A contresens des marchés, les petites cap’ broient du noir

Ce n’est plus une sous performance des plus petites capitalisations que l’on observe en ce début 2024, mais une évolution à contre sens ! En février, le CAC Small a perdu -3.2% et le MSCI Europe Microcaps -2.2% alors que les plus grandes capitalisations poursuivaient leur ascension avec un CAC 40 à +3,5% et un STOXX 600 à +1,8%. Même tendance sur la première moitié du mois de mars. 

Vous retrouverez ici les gagnants et perdants (par valeur et par secteur) sur différentes périodes.

Evolution, dividendes inclus, des indices d’actions françaises par taille de capitalisation depuis début 2024

La désinflation et les perspectives de baisse des taux qui l’accompagnent se précisent, et pourtant les flux continuent donc d’abonder sur les plus grandes capitalisations, l’Or et le Bitcoin. Il n’y a guère que les petites cap’ qui sont exclus d’une fête de la planète finance qui ne peut se résumer à l’engouement autour de la thématique de l'intelligence artificielle. Tout un tas de raisons que l’on ne rappellera pas cette fois expliquent que les flux d’argent continuent de sortir des PME et ETI cotées, à l’image de la décollecte des fonds échantillonnés par Portzamparc (graphique ci-dessous). 

Les PME-ETI sont en pleine phase de publication de leurs copies 2023, lesquelles réservent peu de surprise. Concernant 2024, accompagnant la prudence affichée par les managements, les analystes revoient progressivement à la baisse leurs attentes de progression des BPA encore trop élevées en ce qui concerne les valeurs de l’indice Small 90 comme le montre cet extrait de la recherche de Portzamparc-BNP en date du 14 mars :

Source : Portzamparc-BNP

On remarquera, quelle que soit la surestimation des projections de BPA 2024 des plus petites valeurs, la décote de l’ordre de 20% des plus petites valeurs par rapport à l’indice CAC 40. Les problématiques de liquidité restent donc prépondérantes et pas un mois ne se passe sans qu’une offre publique soit annoncée sur au moins une de ces petites valeurs. Dernière en date, Believe, une société de musique numérique spécialisée dans la distribution et l’accompagnement des artistes et labels avec une surenchère de la part du géant du secteur, Warner. 

Terminons par notre habituel graphique d’évolution des indices français selon la taille de capitalisation qui montre que dividendes inclus, la sous-performance de la classe d’actif reste criante sur 5 ans, de l’ordre de 50 points.

Evolution, dividendes inclus, des indices d’actions françaises par taille de capitalisation sur 5 ans.

Les remarques générales

(Source : Quantalys, rapport mensuel des sociétés de gestion)

Le contexte étant dressé, venons-en aux mouvements de nos fonds vedettes à travers notre tableau synthétique.

De façon générale, nous remarquons que :

  • Les fonds de la sélection ont mal commencé l’année et affichent une performance moyenne de -0.5%. 
  • Parmi les dossiers très détenus par notre sélection de fonds, on recense notamment Voyageurs du Monde, Fountaine Pajot, Beneteau, Trigano, Wavestone, Sopra, Aubay, Infotel, Assystem, Neurones, Robertet, Groupe Guillin, Ipsos, Mersen, Clinica Baviera, Precia, NRJ Group et Gerard Perrier.
  • A noter l’allègement d’Infotel par le fonds le plus performant de la sélection sur 5 ans (IE Europe Small) alors que le second de la sélection, Gay Lussac Microcaps, se renforçait. En revanche, l’IPO de Theon International à la Bourse d’Amsterdam a été souscrite par plusieurs fonds de la sélection. Le titre gagne déjà plus de 20% depuis l’opération. Autre IPO à l’international, l’allemand Renk (+37,6%) profite d’un intérêt exceptionnel des investisseurs à l’égard de son introduction en bourse du fait d’une position unique au monde dans les boites de vitesses qui équipent les véhicules militaires terrestres. Le fonds Quadrige Europe Midcaps, qui s’était positionné sur ce nouveau dossier, en a profité pour alléger cette position qui lui a apporté 1.5 point de performance en février. 

Les derniers arbitrages des pros

  • Les fonds d’Indépendance AM sont parvenus à progresserde plus de 2%en février. Au cours du mois, le fonds Europe, qui a bénéficié de souscriptions, s'est « allégé en Infotel, Bastide et Lacroix. Il a apporté la totalité de ses titres SII à l'OPA. Europe Small a renforcé ses investissements dans The Italian Sea Group, Tokmanni, Altri et Indra Sistemas. Il a initié un investissement dans Groupe Okwind et Knowit. Le fonds a participé à l'IPO de Theon International à Amsterdam. Cette entreprise de défense fabrique des lunettes de vision nocturne ».Le fonds continue de privilégier de plus grosses capitalisations. Il « s'est renforcé en Dassault Aviation faiblement valorisé pour une valeur d'armement et en Sopra qui bénéficie d'une meilleure visibilité suite à la cession de la majeure partie de sa division Sopra Banking Software ».
  • Gay-Lussac Microcaps « continue de déployer notre processus de gestion et son tryptique faible volatilité - faible beta - momentum. Du côté des achats, nous avons essentiellement renforcé des lignes déjà existantes. Ce fut le cas de Gerard Perrier, qui a publié un très bon quatrième trimestre en croissance de 7,6%, bien au-delà de ses guidances et des attentes du consensus. Le groupe aura donc réalisé une croissance organique de 6,4% sur l'année 2023. Ligne historique du fonds, Gerard Perrier continue de bénéficier de tendances porteuses et d'une gestion familiale remarquable. Infotel a aussi été la cible de nos achats, en raison d'une valorisation que nous jugeons peu exigeante bien que le message semble prudent, en particulier sur le début d'année. Nous avons également renforcé Entersoft, qui a publié un quatrième trimestre en ligne avec nos attentes et s'attend à une croissance organique à deux chiffres sur 2024. Du côté des ventes, nous avons notamment allégé Delfingen. La société a vu l'activité se dégrader en toute fin d'année ce qui a pénalisé son pilotage des coûts et donc sa marge. Le groupe nous parait faire face à plusieurs vents contraires avec une position de dette importante laissant peu le droit à l'erreur dans un contexte de montée en puissance rapide des groupes automobiles chinois. Nous avons réduit notre ligne Guerbet après une très belle performance boursière ces dernières semaines. Enfin, nous avons soldé notre ligne Cogelec après la hausse du titre post-publication. Les conventions réglementées du groupe nous rebutent par ailleurs pour porter structurellement la ligne dans un fonds.
  • Erasmus Small Cap Euro a très égèrement progressé en février, porté par QT Group (+19%) et Fugro (+19%) « dans des domaines bien différents, ont tous les deux publié d’excellents résultats, bien supérieurs aux attentes. QT, spécialisé dans le développement d’applications open source, a terminé l’année à un rythme soutenu, qui devrait se poursuivre l’an prochain, avec une croissance attendue supérieure à 20%. Fugro, l’expert de la géotechnie et de l’analyse des sols sous-marins, bénéficie de la tendance structurelle de développement de l’éolien off-shore, avec de nombreux nouveaux projets attendus dans un contexte où la marge continue de s’améliorer. Parmi les principaux détracteurs, nous retrouvons deux sociétés liées au marché des semi-conducteurs. X-Fab (-19%), tout d’abord, a donné des perspectives décevantes avec notamment un premier trimestre attendu en décroissance séquentielle. Aixtron (-26%) a souffert de guidances jugées trop prudentes par le marché et du choix d’Apple de ne finalement pas utiliser la technologie Micro Led pour sa future montre. Un seul mouvement a signalé, l’entrée en portefeuille de Theon International, société spécialisée dans les produits de vision nocturne, à destination des armées et des forces de l’ordre. La société s’est récemment introduite en Bourse à un niveau de valorisation que nous jugeons très attractif pour ce titre de qualité, en croissance ».
  • Le fonds MCA Entreprendre a bénéficié de l'OPA de Visiativ (37 €, prime de 36 %) « un prix qui nous semble correct pour une société en pleine transformation qui a vocation à terme à augmenter sa part de SaaS ». Le fonds, toujours porté par la hausse de son premier poids, Memscap (cours x10 en 14 mois) a entré 4 valeurs : 

Eurobio Scientific : « L'entreprise a réalisé une acquisition majeure en 2022 avec GendX. Le potentiel en termes de développement de produits propriétaires et de synergies commerciales devrait aider à l'amélioration des marges, pour tendre à terme vers les 25% de marge d’ebitda ».

TFF : « Le spécialiste des fûts en chêne devrait bénéficier dans les prochaines années des fruits de leurs investissements dans le bourbon aux États-Unis, un segment très dynamique. La croissance organique devrait cette année dépasser une nouvelle fois les 10% ».

Voyageurs du Monde : « La société spécialisée dans les voyages sur mesure a annoncé de très bonnes orientations des réservations pour 2024, malgré l'environnement économique incertain. L'entreprise se paie 7 fois son EBIT 2024e, une valorisation qui nous semble très raisonnable, d'autant plus que la société dispose d’une position de trésorerie nette ».

Cogelec : « La société vendéenne a annoncé le démarrage de la commercialisation de leur clé Kibolt, une clé connectée qui permettra aux bailleurs sociaux de mieux gérer les accès des bâtiments avec une ouverture possible pour le personnel uniquement aux heures d'intervention. Après quelques problèmes techniques ces dernières années, la version 2 donne des premiers signaux positifs. Avec les premières ventes de la clé Kibolt et la montée en puissance de l’international, la société vise à moyen terme une marge d’ebitda de 20% contre 13% actuellement ».

  • Le gérantde HMG Découvertes relève, dans le secteur des médias et du conseil, « les hausses des actions Lagardère (+10,3%) et Ipsos (+5,9%), qui ont toutes deux dépassé les attentes du marché en termes de profit opérationnel. Pour Lagardère, s’est ajoutée l’annonce d’un projet de cession du magazine Paris Match, dans d’excellentes conditions (sans doute presque un euro par action Lagardère !) pour cet actif probablement bien peu rentable. Soulignons enfin la progression du cours de notre récente acquisition, celle du groupe de conseil informatique Sopra (+8,7%) aidée par l’annonce d’un recentrage majeur du groupe, avec le projet de cession de l’essentiel de ses activités de logiciels bancaires au profit d’Axway. Du point de vue de l’actionnaire d’Axway que nous sommes, il s’agit, en première approche, d’une importante acquisition potentiellement assez risquée, si bien que nous avons choisi de céder l’essentiel de notre ligne en Axway. Les cours de l’action Esso (raffinage)(+41,7%) ont fortement progressé avec la spéculation renouvelée que l’entreprise sorte de cote, à l’instar de ce qui vient d’être annoncé pour son confrère, le groupe italien Saras, tout ceci dans un contexte de marges de raffinage particulièrement élevées. De son côté, notre ligne en Believe (+36,2%), spécialiste de la gestion et de la distribution de contenus musicaux, a fait l’objet d’une OPA, à un cours qui nous a semblé encore insuffisant, si bien que la ligne a été complétée, avant même que l’on annonce début mars une approche d’un tiers acquéreur qui devrait désormais rendre bien difficile une sortie de cote au prix initial. Côté déconvenues, relève « pour l’essentiel les baisses des cours d’Altaréa (-16,7%)(foncière de commerces et promoteur) qui affirme néanmoins être très bien armée pour faire face à une année 2024 peu favorable au développement immobilier, de Lacroix (-14,8%)(équipements électroniques) qui continue de connaître des difficultés sur son activité nord-américaine pour l’automobile, de Neoen (-14,1%)(énergies renouvelables) dont les très solides résultats n’ont pas suffi à inverser la tendance baissière de son secteur, ou encore de Dassault Systèmes (-10,5%)(logiciels industriels) qui a légèrement « raté » les anticipations du marché. Outre Believe, sur le mois, de nombreuses positions ont été renforcées, notamment sur certaines lignes récemment boursièrement pénalisées, comme Altaréa, Highco (marketing digital), Imérys (matériaux de spécialités) ou Boiron (qui a perdu 10% depuis l’échec de l’OPA). La ligne en Compagnie du Cambodge dont la décote s’accentue en comparaison de son actif (groupe Bolloré) a aussi été complétée. Deux lignes déjà auparavant détenues dans le fonds ont été ré-initiées : celle dans le conglomérat industriel Chargeurs, pour lequel nous partageons le sentiment acheteur de son dirigeant, puisque la valeur fait actuellement l’objet d’une offre de rachat ; et celle du spécialiste de la relation client (équipements postaux, mails, consignes) Quadient dont la somme de la valeur de ses différentes activités nous semble fortement décotée en regard de sa valorisation boursière. Outre Axway, des profits partiels ont été pris sur Ipsos, Lectra (logiciels) et Piscines Desjoyaux, tandis que les lignes en Dassault Systèmes, Eurofins Scientific et Pluxee (spin-off de Sodexo) étaient soldées ».

NB : les fonds ont été sélectionnés selon leur performance sur longue période (nous avons retenu une durée de 5 ans, durée généralement retenue pour l’investissement dans les fonds actions), leur volatilité et leur forte pondération en petites valeurs françaises (minimum 20% du fonds).