S'exprimant devant ses partisans à Trabzon, une cité balnéaire de la mer Noire, Erdogan a réfuté l'idée que la Turquie était confrontée à une crise financière comparable à celle qui a touché les pays asiatiques il y a un vingtaine d'années.

La chute de la livre turque s'explique en grande partie par une inquiétude face à l'influence d'Erdogan sur l'économie, par son soutien à des taux d'intérêt bas malgré une forte inflation et par une dégradation des relations avec les Etats-Unis.

"Les taux d'intérêt sont un instrument d'exploitation qui rendent les riches plus riches et les pauvres plus pauvres", a-t-il affirmé. "Personne ne devrait essayer de nous faire tomber dans ce piège. On ne se laissera pas dupés par ce stratagème".

Erdogan, qui s'est lui-même qualifié "d'ennemi des taux d'intérêt" souhaite un crédit bon marché afin que les banques alimentent la croissance mais les investisseurs craignent une surchauffe de l'économie turque.

Les récentes déclarations du président turc sur ce sujet des taux d'intérêt ont renforcé la conviction de certains que la banque centrale turque n'était pas libre de sa politique monétaire.

Le président turc a appelé pour le troisième jour consécutif ses compatriotes à vendre des dollars et des euros pour soutenir la monnaie nationale.

La livre turque a plongé de près de 20% vendredi après l'annonce d'un doublement des droits de douane sur l'acier et l'aluminium turcs importés aux Etats-Unis.

Le torchon brûle entre Washington et Ankara à propos du pasteur évangéliste américain, Andrew Brunson, soupçonné de terrorisme. Il est accusé par les autorités d'Ankara d'avoir soutenu le coup d'Etat manqué de juillet 2016, attribué par les autorités turques aux réseaux soutenant le prédicateur musulman Fethullah Gülen qui vit en exil aux Etats-Unis.

La Maison blanche avait lancé un ultimatum à la Turquie en exigeant d'elle la libération d'Andrew Brunson avant mercredi dernier en fin d'après-midi sous peine de s'exposer à des sanctions américaines, a déclaré dimanche Recep Tayyip Erdogan.

Le président turc, qui a refusé de plier, disant s'en remettre à la justice, avait déjà estimé vendredi que son pays était la cible d'une "guerre économique". Il avait aussi dénoncé un "lobby des taux d'intérêt" qui serait selon lui à la manoeuvre pour affaiblir la Turquie.

"Quelle est la raison de cette tempête dans un verre d'eau ? Il n'y a aucune raison économique à cela. Il s'agit d'une opération contre la Turquie", a-t-il affirmé.

(Humeyra Pamuk; Tangi Salaün pour le service français)

par Humeyra Pamuk