Lors de la dernière réunion de la Fed en juin, sa présidente, Mme Yellen, a constaté que les conditions du marché de l’emploi s’étaient bel et bien améliorées mais ne justifiaient pas à elles-seules une hausse immédiate des taux.  Néanmoins, elle a également indiqué que la première hausse des taux (depuis 2006) pourrait vraisemblablement avoir lieu cette année, et enclencherait une augmentation (très) graduelle. En effet, 15 participants sur les 17 qui composent le conseil des gouverneurs voient une hausse des taux en 2015.

Dans cet article nous évoquerons, de manière relativement complète, les différentes publications que la Fed surveille et apprécie pour modifier ou non sa politique monétaire. Diviser en deux parties, l’article exposera d’abord les raisons qui peuvent motiver une hausse des taux et ensuite celles qui peuvent la freiner.  


I) Des raisons en faveur d’un durcissement des conditions monétaires :
 
a) Des données positives sur l’emploi :

Le taux de chômage continue de baisser, retrouvant ainsi un niveau d’avant crise. Aujourd’hui à 5.3%, il était à 6.3% il y a un an et à 7.5% il y a deux ans.
le taux de démission des salariés est en hausse (niveau de début 2008), ce qui montre la confiance de ces derniers dans la reprise économie et dans leur capacité à trouver un meilleur emploi ou salaire.
- Juin est le 64e mois consécutif de création d’emplois dans le secteur privé : + 223 000 en juin selon le rapport NFP. Cela porte les embauches à 2.9 millions sur les 12 derniers mois.
- L’indice du coût de l’emploi est en progression ce qui illustre une hausse des salaires et des cotisations sociales.
Le nombre d’individus passant du statut d’inactif à celui d’employé à atteint un point haut, dépassant ainsi le pic de 2006 (voir graphique 1).
 
b) Un optimisme qui s’étend également aux entreprises :

- Explosion du nombre des offres d’emplois à un niveau record en mai dépassant les 5.3 millions. On constate également une chute des emplois à temps partiels pour raisons économiques, signe de confiance de la part des employeurs (voir graphique 2).
 
 
Graphique 1 : évolution sur 15 ans du nombre de personnes passant d’inactif à employé, aujourd’hui à un plus haut historique


 

Graphique 2 : la baisse des contrats de travail à temps partiels est un bon indicateur de la reprise économique


 

c) Des données macroéconomiques positives :

- Le PIB américain affiche une bonne croissance depuis 2010 (graphique 3), avec néanmoins une légère contraction de l’activité au Q1 2015 dûe aux conditions climatiques défavorables et aux conflits syndicaux dans les ports de la côte ouest. Néanmoins, ce dernier est attendu en hausse de 2.2% au second trimestre 2015.
- Dans le secteur de l’immobilier, on constate la hausse des mises en chantier de maisons individuelles et collectives depuis 6 ans, ainsi que la forte progression depuis 2010 des ventes de logements anciens et neufs.
 
Graphique 3 : évolution du taux de croissance du PIB américain depuis 2001. La ligne rouge indique une croissance nulle


 

d) Une reprise de la consommation :

- Les ventes au détail sont en nettes progression en mai et en mars après un hiver rude qui a poussé les consommateurs à rester chez eux. De plus, les ventes de véhicules sont en forte augmentation depuis 2010, retrouvant ainsi les volumes de 2005/2006.
- Par ailleurs, l’indice de confiance du consommateur repasse au-dessus des 100, niveau qui coïncide avec ceux d’avant-crise.
- Ensuite, l’indice PCE (personnal consumption expenditures) qui est plus pertinent que le CPI pour mesurer l’inflation, était à 1.2% en mai. Mais une autre version de cet indice, qui enlève les biens ou services dont les prix ont le plus et le moins augmenté, est à 1.6%, donc relativement proche de la cible des 2% de la Fed.  
 
 
II) Des raisons pour retarder la hausse des taux :
Malgré toutes ces données positives, il demeure des ombres au tableau :

a) La production industrielle domestique connaît une baisse de son taux de croissance, due à la baisse du prix du baril de pétrole et à la forte appréciation du dollar.
 
b) L’emploi :
- Le taux de participation (population active/ population en âge de travailler) ne cesse de décroitre égalant ainsi les niveaux de la fin des années 70.
- Par ailleurs, la baisse du taux de chômage est en partie dûe au fait que des individus ont quitté la population active. Ryan Sweet, analyste chez Moody's, dit que la hausse des salaires de 2% en juin n’est pas suffisante et que si elle était supérieure, plus de personnes inactives recommenceraient à chercher un emploi. Rejoignant ainsi la population active, ces individus viendraient donc gonfler le taux de chômage. 

 
Conclusion :
 
Sans grande surprise la réunion du FOMC mercredi dernier n’a apporté que très peu d’éléments nouveaux. L’économie dans son ensemble s’améliore, mais pas à un rythme suffisant pour justifier une hausse imminente des taux. Les gouverneurs ont fait part de leurs craintes sur les dossiers grec et chinois et leurs éventuelles répercussions sur les marchés financiers européens et asiatiques, craignant alors une potentielle contagion aux États-Unis.

Avec ce nouveau foyer d’inquiétudes et en relativisant à nouveau la qualité de la reprise américaine, la Fed cherche principalement des prétextes pour retarder la hausse des taux. Elle le peut, rien ne l’oblige à agir. Rendez-vous donc le 17 septembre pour la réunion du FOMC et un probable changement des conditions monétaires.