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PARIS, 29 novembre (Reuters) - Les députés français ont adopté mardi par un vote à main levée, en nouvelle lecture, une proposition de loi imposant aux grandes entreprises un "devoir de vigilance" vis-à-vis des pratiques de leurs filiales et sous-traitants en matière de respect des droits humains et de l'environnement.

Le texte porté par le député socialiste Richard Potier veut tirer les enseignements de l'effondrement en 2013 de l'immeuble Rana Plaza à Dacca (Bangladesh), qui avait fait 1.135 morts, des ouvriers de firmes textiles travaillant pour des donneurs d'ordres étrangers, notamment de grandes marques occidentales.

Soutenu par les organisations non gouvernementales, il est critiqué par la droite et le patronat, qui y voient une atteinte à la compétitivité des entreprises françaises dans la mesure où aucun dispositif ne va aussi loin à l'étranger.

Concrètement, il prévoit que les entreprises françaises de plus de 5.000 salariés (ou 10.000 avec leurs filiales étrangères) devront mettre en place un plan de vigilance pour prévenir les atteintes aux droits humains et les dommages environnementaux dans l'ensemble de leur chaîne d'approvisionnement.

Ce plan devra être rendu public et inclus dans le rapport de gestion du conseil d'administration à l'assemblée générale des actionnaires, tout manquement étant passible d'une amende pouvant aller jusqu'à dix millions d'euros.

Le ministre de l'Economie et des Finances, Michel Sapin, a défendu une proposition de loi qui "n'est pas un texte punitif qui aurait vocation à stigmatiser nos entreprises".

Il a fait valoir que, au contraire, la réputation d'un grand groupe pouvait être gravement affectée par une catastrophe comme celle du Rana Plaza et que l'obligation de prévention qui leur était faite ne pouvait être que "bénéfique à l'économie et aux entreprises elles-mêmes".

Au nom de l'opposition, le député Les Républicains Dominique Tian a dénoncé "un nouveau signal contradictoire" envoyé par le gouvernement à l'adresse des entreprises, avec un risque "réel" d'atteinte à leur compétitivité.

Il a déploré que la France choisisse une nouvelle fois d'agir unilatéralement alors que la Commission européenne a adopté une directive sur le même sujet reposant sur une approche selon lui incitative et non "coercitive et punitive".

Le texte de la proposition a été remanié depuis sa première présentation en 2015 et son nouvel examen par l'Assemblée fait suite à l'échec de la Commission paritaire Assemblée-Sénat qui n'est pas parvenue à trouver un compromis.

Michel Sapin a invité les députés à la vigilance sur les risques de non conformité à la Constitution sur deux points, la définition du champ d'application des obligations de vigilance et la proportionnalité des sanctions prévues. (Yann Le Guernigou, édité par Sophie Louet)