* L'équipe de Macron évoque des "informations mensongères"

* Moscou dénonce une décision "scandaleuse"

* En Marche! visé par une série de cyberattaques

par Michel Rose et Marine Pennetier

PARIS, 27 avril (Reuters) - L'équipe du candidat à l'élection présidentielle française Emmanuel Macron a assumé jeudi la mise à l'écart de la campagne des médias russes Sputnik et RT France qui, selon En Marche!, agissent comme des "agences de propagande d'Etat" en faisant circuler de "façon méthodique" des "informations mensongères".

Les deux organes de presse, financés par l'Etat russe, ont indiqué avoir été refoulés du QG de campagne d'Emmanuel Macron où ils souhaitaient se rendre dimanche pour couvrir les résultats du premier tour de la présidentielle.

Cette décision a suscité l'ire de Moscou qui, par la voix de la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a dénoncé jeudi une violation "scandaleuse" de la liberté de la presse.

"Il s'agit d'une discrimination ciblée et éhontée des médias russes de la part du candidat à la présidentielle d'un pays qui a toujours été vigilant en matière de liberté d'expression", a dit Maria Zakharova lors d'un point presse.

Elle a appelé les autorités françaises à prendre des mesures pour éviter que des violations similaires se reproduisent lors du second tour de la présidentielle le 7 mai.

Contacté par Reuters, un porte-parole d'Emmanuel Macron a indiqué que le mouvement était "à la disposition" des autorités russes pour leur "expliquer pièces à l'appui" leur choix de ne pas accréditer Sputnik et RT France.

"Il font partie d'un dispositif destiné à nous atteindre", a-t-il dit. "S'il faut clarifier les choses avec eux on le fera, mais en l'état nous ne considérons pas RT France ni Sptunik, cette entité bicéphale, comme un organe de presse ni comme un média, mais réellement comme une agence de propagande d'Etat."

"C'est un phénomène assez singulier", a-t-il ajouté. "C'est vraiment la volonté délibérée - pas seulement l'agressivité parce que sinon on n'accréditerait pas Valeurs actuelles (hebdomadaire conservateur-NDLR) - et systématique de donner de fausses nouvelles, de fausses informations."

"Que les gens prennent parti ce n'est pas un problème, mais par contre qu'ils fassent circuler des informations mensongères de façon méthodique et systématique, ça c'est un problème", a-t-il dit.

"DISCUSSION OUVERTE"

A la question de savoir s'il craignait que cet incident pèse sur les relations entre Moscou et Emmanuel Macron si ce dernier était élu, il a répondu : "Si ca doit créer des problèmes avec le Kremlin, en cas d'élection du candidat, ce sera l'objet d'une discussion ouverte".

"Pour l'instant, on n'a pas eu le sentiment pendant la campagne que les autorités russes souhaitaient rentrer dans le débat que nous avons avec ses agents, a-t-il ajouté. Ce n'est pas la première fois que l'équipe de Macron accuse les deux organes de presse de propager de fausses informations.

En février, le secrétaire général d'En Marche ! Richard Ferrand avait demandé aux "plus hautes autorités de l'Etat" de "garantir qu'il n'y aura pas d'ingérence d'une puissance étrangère dans notre vie démocratique".

"Aujourd'hui il faut regarder les faits : deux grands médias, Russia Today et Sputnik, qui appartiennent à l'Etat russe, font leur quotidien de la diffusion, de la propagation, de fausses nouvelles. Ensuite ces nouvelles sont reprises, sont citées et viennent peser sur notre vie démocratique", avait-il déploré.

Des accusations rejetées "catégoriquement" à l'époque par RT et Sputnik qui s'étaient dit consternés par des attaques "sans fondement" et des "accusations sans preuves".

LE KREMLIN RÉFUTE TOUTE PRÉFÉRENCE

La Russie a été accusée l'an dernier d'être derrière les piratages informatiques qui ont visé le Parti démocrate américain et sa candidate Hillary Clinton, battue par le républicain Donald Trump dans la course à la Maison blanche.

Berlin a également exprimé sa crainte d'être la cible de tentatives de "déstabilisation" de Moscou avant les élections législatives de septembre.

La Russie est soupçonnée d'être derrière la série de cyberattaques qui ont visé ces derniers mois le mouvement En Marche !.

Selon un rapport de l?entreprise de cybersécurité Trend Micro présenté mardi, le mouvement du candidat centriste a été en mars la cible de cyberattaques qui pourraient avoir été menées par un groupe de hackers russes.

Le Kremlin, où la candidate du Front national a été reçue en mars par Vladimir Poutine, a réfuté lundi toute préférence pour Marine Le Pen, qui prône un rapprochement avec la Russie et qui affrontera Emmanuel Macron le 7 mai prochain. (avec Andrew Osborn à Moscou, édité par Yves Clarisse)