Pékin (awp/afp) - L'activité manufacturière en Chine a continué de croître en septembre, confortant son net rebond d'août sur fond de boom immobilier et d'embardée du crédit, mais ce sursaut --signe d'une fragile stabilisation pour la deuxième économie mondiale-- pourrait s'avérer très précaire.

L'indice des directeurs d'achat (PMI) publié samedi par le Bureau national des statistiques (BNS), un organisme gouvernemental, s'est établi à 50,4 le mois dernier, exactement au même niveau qu'août, contre 49,9 en juillet.

Le secteur manufacturier du géant asiatique a donc enregistré en août puis en septembre sa plus forte progression mensuelle depuis octobre 2014. Les experts sondés par Bloomberg attendaient pour septembre une très légère accélération.

Un chiffre du PMI supérieur à 50 marque une expansion de l'activité manufacturière et un indice inférieur à ce seuil signale une contraction. Ce baromètre, fondé entre autres sur les carnets de commandes des entreprises, est très suivi: l'industrie manufacturière --même sinistrée-- reste un secteur crucial de l'économie chinoise.

Pour autant, les petites firmes du secteur continuent de boire la tasse, tandis que l'emploi se détériore, signe que les entreprises sabrent encore leurs effectifs, selon le BNS.

Celui-ci rappelle dans un communiqué que "les facteurs de la croissance manufacturière restent fragiles", face au défi des "réductions de capacités".

"Le PMI officiel apporte de nouvelles preuves d'une amélioration de la conjoncture", mais le sursis devrait s'avérer "de courte durée", approuvait Yang Zhao, analyste de Nomura.

- Boom immobilier -

Le cabinet de recherche Caixin Insight Group, lié au groupe de médias Caixin et qui publie ses propres statistiques, avait fait état vendredi d'un indice PMI de 50,1 seulement, en légère progression par rapport au niveau d'août (50) mais confirmant un rebond durable après de nombreuses contractions depuis mi-2015.

Cependant, "la perspective du ralentissement économique à long terme de la Chine n'a pas changé, étant donné le déséquilibre persistant des structures économiques", avertissait Yang Zhao, avec des surcapacités de production colossales et une demande internationale toujours en berne, comme en témoigne l'effondrement continu des exportations.

Par ailleurs, des facteurs conjoncturels expliquent la récente embellie, "largement alimentée par les chantiers de reconstruction qui ont suivi les inondations" de la fin du printemps, notait M. Zhao.

Les pluies diluviennes et inondations dévastatrices qui ont frappé en juin le centre et le sud de la Chine avaient conduit à relancer la demande durant l'été.

Surtout, le secteur manufacturier reste soutenu par la nouvelle euphorie du marché immobilier, les prix des appartements s'envolant de près de 40% sur un an dans certaines métropoles et entraînant dans leur sillage une vague d'investissements des promoteurs.

Ce boom renforce la demande en matériaux de construction, meubles et électroménager, mais les restrictions imposées par les autorités pourraient faire bientôt s'essouffler la bulle.

Enfin, l'activité est fortement aidée par le crédit bon marché, suite aux assouplissements monétaires et baisses de taux répétées depuis fin 2014 par la banque centrale, ce qui continue d'alimenter une envolée des prêts bancaires --ils ont doublé sur un mois en août.

- Embardée du crédit -

"Il y a lieu de croire que l'accélération du crédit au cours de l'année écoulée va continuer à pousser (le secteur manufacturier) jusqu'au début de l'année prochaine", observait Julian Evans-Pritchard, analyste du cabinet Capital Economics.

Mais "cela pourrait ne pas se poursuivre au-delà, étant donné que la banque centrale (PBOC) s'est abstenue d'approfondir ses coups de pouce monétaires ces derniers trimestres", tempérait-il.

Et l'institution ne montre guère d'appétit pour des assouplissements supplémentaires: alors que la folle fièvre immobilière inquiète et que la conjoncture s'améliore, "le risque que la PBOC maintienne sa politique inchangée jusqu'à fin 2016 se renforce", abondait Yang Zhao.

Le sursaut inattendu de l'activité manufacturière pourrait néanmoins dans l'immédiat permettre à la croissance du PIB chinois d'accélérer au 3e trimestre, pour la première fois depuis 2014.

Elle s'était stabilisée à 6,7% au 2e trimestre, après avoir glissé en 2015 à son plus bas niveau depuis un quart de siècle. De l'avis général, le gouvernement --qui a déjà musclé ses mesures de relance budgétaire-- pourrait s'attacher à soutenir le secteur.

Les grosses entreprises contribuent largement à la stabilisation, mais "les indicateurs sur l'emploi ne sont pas encourageants et le gouvernement devra régler les tensions" à ce niveau-là, insistait Raymond Yeung, économiste d'ANZ cité par Bloomberg.

afp/rp