* Manuel Valls veut refondre l'ensemble de la gauche

* Il assure que sa ligne est "la bonne"

* Le "patron" du PS appelle à balayer les combats secondaires

* Bartolone épingle une "faute" de Manuel Valls

* Mélenchon prédit une dissolution de l'Assemblée en 2015

* Les Verts demandent une convention de la majorité (Avec déclarations de Valls, des Verts, de Mélenchon, sondage)

PARIS, 23 octobre (Reuters) - Manuels Valls, de plus en plus contesté dans un parti socialiste au bord de l'implosion, a réaffirmé jeudi qu'il n'entendait pas "dévier" de sa "ligne", tandis que le premier secrétaire du PS lançait un appel au cessez-le-feu.

Le Premier ministre, qui plaide pour une refonte totale de la gauche, défend une politique de rigueur budgétaire critiquée par des parlementaires "frondeurs" qui s'appuient sur une défiance croissante de l'opinion.

Selon un sondage Tilder-LCI-OpinionWay réalisé mercredi et jeudi auprès de 1.002 personnes, 67% des Français jugent que sa politique économique n'est pas de gauche.

"Le débat, il n'est pas entre socialistes, il est d'abord avec les Français, et moi je ne dévierai pas de ma ligne", a néanmoins répondu Manuel Valls en marge d'une visite sur le site du laser Megajoule, au Barp, en Gironde.

"Je sais que je dois conduire des réformes. Elles sont nécessaires pour le pays, elles sont nécessaires pour les Français, je ne dévierai pas de cette ligne, rien ne me fera dévier, c'est la bonne ligne", a-t-il ajouté.

Le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, avait auparavant exhorté les socialistes, dans une déclaration solennelle, à retrouver leurs nerfs et à débattre sereinement "pour la réussite de la fin de ce quinquennat".

"Les socialistes doivent rester unis, les courants socialistes doivent débattre sans se battre, les dirigeants doivent maîtriser leur expression", a-t-il dit. "Nous le devons à notre pays, à la gauche, à notre Histoire."

"Balayons les querelles subalternes et les combats secondaires de personnes, cessons de nous distribuer de bons et de mauvais points", a ajouté le dirigeant socialiste.

"UNE FAUTE"

Les tensions au sein du PS se sont accrues avec l'abstention de 39 députés frondeurs, soutenus par la maire de Lille Martine Aubry, lors du vote de la partie recettes du budget.

Dans une interview publiée dans L'Obs, Manuel Valls s'en prend à une "gauche passéiste" et appelle à bâtir une "maison commune" pour les forces progressistes du pays avec, "pourquoi pas ?" un changement d'appellation du PS.

Le président socialiste de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, a estimé que le débat sur un changement de nom du PS était "une faute", ce qui n'a pas ébranlé Manuel Valls.

"Je lui dis (...) pour le moment, concentre-toi sur ton travail de Premier ministre, réponds aux attentes des Français en termes de sécurité, d'emploi, de transition énergétique, et laisse ce débat aux militants socialistes qui auront à discuter de tout ça au moment du prochain congrès", a-t-il dit sur RTL.

"C'est une rengaine et je pense que ce n'est pas le meilleur moment pour pousser cette chansonnette", a-t-il ajouté, en rappelant que l'idée n'était pas nouvelle chez Manuel Valls.

Le Premier ministre a répliqué sur BFM TV et RMC que sa fonction ne lui interdisait pas de "réfléchir à l'avenir de la gauche et du Parti socialiste".

"C'est ma famille politique et je ne peux pas m'en désintéresser", a-t-il fait valoir. "Je ne veux pas attendre que la gauche et le Parti socialiste changent dans l'opposition. C'est quand nous exerçons le pouvoir que nous devons tirer les leçons de cet exercice du pouvoir."

Dans un billet publié jeudi sur son blog, Claude Bartolone rappelle aussi les socialistes à l'ordre.

APPEL DES VERTS

"Maintenant, ça suffit", écrit le président de l'Assemblée. "A quoi jouons-nous exactement ?"

"Ici, nous serions des passéistes, sommés de changer le nom du Parti socialiste (...) Là, notre politique menacerait la République", ajoute-t-il dans une allusion à une déclaration de l'ex-ministre de l'Education nationale, Benoît Hamon.

Pour Henri Emmanuelli, figure de la gauche du parti, "le Premier ministre a mieux à faire que de la philosophie de bazar" : "S'occuper du chômage, de la croissance, du pouvoir d'achat et non pas d'échéances futures."

Comme Jean-Christophe Cambadélis, les écologistes ont pour leur part appelé à une forme de trêve bien que leur appartenance à la majorité soit de plus en plus incertaine.

Les députés François de Rugy et Barbara Pompili, coprésidents du groupe écologiste à l'Assemblée, proposent l'organisation d'une "convention parlementaire de la majorité".

Les divisions entraînent un "rétrécissement de la majorité inquiétant pour la deuxième partie" du quinquennat, écrivent-ils sur le site internet du groupe. "Il nous semble indispensable de prendre une initiative forte."

Le fondateur du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, virulent contempteur de François Hollande et de Manuel Valls, prédit pour sa part dans une interview à L'Opinion une dissolution de l'Assemblée dès mars prochain.

Plutôt que "perdre dans la honte en 2017", le chef de l'Etat "va tenter une astuce politicienne", dit-il.

(Sophie Louet, Gérard Bon et Emmanuel Jarry)