BAGDAD, 31 janvier (Reuters) - Le Premier ministre irakien Haider al Abadi a fustigé samedi les "criminels" responsables d'exécutions de masse en Irak, en réaction au massacre présumé par des miliciens chiites d'au moins 72 civils cette semaine dans la province de Diyala.

"Il est inadmissible que des gens fassent la loi eux-mêmes et punissent les autres dès qu'ils veulent marquer des points", a dit le chef du gouvernement, qui est chiite, lors d'une réunion à Bagdad de dignitaires religieux et politiques chiites et sunnites.

Le gouvernement irakien a annoncé mercredi l'ouverture d'une enquête sur les événements de lundi à Barouanah, village situé dans l'est de l'Irak. Cette opération qui ressemble à une exécution programmée est mise sur le compte de milices chiites et d'éléments des forces de sécurité par les témoins du drame.

De telles accusations menacent les efforts menés par Abadi pour obtenir le soutien des tribus sunnites dans la lutte contre le groupe Etat islamique, qui a conquis l'an dernier de vastes territoires dans le nord et l'ouest du pays.

"Ceux qui commettent ces meurtres et ces agressions sur des sanctuaires, incendient des maisons et attaquent les habitants et les biens dans les zones libérées de Daech (l'acronyme arabe de l'Etat islamique), ces actes ne sont pas moins dangereux que le terrorisme", a déclaré Haider al Abadi.

Les milices chiites ont pris la direction de la lutte contre l'EI après l'effondrement de l'armée irakienne devant la poussée des djihadistes l'été dernier. Mais leur rôle est controversé, des témoins accusant certaines d'entre elles de meurtres ou de déplacements forcés à l'encontre des populations sunnites.

Abadi a estimé que les responsables du massacre de Barouanah jetaient certains sunnites dans les bras de l'Etat islamique. "Ces criminels appliquent leur propre plan pour diviser les Irakiens", a-t-il dit.

Le grand ayatollah Ali al Sistani, première autorité religieuse chiite du pays, a appuyé en faveur de l'ouverture d'une enquête, qui a également le soutien des Nations unies.

Certains observateurs, pourtant, ne se font guère d'illusions. "Ce qui s'est produit à Barouanah s'est produit dans de nombreuses régions et se reproduira encore. L'EI le fait, les milices le font", a déclaré le député sunnite indépendant Mithal al Aloussi. (Jean-Stéphane Brosse pour le service français)