Rio de Janeiro (awp/afp) - Le Brésil fait profil bas face à l'expiration dimanche d'une clause d'adhésion de la Chine à l'OMC qui lui permettra de devenir une "économie de marché", mais une bonne partie des industriels rejettent vivement cette perspective.

"La Chine n'est pas une économie de marché!", affirme la puissante Confédération brésilienne des Industries (CNI) dans un communiqué envoyé à l'AFP.

"En Chine, il y a encore des secteurs avec des prix artificiellement bas en raison des interventions de l'Etat dans l'économie", souligne le directeur de développement industriel de la CNI, Carlos Abijaodi.

Le Brésil a reconnu en 2004 la Chine comme une économie de marché mais des sources gouvernementales expliquent qu'il s'agit "d'une reconnaissance politique" qui ne concerne pas les questions commerciales.

La Chine est le principal partenaire commercial du Brésil: les transactions bilatérales ont totalisé 66,3 milliards de dollars en 2015, avec un excédent de 4,9 mds USD favorable au pays asiatique.

Dans ces conditions, il est difficile de bouder Pékin.

"C'est une situation très délicate, d'ordre politique, parce que la Chine a une grande participation dans le commerce international", a déclare M. Abijoadi à l'AFP.

"Certains secteurs n'ont pas de problèmes avec les produits chinois, comme par exemple celui des produits électroniques qui ont des prix compatibles avec les prix normaux. Mais il y a des problèmes avec d'autres produits manufacturés qui parfois ont des prix inférieurs à ceux de leurs matières premières", souligne l'économiste.

Selon une étude citée par la CNI dans un rapport qu'elle diffusera lundi, la reconnaissance de la Chine comme "économie de marché" pourrait provoquer une "perte immédiate de 66.000 emplois directs et indirects pour la seule année qui suivra cette reconnaissance et des pertes directes et indirectes de 18 milliards de dollars"

Le rapport rappelle que des 358 mesures antidumping appliquées par le Brésil depuis 1968, 106 sont dirigées contre des exportations chinoises. Et parmi les mesures antidumping actuellement en vigueur, plus d'un tiers concerne les produits "Made in China".

Le 11 décembre marque le quinzième anniversaire de l'adhésion de la Chine à l'Organisation mondiale du commerce. Aux termes de son protocole d'adhésion, les pays membres de l'OMC pouvaient jusqu'à cette date traiter Pékin comme une "non-économie de marché", avec pour conséquence pratique de pouvoir lui imposer de lourdes taxes antidumping, au motif que les prix pratiqués en Chine ne reflètent pas la réalité du marché.

Au bout de ces quinze ans, qui prennent fin dimanche, une partie de ces dispositions cesseront d'être valables et chaque pays discutera de ce qu'il devra faire face à un pays qui est devenu, de façon météorique, la deuxième économie mondiale et le premier exportateur de la planète.

Pour Pékin, les choses sont claires: à partir du lundi 12 décembre, ses produits devraient avoir le même accès aux marchés que ceux de n'importe quel autre pays membre plein de l'OMC.

Au Brésil, l'heure est à la prudence, dans l'attente des décisions que prendront l'Union européenne et les Etats-Unis.

"Il est difficile d'avoir une position très explicite. Nous verrons quelle sera la réaction de la Chine quand un pays prendra une mesure antidumping à l'OMC", a assuré M. Abijaodi.

afp/rp