FRANCFORT, 20 janvier (Reuters) - La médiatrice de l'Union européenne, Emily O'Reilly, a ouvert une enquête sur la participation du président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, et d'autres hauts responsables de la BCE aux travaux d'un cercle de réflexion dont sont membres des banquiers et des gestionnaires de fonds.

Les investigations de la médiatrice portent sur les liens entre plusieurs responsables de la BCE et le Groupe des Trente (G30), qui organise des réunions à huis clos entre décideurs politiques, économistes, banquiers et gérants pour débattre de questions économiques et monétaires.

L'enquête a été ouverte à la suite d'une plainte de l'organisation non-gouvernementale Corporate Europe Observatory, qui estime que la proximité entre des responsables de la banque centrale et le G30 est incompatible avec le statut d'autorité de tutelle du secteur bancaire de la BCE.

Parmi les membres du G30 figurent plusieurs responsables ou ex-responsables de banques centrales, comme le gouverneur de la Banque d'Angleterre, Mark Carney, et celui de la Banque du Japon, Haruhiko Kuroda, ou encore le prix Nobel d'économie Paul Krugman. Mais des dirigeants de banques privées, tels qu'Axel Weber pour UBS ou Jacob Frenkel pour JPMorgan, participent aussi aux débats de ce "think tank", or les deux groupes ont des filiales placées directement sous l'autorité de la BCE.

Emily O'Reilly, chargée de veiller au respect des règles éthiques et de transparence des institutions communautaires et qui peut faire des recommandations publiques non-contraignantes, a demandé à la BCE de lui communiquer des documents illustrant les liens entre la banque centrale et le G30.

Mario Draghi est membre du G30 depuis 2006, lorsqu'il n'était encore que gouverneur de la Banque d'Italie.

Vitor Constancio, vice-président de la BCE, et Sabine Lautenschläger, membre du directoire de l'institution, ont eux aussi participé à des réunions du G30.

"Le Traité requiert de la BCE qu'elle entretienne un dialogue avec des parties extérieures", a dit un porte-parole de la BCE. "Nous considérons (le G30) comme un forum pertinent avec lequel débattre, en gardant en permanence à l'esprit le fait que nous disposons d'une série de règles et d'instruments pour éviter des conflits d'intérêts apparents ou potentiels."

Une première plainte similaire déposée par la même ONG en 2012 avait été rejetée par le médiateur de l'UE de l'époque mais la BCE n'avait alors pas encore été chargée de superviser directement les principales banques de l'Union, un facteur qu'Emily O'Reilly évoque dans sa lettre à l'institution.

(Francesco Canepa; Marc Angrand pour le service français)