour engendrer 8 milliards de cash.

Après cette gigantesque IPO qui efface le précédent record de Visa (19.7 milliards), le géant chinois se place dorénavant parmi les plus grandes sociétés au monde.
Reste à savoir si cet engouement va perdurer chez les investisseurs car d’autres compagnies chinoises sont prêtes à venir fouler le parquet de la bouse de New York, en espérant qu’elles soient aussi qualitatives et pleines de promesses de croissance.