S’il reconnait que les « scénarios initiaux se sont un peu accélérés en ce début d’année » du fait des tensions sur l’obligataire, Philippe Lespinard, CIO Fixed Income chez Schroders, maintient tout de même ses trois thèmes d’investissement pour 2018. Le premier d’entre eux est la croissance, qui continue à se répandre dans toutes les régions du monde et à se synchroniser. « C’est une bonne chose car beaucoup de pays évoluent toujours sur des rythmes de croissance inférieurs à leurs niveaux d’avant-crise », rappelle le gérant.??

Dans ce contexte, il voit des opportunités sur les régions périphériques, citant à plusieurs reprises l'Italie. Devant les investisseurs et les journalistes que Schroders réunissait la semaine dernière pour sa conférence annuelle, son directeur de l'investissement s'est aussi montré confiant sur des pays comme le Brésil ou le Mexique pour y jouer le rebond de l'économie et la sortie de récession.

??Schroders mise sur une inflation structurellement basse mais n'exclut pas un regain de tensions

??Le deuxième thème d'investissement 2018 défendu par Schroders sur le marché du crédit est le fait que les politiques monétaires sont, contrairement à la croissance économique, asynchrones. Même si la BCE n'attendra "sans doute pas deux ans pour relever ses taux après la fin de son programme de rachats d'actifs, comme l'a fait la Fed en son temps", la divergence entre les politiques monétaires devrait s'accentuer. Cependant, l'heure est clairement à la normalisation des politiques des banques centrales. "Des signes d'inflation apparaissent dans plusieurs régions du monde. Même s'il n'est pas question de parler d'un risque inflationniste, nous allons partout sortir de la zone où l'inflation n'est plus un problème", explique Philippe Lespinard, chez Schroders. ?

La société de gestion a formalisé cette analyse en créant une courbe sur laquelle sont placées les différentes régions du monde, et trois situations d'inflation : la première, dans laquelle se trouvait l'économie mondiale en 2014-2015 est une situation où "l'inflation est morte". La seconde vers laquelle toutes les régions se dirigent désormais est celle de la "normalisation de l'inflation", qui reste cependant loin de la troisième zone où l'inflation est problématique pour l'économie.??

Concernant l'inflation, Schroders estime que des facteurs structurels puissants vont la maintenir à un niveau faible au niveau mondial, citant la démographie, la technologie voire la mondialisation. Mais le gestionnaire d'actifs note aussi que des facteurs de tensions inflationnistes apparaissent : la mondialisation n'est plus en vogue et les tentations protectionnistes naissent, la politique fiscale et budgétaire est de plus en plus expansionniste dans de nombreux pays (réforme fiscale, investissements publics…)… "Nous ne pouvons pas exclure une accélération plus forte de l'inflation lorsque l'on voit par exemple les pénuries de main-d'oeuvre dans certains pays", juge Philippe Lespinard, CIO Fixed Income chez Schroders, citant par exemple le cas de la Pologne.??

Schroders affiche son pessimisme pour l'économie britannique??

Dans ce contexte, le gérant met en garde contre les tensions qui sont à attendre sur le marché obligataire. "Les banques centrales vont stabiliser leurs bilans, sans doute autour de 20 000 milliards de dollars en cumulé, avant de le faire décroitre très lentement. Les liquidités seront donc moins nombreuses alors que nous attendons une reprise de l'émission de dette à travers le monde. Moins de 1000 milliards de dollars ont été émis chaque année depuis 2014-2015 ce qui, à l'échelle de la planète, n'est pas énorme. Nous prévoyons un doublement de ces levées de dette cette année. Le marché obligataire va devoir l'assumer et gérer cette situation", explique Philippe Lespinard.??

Enfin, le troisième thème d'investissement développé par l'expert de Schroders est le Brexit. Et sur ce point, il ne se montre guère confiant sur les perspectives de l'économie britannique. "L'investissement est en panne en raison de l'incertitude liée au Brexit, déplore Philippe Lespinard. De son côté, la consommation risque de caler compte tenu de la chute du revenu disponible, et ne tirera donc plus la croissance."