Madrid (awp/afp) - Le taux de chômage a reculé en Espagne au troisième trimestre passant sous le cap symbolique des 20% pour la première fois depuis six ans, grâce notamment à une saison touristique record, mais l'emploi reste précaire.

18,9% de la population active était au chômage entre juillet et septembre, soit un recul de 1,09 point par rapport au trimestre précédent (-2,27 points sur un an), selon les chiffres publiés jeudi par l'Institut national de la statistique (INE).

La dernière fois que le taux de chômage avait été inférieur à 20% remonte au troisième trimestre 2010.

La crise économique provoquée par l'éclatement d'une bulle immobilière a fait exploser le chômage en Espagne, passant de 8% en 2008 à presque 27% début 2013, avant de commencer à refluer.

Sur un an, le nombre de chômeurs a baissé de 10,9%, ce qui représente plus d'un demi-million de demandeurs d'emploi en moins.

"Les chiffres du chômage montrent que la situation a changé depuis 2011", date de l'arrivée des conservateurs au pouvoir, s'est immédiatement félicité dans un tweet le Parti Populaire (PP).

La nouvelle est tombée à pic pour son patron Mariano Rajoy en plein débat d'investiture devant le Parlement, dernière étape avant d'être de nouveau nommé chef du gouvernement samedi, après dix mois de blocage politique.

Le gouvernement table sur une réduction du taux de chômage à 18,6% pour l'ensemble de 2016.

L'amélioration est particulièrement marquée dans les services: 178.700 personnes supplémentaires ont été employées dans ce secteur au troisième trimestre.

Une hausse tirée par une saison touristique exceptionnelle, la meilleure depuis quinze ans selon les professionnels.

Le nombre de touristes visitant l'Espagne a bondi grâce au report de vacanciers fuyant les destinations méditerranéennes frappées par des attentats comme la Turquie.

Les régions où l'afflux touristique a été le plus fort, Catalogne ou îles Baléares, sont d'ailleurs celles où le chômage a le plus reculé.

- Emplois temporaires en hausse -

Toutefois, 4,3 millions d'Espagnols restent au chômage. Et le taux de chômage reste bien supérieur à la moyenne de 10,1% comptabilisée par Eurostat dans la zone euro, où l'Espagne reste le plus mauvais élève après la Grèce.

Surtout, les emplois créés sont souvent précaires.

Pour le syndicat UGT, l'un des principaux du pays, les derniers chiffres montrent "comment la saisonnalité et la précarité s'enkystent dans (le) marché du travail".

La proportion d'emplois temporaires a en effet grimpé sur le trimestre, à près de 27%, au plus haut depuis fin 2008, souligne l'INE.

En 2015, la durée moyenne des contrats de travail était de 53,4 jours.

La réforme du travail adoptée par les conservateurs à leur arrivée au pouvoir, a notamment réduit les indemnités de licenciement et instauré un nouveau contrat à durée indéterminée avec une période d'essai d'un an.

Son aménagement, réclamé à grands cris par l'opposition, sera l'un des enjeux de la prochaine législature.

En attendant, "le recours aux contrats temporaires risque de s'accroître, les employeurs restant prudents face à un paysage politique confus et au manque de clarté sur le processus de sortie du Royaume-Uni de l'UE", estime Raj Badiani du cabinet d'analyse IHS Global Insight.

La situation économique de nombreux Espagnols reste très fragile.

Le nombre de foyers dont tous les membres n'ont pas d'emploi est supérieur à 1,4 million, malgré une légère baisse au 3e trimestre.

Près de 29% des Espagnols sont en risque de pauvreté ou d'exclusion sociale, alors que la moyenne européenne est inférieure à 24%, selon les derniers chiffres d'Eurostat (2015).

3,5 millions de personnes -environ 7,5% de la population- ont un revenu inférieur à 330 euros par mois, alors que le salaire minimum est de 764 euros sur 12 mois.

Plus de 23% des jeunes (15-29 ans) sont déscolarisés et sans emploi, contre 15% en moyenne parmi les 34 pays de l'OCDE (chiffres 2015).

afp/rp