(Actualisé avec nombre d'arrestations)

par Scott Malone et Nate Raymond

BOSTON, 20 août (Reuters) - Des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues de Boston samedi pour protester contre un rassemblement pour la "liberté d'expression" auquel étaient conviés des membres de l'extrême droite, une semaine après la mort d'une manifestante antiraciste à Charlottesville.

Près de 40.000 personnes se sont déployées autour du parc historique de Boston Common, où étaient confinés les représentants de l'"alt right".

Manifestants et contre-manifestants ont été tenus séparés par les forces de l'ordre, évitant la répétition des violences du week-end dernier à Charlottesville, en Virginie.

Les militants d'extrême droite ne dépassaient pas quelques dizaines de personnes et leurs voix étaient couvertes par les cris de "Honte!" des manifestants antiracistes à proximité.

Vivement critiqué pour avoir renvoyé dos à dos suprémacistes blancs et militants antiracistes après les violences de Charlottesville, Donald Trump a cette fois salué sur Twitter les contre-manifestants de Boston. "Je veux applaudir les nombreux manifestants à Boston qui ont protesté contre l'intolérance et la haine. Notre pays va bientôt se rassembler pour ne faire qu'un!", a-t-il écrit.

"Notre grand pays est divisé depuis des décennies. Parfois il faut une manifestation pour guérir (ces divisions) et nous allons guérir, et devenir plus fort que jamais!", a-t-il poursuivi.

33 ARRESTATIONS

Trente-trois personnes ont été interpellés après des heurts, où des manifestants ont jeté des pierres et des bouteilles remplies d'urine sur les policiers, a annoncé le commissaire William Evans à des journalistes.

"Il y a eu quelques confrontations", a-t-il déclaré. "99,9% des personnes présentes étaient là pour les bonnes raisons", a-t-il ajouté.

Certains contre-manifestants ont également jeté des bouteilles en plastique sur les participants et tenté de bloquer leur passage.

Deux participants au rassemblement portant des casquettes rouges brodées du mot d'ordre de campagne de Donald Trump, "Make America Great Again", ont ainsi tenté de rejoindre la zone réservée aux intervenants nationalistes mais ont été bloqués par des manifestants masqués vêtus de noir.

"Rentrez chez vous!" "Pas de haine!", pouvait-on entendre du côté des manifestants antiracistes.

Face à l'ampleur de la contre-manifestation, le rassemblement pour la "liberté d'expression" a pris fin de manière anticipée.

"Ils ont entendu notre message haut et fort: Boston ne tolérera pas la haine", déclarait Owen Toney, un activiste de 58 ans. "Je pense qu'ils y réfléchiront à deux fois avant de venir ici", ajoutait-il.

Environ 500 policiers ont été déployés samedi dans les rues de Boston afin de prévenir des violences et des barricades et des camions ont été placés autour du parc afin d'empêcher une attaque à la voiture bélier similaire à celle qui a coûté la vie à une jeune femme de 32 ans samedi dernier à Charlottesville.

Les autorités municipales ont fermé en outre plusieurs artères de la ville et interdit les armes de toute nature, y compris les bâtons destinés à porter des pancartes, et les marchands ambulants de nourriture ne pouvaient accéder au parc de Boston Common situé dans le centre de la ville.

"COMBATTRE LA SUPRÉMATIE BLANCHE"

Le maire de Boston, Marty Walsh, avait appelé vendredi les contre-manifestants à éviter le quartier de Boston Common, expliquant que leur présence serait de nature à provoquer les activistes de droite.

Monica Cannon, l'une des organisatrices de la marche baptisée "Combattre la suprématie blanche", a rejeté l'appel de l'élu local. "Ignorer un problème n'a jamais aidé à le résoudre", a-t-elle déclaré dans un entretien téléphonique. "Nous ne pouvons pas continuer à ignorer le racisme, ignorer le suprémacisme blanc, ignorer les néo-nazis et prétendre que ce n'est pas un problème".

Les organisateurs de la manifestation "Liberté d'expression" ont dénoncé la violence et les chants racistes entendus lors du rassemblement "Unifier la droite" à Charlottesville.

"Nous sommes une coalition de libertariens, de progressistes, de conservateurs et d'indépendants et nous acceptons toutes les personnes et organisations, quelle que soit leur affiliation politique, qui souhaitent entamer un dialogue pacifique à propos des menaces qui pèsent sur la liberté d'expression et les libertés civiques", expliquent les organisateurs sur Facebook.

Les violences survenues la semaine passée à Charlottesville ont ouvert la plus grave crise politique de la présidence de Donald Trump qui a d'abord tardé à condamner les extrémistes de droite avant de les placer sur le même plan que les manifestants antiracistes auxquels ils se sont heurtés en Virginie.

Outre le rassemblement à Boston, d'autres défilés étaient prévus dans le pays, notamment à Houston au Texas à l'appel de l'antenne locale du mouvement "Black Lives Matter" qui souhaite le retrait d'un monument confédéré dans un parc.

La prestigieuse université de Duke en Caroline du Nord a retiré une statue du général confédéré Robert E. Lee qui se trouvait devant la chapelle du campus et avait été vandalisée il y a deux jours, a annoncé samedi le président de l'université.

Des militants des droits civiques ont également prévu de se réunir à Dallas pour dénoncer les idées défendues par les suprémacistes blancs. (Pierre Sérisier et Julie Carriat pour le service français)