Le 15 juin dernier, 3 des 8 membres du comité de politique monétaire (MPC) de la Banque d’Angleterre (BoE) ont voté en faveur d’une hausse de taux de nature à contrer le risque inflationniste. Un record de voix en dix ans qui illustre les divisions qui s’installent au sein de l’institution britannique et met en exergue une situation bancale au Royaume-Uni.

En annonçant des élections législatives anticipées, Theresa May espérait renforcer ses rangs dans l’optique des négociations avec l’Union européenne au sujet du Brexit, entamées le 19 juin. Mais désavouée par son peuple le 8 juin, la Première Ministre eurosceptique a perdu sa majorité absolue à la Chambre des députés, la forçant à négocier avec les unionistes nord-irlandais pour briguer les 8 sièges manquants.

Le Royaume-Uni, déjà plongé dans l’inconnu avec l’activation de l’article 50 du traité de Lisbonne fin mars, n’avait pas franchement besoin d’une prise de risque aussi inopportune, laquelle accroît un peu plus les incertitudes quant à l’avenir du pays.

En parallèle, face au décrochage de la Livre sterling, les prix à la consommation galopent, en hausse de +2.9% sur un an mai, un record en 4 ans, contre un objectif de +2%. Un casse-tête pour la Banque d’Angleterre.

D’un côté, la croissance atone en 2017 (+0.2% au T1) et le manque de visibilité plaident pour un maintien des mesures de soutien (soit un taux à 0.25% historiquement bas et un portefeuille d’actifs de 435 milliards). De l’autre, l’instabilité des prix encourage un resserrement monétaire. Le fameux dilemme de la stagflation.

Les divergences au sein du MPC ont d’ailleurs pris de l’ampleur ces derniers jours suite aux déclarations contradictoires de deux de ses membres : Mark Carney et Andy Haldane.

Le premier, président de la BoE, estime que ce n’est pas le bon moment pour augmenter le loyer de l’argent. Outre le risque lié au Brexit, le banquier canadien émet des doutes sur la durabilité des tensions inflationnistes, principalement en raison de la faiblesse de la croissance des salaires, mais aussi en raison de signaux mitigés sur la consommation des ménages et l’investissement des entreprises.

Le second, économiste en chef de la banque centrale, juge en revanche que si les indicateurs restaient dans les clous, il serait avisé d’envisager une action d’ici la fin de l’année. Bien que faisant partie, comme son président, des 5 attentistes majoritaires au mois de juin, il pointe néanmoins le risque lié au fait de démarrer trop tardivement un cycle de normalisation, lequel serait alors nécessairement plus marqué, et donc plus brutal pour l’économie. Mais même s’il votait en faveur d’une hausse de taux au mois d’Août, c’est encore le choix de Mark Carney qui trancherait en cas d’égalité (4-4).

De son côté, Theresa May, désormais fragilisée, fait profil bas. Soucieux de ne pas cliver davantage, le gouvernement a présenté un projet orphelin de plusieurs réformes controversées, suite à plusieurs jours de débats parlementaires. Vote prévu le 29 juin. La locataire du 10 Downing street promet par ailleurs le meilleur accord possible sur le Brexit, garantissant que la procédure de sortie de l’UE se fera dans l’écoute et la concertation du Parlement, des entreprises et des administrations concernées.

Techniquement, le cable vacille mais ne flanche pas. L’actualité incertaine autour du Brexit accroit la volatilité de façon significative dans des mouvements erratiques et imprévisibles, ce qui réduit considérablement l’espérance de vie des ordres stops trop serrés. Par ailleurs motivés par les doutes qui émergent quant aux intentions de la Réserve Fédérale américaine, nous passons provisoirement neutres sur la parité.